Question De Corpus

essay B

Question de corpus CORPUS : TEXTE A. Molière, L’école des femmes (1662), acte I scène 1 TEXTE B. Molière, Dom Juan (1665), acte I scène 1 TEXTE C. Molière, Le misanthrope (1665), acte I scène 1 Problematique : Comment ces différentes entrées en matière se donnent-elles les moyens de nous captiver ? TEXTE A. Molière, L’école des femmes (1662) CHRYSALDE Vous venez, dites-vo p or 12 Sni* to View ARNOLPHE Oui. Je veux terminer in? Nous sommes ici seuls, et l’on peut, ce me semble, Sans craindre d’être ouïs, y discourir ensemble. Voulez-vous qu’en ami je vous ouvre mon cœur?

Votre dessein, pour vous, me fait trembler de peur, Et, de quelque façon que vous tourniez l’affaire, Prendre femme est à vous un coup bien téméraire. Il est vrai, notre ami. Peut-être que chez vous Vous trouvez des sujets de craindre pour chez nous; Et votre front, je crois, veut que du mariage Les cornes soient partout l’infaillible apanage. sont, partout où vous êtes, De faire cent éclats des Intrigues secrètes… Fort bien. Est-il au monde une autre ville aussi Où lion ait des maris si patients quiici? Est-ce qu’on n’en voit pas de toutes les espèces Qui sont accommodés chez eux de toutes pièces?

L’un amasse du bien dont sa femme fait part A ceux qui prennent soin de le faire cornard; L’autre, un peu plus heureux, mais non pas moins infâme, Voit faire tous les jours des présents à sa femme, Et d’aucun soin jaloux n’a l’esprit combattu Parce qu’elle lui dit que c’est pour sa vertu. L’un fait beaucoup de bruit qui ne lui sert de guères; L’autre en toute douceur laisse aller les affaires, Et, voyant arriver chez lui le damoiseau, Prend fort honnêtement ses gants et son manteau. L’une, de son galant, en adroite femelle, Fait fausse confidence à son époux fidèle, Qui dort en sûreté sur un pareil appas,

Et le plalnt, ce galant, des soins qu’il ne perd pas; L’autre, pour se purger de sa magnificence, Dit qu’elle gagne au jeu l’argent qu’elle dépense, Et le mari benêt, sans songer à quel jeu, Sur les gains qu’elle fait rend des grâces à Dieu. Enfin, ce sont partout des sujets de satire, Et, comme spectateur, ne puis-je pas en rire? Puis-je pas de nos sots… Oui; mais qui rit d’autrui Doit craindre qu’en revanche on rie aussi de lui. TEXTE B. Molière, Dom Jua PAGF Gusman et Sganarelle, deux valets, discutent de Dom Juan, maître de Sganarelle et promis à Elvire.

GUSMAN: Quoi? Ce départ si peu prévu serait une infidélité de Dom Juan? Il pourrait faire cette injure aux chastes feux de Done Elvire? SGANARELLE: Non, c’est qu’il est jeune encore, et qu’il n’a pas le courage. GUSMAN: Un homme de sa qualité ferait une action si lâche? SGANARELLE: Eh oui, sa qualité! La raison en est belle, et c’est par là qu’il s’empêcherait des choses. GUSMAN: Mais les saints nœuds du mariage le tiennent engagé. SGANARELLE: Eh! Mon pauvre Gusman, mon ami, tu ne sais pas encore, crois-moi, quel homme est Dom Juan.

GUSMAN: Je ne sais pas, de vrai, quel homme il peut être, s’il aut qu’il nous ait fait cette perfidie; et je ne comprends point comme après tant d’amour et tant d’impatience témoignée, tant d’hommages pressants, de voeux, de soupirs et de larmes, tant de lettres passionnées, de protestations ardentes et de serments réitérés, tant de transports enfin et tant d’emportements qu’il a fait paraître, jusqu’à forcer, dans sa passion, l’obstacle sacré d’un couvent, pour mettre Done Elvire en sa puissance, je ne comprends pas, dis-je, comme, après tout cela, il aurait le cœur de pouvoir manquer à sa parole. 19 lui.

