Le Parlement Beninois Sous Le Renouveau Democratique

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RADC-CRDA CONFÉRENCE ANNUELLE – ‘L’internationalisation du droit Constitutionnel’ à Rabat, au Maroc, 20/01/2011 DOCUMENT DE TRAVAIL S’il vous plaît ne pas utiliser ce papier sans contact avec l’auteur sur: aivojoel@yahoo. fr LE PARLEMENT BÉNINOIS SOUS LE RENOUVEAU DÉMOCRATIQUE RÉUSSITES ET Échecs Par Frédéric Joël AIV orql Sni* to View Maître-assistant de droit public à l’Université d’Abomey-Calavi (Bénin) Chercher Associé au CERDREDI.

Université Montesquieu Bordeaux Président de l’Association Béninoise de Droit Constitutionnel SOMMAIRE INTRODUCTION l- UN MODELE INSTITUTIONNEL A. Une législature stabilisée a consolidation de l’État de droit2. 20 ans après l’adoption de la constitution du 11 décembre 1990, les institutions qu’elle prévoit ont été toutes Installées de sorte qu’il est permis de soutenir que la démocratie béninoise n’est ni une démocratie virtuelle, ni une démocratie sur papier, encore moins une démocratie de service.

Elle n’est pas seulement une idée, mais en vérité, une pratique, un vécu, un modèle qui tranche avec les démocraties de service en Afrique. Globalement, la constitution béninoise du 11 décembre 1990 s’est attachée ? affirmer un certain nombre de principes fondateurs et de règles fondamentales. Au-delà de l’aspect institutionnel sur lequel, cette étude s’appesantira, le constituant de 1990 a consacré l’existence de droits et libertés et prévu les garanties de leur protection3.

Mais, l’originalité de la constitution réside également dans l’organisation institutionnelle de l’État, la répartition de ses charges et le contrôle de la constitutionnalité de leur fonctionnement. Ainsi, Porganisation des pouvoirs publics repose sur la traditionnelle séparation des pouvoirs qui fait cohabiter les trois organes fondamentaux déjà décrits par Montesquieu dans l’esprit des lois. Il s’agit, bien évidemment, du pouvoir exécutif, u pouvoir législatif et enfin du pouvoir judiciaire.

On retrouve donc, dans la constitution béninoise du 11 décembre 1990, ces trois pouvoirs classiques, auxquels le constituant béninois adjoint un quatrième, plutôt juridictionnel ou constitutionnel, selon l’expression du Doyen Louis Favoreu. C’est la Cour constitutionnelle dont les attributions et l’emprise sur le fonctionnement du régime autorisent à soutenir qu’elle est bel et bien une des clés de voûte du régime politique du 31 du régime autorisent à soutenir qu’elle est bel et bien une des clés de voûte du régime politique du renouveau démocratique.

Comme le pouvoir exécutif dont le fonctionnement régulier doit participer à la stabilisation du nouveau régime, l’Assemblée nationale, chambre unique du Parlement4 béninois, était également attendue pour plusieurs raisons historiques. De 1963 à 1972, le fonctionnement du pouvoir législatif est caractérisé par une instabilité chronique et la précarité des législatures. Aucun parlement, en dehors de ceux installés par le parti unique et soutenu par la pensée unique, n’a réussi a fini son mandat, ni a véritablement accompli sa mission.

Pour toutes ces raisons, le renouveau du pouvoir législatif, mlS en perspective par la onférence nationale et orchestré par le constituant de 1 990, était un défi de l’expérience démocratique ouverte dès 1991 Deux décennies après l’installation de la première législature de l’Assemblée nationale, on peut déjà oser tirer quelques clichés sur le fonctionnement et Pactivité du parlement de l’ère du renouveau démocratique.

En effet, de façon générale, « Assemblée nationale est demeurée stable et démocratique. Cependant, la stabilité du parlement béninois n’est pas seulement due à sa propre organisation et aux prérogatives qui lui sont reconnues par la loi fondamentale. Bien au-delà, elle résulte, quelque part, de la détermination des Députés à affranchir l’institution de la tutelle du pouvoir exécutif et à davantage mettre en œuvre leur rôle de contre-pouvoir.

