Didactiques De L Oral Et Ducation Communicative Implicite
Didactiques de l’oral et éducation communicative implicite Robert BOUCHARD, Gric (Groupe de recherche sur les interactions communicatives) -Université Lumière-l_yon 2 Dans ce papier un peu… masochiste, je vais entreprendre, en tant que didacticien de (dé) limiter l’ambition didactique dans le domaine de l’enseignement de l’oral en langue maternelle, ou, en d’autres termes, de définir ce que me semblent être les limites d’une telle intervention didactique. La didactique de l’oral actuelle se conçoit la plupart du temps comme une proposition de nouvelles pratiques pédagogiques spécifiques (cf.
Dolz or 15 2001 avec une « impo ti Sni* to inspirées du Fle) sen formation linguistiqu comme le développe core plus Maurer, municatives ispositif de se concevoir nt dans d’autres disciplines, mais de manière minoritaire, le travail d’élèves en petits groupes par exemple, considéré à juste titre comme profitable non seulement pour la pratique communicative des élèves mais aussi pour le développement de leurs capacités socio-cognitives dans d’autres disciplines scolaires (cf. les travaux du groupe Inrp « Oral » 1 et 2). Pour notre part, il nous semble nécessaire aussi (surtout ? e tenir compte des pratiques orales les plus dominantes dans la formation des élèves, quelle que soit la discipline. Ces pratiques ordinaires de communication orale en classe, que d’autres appelleraient des « ethnométhodes’ (Mondada, Pekarek. 2001), s’ancrent dans une tradition pé SWipe page pédagogique ancienne, largement intuitive, culturellement partagée par une bonne partie des partenaires de l’action éducative, maîtres comme élèves. Stables au delà des frontières dlsciplinaires comme des modes didactiques, elles constituent le socle de l’éducation ommunicative orale des élèves.
Si on ne connaît pas suffisamment ce plus grand dénominateur commun des pratiques orales scolaires, ne risque-t-on pas de faire l’impasse sur ces rituels communicatifs prégnants, mis en oeuvre par les élèves pendant tout le temps où ils ne travaillent pas spécifiquement l’oral, et/ou où ils ne travaillent pas en utilisant un dispositif de communication spécifique (petit groupe de travail, classe coopérative… ) c’est-à-dire, on peut du moins en falre l’hypothèse, pendant le pourcentage le plus important du temps scolaire ordinaire ?
Dans un premier temps, nous développerons cette problématique de l’éducation orale implicite. Puis nous tenterons de mieux en cerner les contraintes en comparant d’une part son point de départ, la compétence orale d’élèves (de Cel) au début de leur fréquentation de cette agence de socialisation que constitue pour eux l’école et d’autre part son point d’arrivée appréhendé à travers le comportement oral d’élèves de 50 participant à un « cours dialogué » (classe de géographie), c’est-à- dire d’élèves depuis longtemps rodés aux routines dialogales du système éducatif français.
Pratiques orales, enseignement, éducation Si la maitrise de l’écrit s’enseigne déjà difficilement (Halte, 1991) parce qu’elle excède les limites du cours de français, c’est encore plus vrai pour celle de l’oral. Sans même aborder ses usages extrascolaire 15 français, c’est encore plus vrai pour celle de l’oral. Sans même aborder ses usages extrascolaires, on ne peut que constater que l’oral est le vecteur essentiel de l’ensemble des enseignements- apprentissages.
Du fait de son omniprésence dans le fonctionnement scolaire, il ne peut être uniquement un objet d’enseignement. Il est d’ailleurs peut-être avant tout le but et le moyen d’une éducation implicite aux règles sociales régissant la communication entre enfants (adolescents) et adultes, telles qu’elles existent dans l’ensemble d’une société dont l’école n’est que le reflet.
Enseignement/ Éducation, Apprentissage scolaire / Développement social La questlon que nous posons relève pour une part de l’opposition générale entre enseignement, instruction et éducation la maîtrise d’un savoir-faire aussi global que le savoir communiquer oralement peut-elle (doit-elle) être développée dans un cadre isciplinaire, par des séquences didactiques ou dépend-elle surtout d’une formation beaucoup plus multiforme, de nature éducative, gommant partiellement les frontières des disciplines et celles du scolaire et du non-scolaire ?
Remarquons à cet égard que cette discussion sur le rôle des disciplines dans la formation des élèves, comme dans la structuration de l’action de formation, est toujours d’actualité, dans les lufm par exemple. Cest aussi la poursuite de débats vieux comme l’école sur le partage des rôles entre famille et école (devenue obligatoire), sur le sens de la laicité comme neutralité ?ducative. Il est notable que les changements d’intitulé de l’organisme public et politique qui a pour fonction de gérer cette formation se sont toujours fai formation se sont toujours faits politiquement et à chaud.
Le plus remarquable, qui l’a vu passer de ministère de l’Instruction publique à ministère de l’éducation natlonale, s’est opéré sous les hospices de la « Révolution nationale » du Maréchal Pétain et dans une volonté symboliquement affirmée de reprise en main par l’État de la formation de ses « enfants » pour corriger les défauts ‘un système ancien dont les dysfonctionnements étaient sensés être à l’origine de la défaite. Mais il n’est pas certain que cette transformation volontariste de l’intitulé ait abouti à une transformation du fonctionnement de l’institution.