Je ne dis pas qu’il ait changé de sentiments pour Done Elvire, e n’en ai point de certitude encore: tu sais que, par son ordre, je partis avant lui, et depuis son arrivée il ne m’a point entretenu; mais, par précaution, je t’apprends, inter nos, que tu vois en Dom Juan, mon maître, le plus grand scélérat que la terre ait jamais porté, un enragé, un chien, un diable, un Turc, un hérétique, qui ne croit ni Ciel, ni Enfer, ni loup-garou, qui passe cette vie en véritable bête brute, en pourceau d’Épicure, en vrai Sardanapale, qui ferme l’oreille à toutes les remontrances qu’on lui peut faire, et traite de billevesées tout ce que nous croyons.

Tu me dis qu’il a ?pousé ta maitresse: crois qu’il aurait plus fait pour sa passion, et qu’avec elle il aurait encore épousé toi, son chien et son chat. Un mariage ne lui coûte rien à contracter; il ne se sert point d’autres pièges pour attraper les belles, et c’est un épouseur à toutes mains. Dame, demoiselle, bourgeoise, paysanne, il ne trouve rien de trop chaud ni de trop froid pour lui; et si je te disais le nom de toutes celles qu’il a épousées en divers lieux, ce serait un chapitre à durer jusques au soir. Tu demeures surpris et changes de couleur à ce discours; ce n’est là qu’une ébauche du personnage, t pour en achever le portrait, il faudrait bien d’autres coups de pinceau. Texte C. Molière, le misanthrope (1665) : acte I scène 1.

Philinte, homme indulgent, et son ami Alceste le misanthrope, discutent de la passio 2 I scène 1. discutent de la passion éprouvée par Alceste pour Célimène, jeune femme frivole. PHILINTE Et ce qui me surprend encore davantage, Cest cet étrange choix où votre cœur s’engage. La sincère Éliante a du penchant pour vous, La prude Arsinoé vous voit d’un œil fort doux: Cependant à leurs voeux votre âme se refuse, Tandis qu’en ses liens Célimène l’amuse, De qui lihumeur coquette et l’esprit médisant Semblent si fort donner dans les mœurs d’à présent. D’où vient que, leur portant une haine mortelle, Vous pouvez bien souffrir ce qu’en tient cette belle?

Ne sont-ce plus défauts dans un objet si doux? Ne les voyez-vous pas? Ou les excusez-vous? ALCESTE Non, l’amour que je sens pour cette jeune veuve Ne ferme point mes yeux aux défauts qu’on lui treuve, Et je suis, quelque ardeur qu’elle m’ait pu donner, Le premier à les voir, comme à les condamner. Mais, avec tout cela, quoi que je puisse faire, Je confesse mon faible, elle a l’art de me plaire: J’ai beau voir ses défauts, et j’ai beau l’en blâmer, En dépit qu’on en ait, elle se fait aimer; Sa grâce est la plus forte; et sans doute ma flamme De ces vices du temps pourra purger son âme. Si vous faites cela, vous ne ferez as eu. Vous croyez être donc aim ne croyais l’être.

Mals si son amitié pour vous se fait paraitre, D’où vient que vos rivaux vous causent de l’ennui? Cest qu’un coeur bien atteint veut qu’on soit tout à lui, Et je ne viens ici qu’à dessein de lui dire Tout ce que là-dessus ma passion m’inspire. Proposition de corrigé. Ce corpus composé de trols expositions de théâtre est tout entier ‘œuvre du dramaturge comique le plus fameux de ‘époque classique, Molière. Les pièces sont d’ailleurs trois comédies dites « sérieuses Examinons comment dans ces trois extraits de scènes d’exposition, le dramaturge sy prend pour captiver son lecteur/ spectateur. Dans les textes la technique diffère sensiblement, entre le texte 1 (l’école des femmes) et les deux suivants.