Cette stabilité, marque caractéristique du fonctionnement de rAssemblée, est renforcée par l’indépendance dont elle a fait montre pendant 20 ans en dépit de la nature du régime politique et de la place prép 3 1 elle a fait montre pendant 20 ans en dépit de la nature du régime politique et de la place prépondérante quy tient le chef de l’État. Mais l’on devra également se rendre compte que le système olitique béninois est articulé autour de la prépondérance politique et institutionnelle du président de la République. Le pouvoir législatif, en sort avec rôle, non moins important, mais limité.

Cette répartition, observée intentionnellement par le constituant, explique le déséquilibre patent entre les deux pouvoirs. En dépit de ce déséquilibre structurel presque propre à ce type de régime, le Parlement béninois a su jouer son rôle de contre-pouvoir, législature après législature et ce, malgré les renouvellements partiels ou larges et les majorités fluctuantes. Il est à noter que contrairement aux principes acquis des commissaires du peuple sous le Parti de la Révolution Populaire du Bénins (PRPB), les Députés de l’ère du renouveau démocratique ont quasiment changé de statut.

Ils sont, sans équivoque, les représentants dûment élus du peuple6. Ce sont les élus de la Nation7, sélectionnés au moyen de procédés politiques pluralistes et de techniques juridiques parfaitement démocratiques. En effet, les Députés beninois, comme il sera largement développé infra, sont élus au scrutin de liste, à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne. Ces listes sont exclusivement présentées par des formations politiques, ce qui exclut complètement la possibilité de candidature indépendante aux élections législatives.

Au regard du mode de fonctionnement actuel de l’Assemblée nationale, par rapport à celui des Parlements des précédentes Républiques, il est évident que de nombreuses réformes y ont été apportées. Elles ont contr 1 précédentes Républiques, il est évident que de nombreuses réformes y ont été apportées. Elles ont contribué à aménager et assainir l’environnement institutionnel du Parlement, mais ussi, à donner dans la pratique au législateur, les outils de son autonomie, de sa stabilité, voire, son efficacité relative.

Le mode de constitution du corps des parlementaires a pour sa part changé, ainsi que la possibilité d’instaurer un véritable débat démocratique, devenue une réalité, obligeant désormais le gouvernement à tenir compte des observations et critiques du Parlement. De l’élection des commissaires du peuple sur la base du centralisme démocratique et la ligne de masse8, l’on est passé ? une élection des élus de la nation à partir de listes présentées par des partis politiques.

Mieux, l’institution n’a pas manqué, en dépit des goulots d’étranglement que l’on peut noter, de rechercher une certaine sécurité juridique dans l’élaboration des normes, qui, on peut le constater, sont de moins en moins sujettes à des décisions d’inconstitutionnalité pour celles qui font l’objet de recours devant le juge constitutionnel. Néanmoins, il demeure que face à la résolution des Députés de ne pas faire de l’Assemblée une institution aux ordres du gouvernement, des positions des plus tranchées n’hésitent pas à être prises, instaurant un climat d’incompréhension et de crise institutionnelle latente.

Le revers d’une telle manifestation d’indépendance est que, d’un extrême à un autre, les rapports entre l’exécutif et le législatif9 apparaissent de plus en plus malaisés, tendus, conflictuels au point que les activités parlementaires se sont quasiment réduites à un contrôle systématique de l’action gouvernementale, au détrlment de l’activi PAGF s 1 quasiment réduites a un contrôle systématique de l’action gouvernementale, au détriment de l’activité normative, de la création du droit dans un pays envahi par l’informel et où l’espace du « pays légal » se réduit, hélas, en peau de chagrin.

