Bergson

essay A+

Mais, qu’est ce que la conscience ? Vous pensez bien que je ne vais pas définir une chose aussi concrète, aussi constamment présente à l’expérience de chacun de nous. Mais sans donner de la conscience une définition qui serait moins claire qu’elle, je puis la caractériser par son trait le plus apparent: conscience signifie d’abord mémoire.

La mémoire peut manquer d’ampleur: elle peut n’embrasser aune faible partie du passé; elle peut ne tenir que ce qui vient d’arriver; mais la mémoire est là, ou bien alors la conscience n’ est pas. Une conscience qui ne conserverait rien de son passé, qui s’oublierait sans cesse elle-même, périrait et renaîtrait à chaque instant : comment définir autrement l’inconscience? Quand libelliez disait de la matière que c’est « un esprit instantané », ne le déclarait-il pas, bon gré, mal gré insensible? Toute conscience est donc mémoire, – conservation et accumulation du passé dans le présent.

Mais toute conscience est anticipation de l’avenir. Considérez la direction de votre esprit à n’importe quel moment: vous trouverez qu’il s’occupe de ce qui est, mais en vue surtout de ce qui va être. L’attente si e toi vie nixe a e bergers premier bu éjointer I phoque 15, 2009 6 pages swaps toi vie nixe page L’attention est une attente , et il n’ a pas de conscience sans une certaine attention à la vie. L’avenir est la; il nous appelle, ou plutôt il nous tire à lui: cette traction ininterrompue , qui nous fait avancer sur la route du temps, est cause aussi que nous agissons continuellement.

Toute action est un empiétement sur l’avenir. Retenir ce ui n’est déjà plus, anticiper sur ce qui n’est pas encore, voilà donc la première fonction de la conscience. Il n’ aurait pas pour elle de présent, si le présent se réduisait l’instant mathématique. Cet instant n’est que la limite , purement théorique, qui sépare le passé de l’avenir; il peut être à la rigueur conçu , il n’est jamais perçu; quand nous croyons le surprendre, il est déjà loin de nous.

Ce que nous percevons en fait, c’est une certaine épaisseur de durée qui se compose de deux parties : notre passé immédiat et notre avenir imminent. Sur ce passé nous sommes appuyés, sur notre avenir nous sommes penchés: s’appuyer et se pencher ainsi est le propre d’un être conscient. Disons donc, si vous voulez, que la conscience est un trait d’union entre ce qui a été et ce qui sera, un pont jeté entre le passé et l’avenir.

Mais à quoi sert ce pas, et qu’est ce que la conscience est appelée à faire ? Si, comme nous le disions, la conscience retient le passé et anticipe l’avenir, c’est précisément, sans doute, parce qu’elle est appelée à effectuer un ch.?x: pour choisir, il faut sans doute, parce qu’elle est appelée à effectuer un choix: euro choisir, il faut penser à ce qu’on pourra faire et se remémorer les conséquences, avantageuses ou nuisibles, de ce qu’on a déjà fait; il faut prévoir et il faut se souvenir.

Mais d’autre part notre conclusion , en se complétant, nous fournit une réponse plausible à la question que nous venons de poser : tous les êtres vivants sont-ils des êtres conscients, ou la conscience ne couvre-t-elle qu’une partie du domaine de la vie? Si, en effet, conscience signifie choix, et si le rôle de la conscience est de se décider, il est douteux qu’on rencontre la conscience dans des organismes qui ne meuvent pas spontanément et qui n’ont as de décision à prendre. A vrai dire, il n’ a pas d’être vivant qui paraisse tout à fait incapable de mouvement spontané.

Même dans le monde végétal, où l’organisme est généralement fixé au sol, la faculté de se mouvoir est plutôt endormie qu’absente : elle se réveille quand elle peut se rendre utile. Je crois que tous les êtres vivants , plantes et animaux, la possèdent en droit; mais beaucoup d’entre eux y renoncent en fait, – bien des animaux d’abord, surtout parmi ceux qui vivent en parasites sur d’autres organismes et qui n’ont pas besoin de se déplacer pour trouver leur nourriture, puis la plupart des végétaux : eux ci ne sont-ils pas, comme on la dit, parasites de la terre? La me parait donc vraisemblable que la conscience, originalement mi la dit, parasites de la terre? Al me parait donc vraisemblable que la conscience, originalement immanente à tout ce qui vit, s’endort là ou il n’ a plus de mouvement spontané, et s’exalte quand la vie appuie sur l’activité libre. Chacun de nous a pu le vérifier sur lui-même. Qu’arrive-t-il quand une de nos actions cesse d’être spontanée pour devenir automatique? La conscience s’en retire.

Dans l’apprentissage d’un exercice par exemple, nous commençons par être conscients de chacun des événements que nous exécutions, parce qu’il vient de nous, parce qu’il résulte d’une décision et implique un choix; puis à mesure que ces mouvements s’enchaînent plus mécaniquement les uns les autres, nous dispensant ainsi de nous décider et de choisir, la conscience que nous en avons diminue et disparaît. Quels sont, d’autre part, es moments où notre conscience atteint le plus de vivacité?

Ne sont-ce pas les moments de crise intérieure, où nous hésitons entre deux ou plusieurs partis à prendre, où nous sentons que notre avenir sera ce que nous l’aurons fait? Les variations d’intensité de notre conscience semblent once bien correspondre à la somme plus ou moins considérable du choix ou, si vous voulez, de création, que nous distribuons sur notre conduite. Tout porte à croire qu’il en est ainsi de la conscience en général.

Si conscience signifie mémoire et anticipation, c’est que conscience est synonyme de choix. » Dans ce texte, bergers aborde la anticipation, c’est que conscience est synonyme de choix. » Dans ce texte, bergers aborde la question de la conscience et de sa définition. Commencez par relever les différents éléments de définition qu’il propose. Tout d’abord, elle signifie « mémoire », puis il précise qu’elle est également « anticipation de l’avenir » et dans un troisième temps il la définit par le choix.

Voici donc les trois étapes de définition que bergers propose ici : mémoire, anticipation de l’avenir et choix, présentant ce dernier point comme une synthèse des deux premiers. Votre travail va donc consister à rendre compte de ces trois moments définissant la conscience. Spontanément, nous définissons la conscience par son étymologie « accompagné de savoir ». Or, si vous prêtez attention aux propos de bergers, il la définit d’abord par rapport au temps, au passé et à l’avenir. La mémoire est ce qui permet d’abord de penser une continuité de la conscience.

Sans cette continuité, la conscience est réduite à néant, à n’être qu’une succession d’instants séparés les uns des autres. Par exemple, pour avoir conscience d’une situation, il faut bien que je puisse la saisir dans sa totalité ce qui suppose une continuité dans le temps et un souvenir. Mais toute conscience suppose aussi un regard vers l’avenir : si nous agissons c’est bien parce que nous avons un avenir. Notez que celui qui n’aurait aucun avenir ne ferait plus rien.