Le premier texte appâte en misant tout sur l’effet d’annonce et donc sur la fonctlon informative d’une exposition, tandis que les deux autres (textes B et C) préfèrent jouer la carte du paradoxe et de la surprise. Dans ces deux cas-là, c’est plutôt sur la fonction incitative de l’exposition que notre dramaturge entend jouer. Le texte A (extrait de l’Ecole des femmes) apprend beaucoup au spectateur-lecteur qui ainsi guidé, aura d’autant plus envie de suivre Molière dans l’intrigue qu’il lui propose. Arnolphe est sans doute le héros de la pièce, bien que le titre n’en fasse pas le personnage éponyme, car il est celui qui a droit, à des vraies tirades face à Chrysalde.

Arnolphe est e PAGF 19 personnage éponyme, car il est celui qui a droit, à des vraies tirades face à Chrysalde. Arnolphe est en outre doté une meilleure expressivité : il relance régulièrement le rythme de ses propos par des disgracieux mais efficaces « et » monosyllabiques en ouverture de vers, et ravive la tension au gré de ses multiples interrogations à Chrysalde. Enfin, Arnolphe peut capter l’attention du lecteur-spectateur intellectuel car c’est dans ses répliques que se concentrent les effets de mise en abyme ou plutôt, de théâtre dans le théâtre (avec notamment le terme de « spectateur »),aptes à faire sourire le lecteur qui saura apprécier les signes de connivence avec le dramaturge.

En revanche, dans les expositions deDom Juan et du Misanthrope, ce qui frappe c’est surtout la capaclté de Molière à nous présenter d’emblée des anti-héros plus que des héros. Ne serait-ce que parce qu’il est intrigué, le lecteur-spectateur de la pièce aura envie d’en savoir davantage et poursuivra son exploration de l’œuvre. Dom Juan en tant que personnage éponyme et sans doute central, suscite l’intérêt car son nom apparaît à la première ligne, dans la bouche de Gusman, personnage pourtant très secondaire. C’est dire combien tout se rapporte à ce mystérieux Dom Juan : ême les personnages sans intérêt le connaissent et parlent de lui !

Le texte dans sa globallté va crescendo pour parler de Dom Juan : après l’échange de répliques Gusman/Sganarelle, place aux tirades, et la plus longue, la tirade final 7 2 l’échange de répliques Gusman/Sganarelle, place aux tirades, et la plus longue, la tirade finale de l’extrait consiste en une description du personnage au présent d’habitude. Le personnage est mis en valeur par des superlatlfs le plus grand scélérat ») et par diverses périphrases, paradoxalement dépréciatives pour ésigner le héros, et qui tiennent carrément de l’insulte (« scélérat pourceau « bête brute s). Curieusement, paradoxalement, cet acharnement apparent de Sganarelle contre son propre maitre ne peut qu’éveiller la curiosité encore plus.

Dans le cas d’Alceste au début du Misanthrope, le paradoxe provient d’un double décalage : décalage avec le titre (l’échange entre Alceste et son ami Philinte n’est ni négatif ni philosophique) et en décalage avec ce que sera le reste de la pièce plus sombre qu’un bavardage sur les inclinations et les aléas du cœur). Ce qui eut alerter et intriguer le spectateur c’est le mélange bizarre, l’impression que sont mal assortis deux champs lexicaux, celui de l’amour plaire « passion flamme») et celui plus grave, de la morale (« condamner « purger blâmer »). Le contraste inattendu en début de pièce peut aussi bien dérouter que susciter l’intérêt des lecteurs qui peuvent apprécier d’être légèrement déstabilisés. Afin de montrer comment trois mises en place au théâtre, trois expositions, pouvaient prendre trois formes à la fois différentes et converger toutes vers un seul but, s’attirer la bienveillance d 9