Alors qu’il est question de célébrer le cinquantenaire de l’indépendance du Bénin, il apparaît nécessaire d’inclure dans la réflexion générale sur l’état de la démocratie béninoise, la question du bilan de l’activité du pouvoir législatif. Peut- on sans réserve parler de renouveau du Parlement béninois ? Ou doit-on, et sur quels fondements, nuancer l’émergence fulgurante du législateur dont la stabilité, l’indépendance et le dynamisme tranchent et contrastent fort remarquablement avec les ruptures de législature des parlements antérieurs ?

Le renouveau démocratique a-t-il consacré la renaissance du Législatif ? Autrement, en 20 ans de pratique parlementaire, dans un environnement politique pluraliste, quelle est, dans l’action du législateur béninois, la part de réussite et la part d’échec ? Pour appréhender ces questions dans toute leur complexité, il convient, d’abord, de recenser les différents éléments qui constituent le cadre institutionnel de l’Assemblée nationale. La stabilité dont se prévaut [‘institution, sur ce fait, fait incontestablement d’elle un modèle institutionnel(l) à part entière.

Mais, l’on verra, à l’analyse qu’il s’agit bien d’un modèle qui demeure, à bien d’égards, perfectible(ll). C’est tout l’intérêt de la présente étude qui s’attellera à mettre en évidence les réussites et les échecs de 20 ans de pratique parlementaire dans un contexte de pluraliste politique. l- un modèle institutionnel une dissimilitude apparemment insignifiante marque 1 l- Un modèle institutionnel Une dissimilitude apparemment insignifiante marque la place accordée par le constituant béninois au pouvoir législatif par rapport à celui exécutif.

Néanmoins, les caractéristiques de l’Assemblée nationale béninoise, d’une part, la Loi fondamentale, d’autre part, lui aménagent les conditions de son indépendance t de sa stabilité : législateur et contrôleur de l’action gouvernementale10. Autant de prérogatives à mettre en œuvre, dans un contexte où le pouvoir exécutif a prépondérance sur celui législatif, mais en même temps, suffisamment de possibilités de faire d’elle un contre-pouvoir véritablement actif. ? cet égard, ce qui retient l’attention des observateurs, c’est la stabilité de la législature(A) et la contribution du législateur à la consolidation de l’État de droit(3). La stabilisation des législatures est la conséquence directe d’une conjonction de facteurs. Au nombre de ceux-ci figurent, d’abord, a tenue, à échéance régulière, d’élections concurrentielles permettant le renouvellement, à terme échu, de l’Assemblée.

Ensuite, l’on peut noter un fonctionnement plus ou moins régulier de l’institution parlementaire dont les organes dirigeants se renouvellent désormais quasi systématiquement. En tenant compte de ces deux éléments, et pour apporter la preuve de la stabilité de la législature, il convient de mettre l’accent successivement sur la routinisation des élections législatives (1 )et le fonctionnement régulier de l’Assemblée (2). 1- La routinisation des élections législatives

L’Assemblée nationale, à travers sa structure souple, est demeurée, stable et démocrati ue_ Mais c’est la stabilité qui apparaît aux yeux de tous PAGF 7 1 demeurée, stable et démocratique. Mais c’est la stabilité qui apparait aux yeux de tous comme la caractéristique fondamentale de PAssemblée nationale sous le renouveau démocratique. À première vue, il n’a échappé à personne que depuis l’installation de la première égislature en 1991, le Bénin n’a connu aucune rupture de législature.

Ainsi, depuis l’organisation des premières élections législatives de l’ère du enouveau démocratique, le 2 février 1991, quatre élections ont été organisées régulièrement, pour permettre, non seulement, l’alternance démocratique, mais aussi, la participation du peuple au pouvoir qui est le sien, à travers ses représentants dûment élus. Au regard des différentes élections égislatives organisées depuis le renouveau démocratiquel 1, il ressort clairement que le Bénin a le mérite de renouveler à terme échu les différentes législatures qui assurent le fonctionnement du pouvoir législatif.