Si on examine même rapidement la nature des concours de recrutement, on constate que, dans le secondaire par exemple, ils sont strictement disciplinaires. D’autres indices de la survivance de lilnstruction publique seraient la définition du sewice des enseignants en termes d’heures d’enseignement ou ncore la configuration des bâtiments scolaires en France qui se divisent grosso modo en locaux didactiques (les salles de classe) et en locaux administratifs auxquels se rajoute un Cdi/Bcd, dont le bon usage éducatif reste encore largement problématique.
Mais on ne trouve nul autre lieu « éducatif’ stable, où adultes et enfants/adolescents pourraient se rencontrer dans une finalité formative plus large que l’enseignement des disciplines définies au programme. Observons aussi que pour ces disciplines coexistent des intitulés hétérogènes. Ceux-ci apposent des disciplines qui conservent le om de la discipline scientifique qui les parraine, mathématiques, physique 5 conservent le nom de la discipline scientifique qui les parraine, mathématiques, physiques… t d’autres plus marginales qui s’anoblissent grâce au terme éducation (physique, musicale, artistique… ). Le « français » est, lui, dans une situation originale : il n’a droit ni à un repérage scientifique précis (sauf à l’intituler « Enseignement de Lettres » et encore) ni au label l’éducation ». Si cette ambigulté terminologique n’est pas l’unique source de son ambiguité de statut entre disciplines scientifiques et disciplines ?ducatives de pleine acception, elle la manifeste.
Si la physique concerne uniquement la physique, le français est partout dans le cours de français mais aussi dans tous les autres enseignements (cf. la notion de » français bien commun « ) et surtout dans la vie quotidienne à l’école et hors de l’école des partenaires éducatifs, élèves, parents et enseignants. Ajoutons même que par son intitulé, il communique directement avec la nation, avec toute la responsabilité politique correspondante de défense de la langue elle-même garante de l’unité du pays ! cf. a notion de « français national » de R. Balibar) Paradoxe culturel, en France ( ? ), de l’enseignement scolaire de la communication orale en langue maternelle : un vieux désir. Cest périodiquement et depuis longtemps que se manifeste cette « inquiétude » orale de notre système d’enseignement. En 1930 déjà, Bally s’intéresse à l’enseignement de l’oral et cet intérêt est concomitant avec la publication d’un livre sur « La crise du français ».
D’ailleurs, pour Chevalier, la question de l’oral serait même un symptôme à prendre en compte pour juger de l’état de anté du système scolaire PAGF s 5 l’oral serait même un symptôme à prendre en compte pour juger de l’état de santé du système scolaire : le thème de la nécessité d’une didactique de l’oral en langue maternelle apparaitrait chaque fois qu’une nouvelle population doit être intégrée – difficilement – dans l’institution scolaire.
Le sentiment d’une insuffisante maîtrise de l’oral par les élèves tiendrait donc de ces « émotions intellectuelles » dont Jean Hebrard a parlé ? propos de l' »illettrisme ». Des élèves qui ne parlent pas comme ous (des adultes qui ne lisent/écrivent pas comme nous), mais qui ont toujours existé sont soudain rendus plus visibles par un ensemble de facteurs largement externes à l’école. Et cette caractéristique mineure de leur savoir-être en vient à les caractériser entièrement, et leur « manque » devient celui de l’école toute entière. Le caractère objectif comme la nature de ce manque ne sont donc pas patents.
Avant de vouloir donc « mieux » faire parler des élèves qui parlent déjà, sans doute faut-il se demander quelle place, quel rôle on veut donner à cette parole des élèves. On sait qu’enseigner un savoir-faire qui ne sert à rien, ni hic et nunc ni à l’occasion d’une (ré) utilisation ‘fonctionnelle » sociale, rapide et continue, ne sert pas à grand chose non plus : l’exemple de l’illettrisme, une nouvelle fois, est là pour le prouver : certains de nos élèves n’ont-ils pas le sentiment d’être des « aphasiques sociaux », des individus qui n’ont pas la parole et/ou dont la voix n’est pas audible ?
Or, dans une institution visant l »‘instruction’ disciplinaire et non pas l’éducation des élèves, cet espace de parole pour les « formés » n’est pas évident. Les enseig 6 5 l’éducation des élèves, cet espace de parole pour les « formés » n’est pas évident. Les enseignants estiment avoir besoin de tout le temps qui leur est alloué pour traiter le programme de la dlscipline qu’ils enseignent et nul autre temps ni espace ne sont disponibles pour la prise de parole des élèves.
Dans le système britannique où l’enseignant-éducateur est sur place dans l’établissement même en dehors des cours et dispose d’un espace de travail en dehors de la classe, il est sans doute plus facile de trouver des occasions de communication adulte- enfant. Mais c’est le système éducatif allemand qui est le plus attentif à cette libre expression des points de vue des élèves . près l’expérience de l’emprise totalitaire nazie sur les esprits, différents Landers, après 1945, ont décidé que l’école devait former de futurs citoyens plus autonomes dans leurs opinions et leurs valeurs, c’est-à-dire exercés scolairement à défendre ceux- ci au sein de leurs groupes de pairs. Certains Landers conseillent même à leurs enseignants de ne pas abuser du troisième temps de l’échange pédagogique, celui de l’institutionnalisation de la onnaissance, le moment où l’adulte « récupère » la parole de l’élève pour la reformuler dans les termes de sa doxa disciplinaire et l’officialiser.
Il me semble, qu’en France, nous sommes loin de cette position pour un ensemble de raisons culturelles qui se cumulent. D’une part, l’école de la République est la suite logique de l’école catholique, ou du mode catholique de transmission des connaissances. Celles-ci ne peuvent être le produit d’une réflexion individuelle à partir du livre mais doivent découler de la médiation orale d 7 5