Au bout de quatre ans de législature, tous les postes de Députés ont remis en jeu et PAssemblée nationale pourrait donc se renouveler intégralement si le peuple en décide ainsi. Il en a été ainsi et les élections législatives qui ont été successivement organisées ont consacré non seulement la stabilité de la législature mais surtout la révocabilité du mandat parlementaire. Combien sont les Députés qui au bout de leur mandat n’ont pas été renouvelés ? Combien également sont ceux des parlementaires qui législature après législature, élection après élection sont systématiquement reconduits.

Cette précarité devient dès lors la manifestation même de la ouveraineté du peuple qui a toujours fait preuve d’une liberté totale dans la sélection de ses représentants. Certaines élections législatives ont a liberté totale dans la sélection de ses représentants. Certaines élections législatives ont ainsi pu consacrer le renouvellement partiel des effectifs d’une législature à une autre. D’autres par contre ont très largement reconfiguré la composition de l’hémicycle.

Mais, au-delà de cette recomposition partielle ou totale des bancs de l’Assemblée, c’est en filigrane la régularité des scrutins législatifs qui est mise en exergue et soulignée par ous les commentateurs. Elle tranche avec la précarité du pouvoir législatif et les ruptures de législature devenues chroniques sous les précédentes Républiques. Il n’est donc pas infondé de faire remarquer que la stabilité retrouvée de l’Assemblée natlonale, sous le renouveau démocratique, est en grande partie, un des traits saillants qui ressort de l’évaluation du fonctionnement du régime politique béninois.

Tout comme la stabilité de la législature, il apparaît également indispensable d’associer le fonctionnement régulier des organes de l’AssembIée nationale à la réussite du processus émocratique en cours au Bénin. 2- Le fonctionnement régulier de l’institution parlementaire es travers de la pratique parlementaire abondamment relevés par les commentateurs 12, n’ont pas réussi à éclipser la constance du fonctionnement régulier des organes de l’Assemblée. Le caractère démocratique du fonctionnement de l’institution parlementaire ne souffre d’aucune ambigüité encore moins de travers majeurs.

Quelques écarts à régard des commodités démocratiques ont néanmoins été signalés. Ce sont à titre illustratif, sans être exhaustif, la gestion non concertée de ‘Assemblée, le refus de prendre en compte la minorité parlementaire dans la composition des organes centraux de l’ins PAGF 31 prendre en compte la minorité parlementaire dans la composition des organes centraux de l’institution etc. Néanmoins, la compositlon et le fonctionnement de rinstitution semblent avoir obéit aux prescriptions des textes fondamentaux appropriés.

Ce fonctionnement plus ou moins régulier des organes du Parlement cadre avec la volonté du constituant d’imprimer ce caractère démocratique à l’institution. Le résultat permet aujourd’hui de prendre acte du renouvellement constant es organes de l’Assemblée nationale. Ce sont d’abord les bureaux de l’AssembIée qui attestent du bon fonctionnement de l’institution. Quatre présidents se sont succédé à la tête des cinq léglslatures13, autant de présidents à la tête de chaque commission ou de groupe parlementaire que de égislatures.

Ensuite, l’on évoquera les commissions permanentes et les groupes parlementaires. Tous ces organes, constamment renouvelés ont toujours fonctionné conformément aux textes qui les instituent. Il reste simplement à signaler que si l’on peut se satisfaire de ce que les organes de l’Assemblée nationale se sont acquittés de eurs différentes charges structurelles, l’accent devra également mis sur la nécessité d’inclure dans le fonctionnement de l’Assemblée l’obligation d’instaurer une véritable culture de gestion concertée.

Car, il ne suffira pas seulement pour les organes de fonctionner et de faire tourner le Parlement tout au long d’une législature, pour qu’on en conclue à son bon Mais, il apparaîtra difficile, à cet égard seulement, de soutenir que ce fonctionnement est de bonne qualité et respecte les paramètres intégrant, de nos jours, la gouvernance concertée ainsi que l’obligation de la prise en compte dans l’adminis