M Moire De Recherche Par Polina Maslova

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Institut d’Études Politiques de Paris L’affaire Dreyfus : qu’est-ce qu’on en pensait en Russie? par polina Maslova or 11 Sni* to View «La Belle Époque» Imaginaire, nostalgie et construction du temps historique, 19-2 le siècles par Dominique Kalifa Paris, Décembre 2014 Introduction « L’affaire Dreyfus a repris et s’amplifie toujours, mais elle n’est toujours pas réglée»l Anton Pavlovitch Tchekhov Dreyfus, qui à déchiré la France pour plusieurs années à venir, n’est pas une exception. Ainsi donc, dans cette petite mémoire de recherche on a pour but de trouver comment on traitait raffaire Dreyfus en Russie?

Quelle était la réaction des intellectuels? Quel parti les journaux officiels ont-ils pris? pour quelque raison Yattitude de la Russie envers l’affaire Dreyfus n’est preaque pas du tout étudié (peut-être, parce qu’an a parlé de cette affaire plus souvent dans les lettres privées qu’en publique). L’actualité du problème de la perception de l’ffaire Dreyfus ne fait aucun doute: an dit que cette affaire n’a jamais terminé. De plus, en Russie, comme partout dans le monde, on lutte contre l’antisémitisme avec un succès variable jusqu’a nos jours.

Pour répondre à toutes ces questions, dans la première partie e la mémoire on va décrire la place des juifs dans la vie sociale et politique en Russie à cette époque-là, ensuite on va s’arrêter sur les relations franco-russes tout au long de l’affaire Dreyfus et, finalement, on va analyser quelques exemples de la presse russe qui à l’époque parlait beaucoup de l’affaire Dreyfus. Ce sont notamment des journaux russes, où tous les points de vue étaient présentés, qui vont nous servir de sources principales.

On va aussi s’appuyer à l’ouvrage de Ignatii Zakrewski «La Russie et l’affaire de Dreyfus» écrit par le contemporain et qui gagne à être onnu par rapport à notre sujet. l. La Russie à la charnière de deux siècles: les juifs dans vie politique et sociale En 1898, l’année où l’affaire Dreyfus est devenue largement connue en Russie, elle était un empire enorme avec Nicolas PAG » 1 l’affaire Dreyfus est devenue largement connue en Russie, elle était un empire enorme avec Nicolas II à la tête, son dernier tsar.

Nicolas Il, après son couronnement en 1896, devait avoir affaire à l’héritage de son père, Alexandre Ill. Ce qui n’était pas du tout facile, surtout pout in tsar dont le caractère n’était pas assez fort our gouverner un pays. Alexandre Ill, à son tour, avait méné en réaction à l’assassinat de son père, Alexandre Il, une politique de contre-réformes. Les dispositions autoritaires étaient maintenues ou renforcées : les partis politiques et les syndicats étsient interdits, le droit de circulation était limité, la presse était censurée.

Sur le plan économique, l’industrie se développe rapidement grâce, entre autres, aux investissements étrangers et à la construction d’un réseau ferroviaire qui atteint 30 000 km en 1890. Le gouvernement stimulait la migration dans les immenses erritoires de la Sibérie, tandis que parallèlement à l’Alliance franco-russe le financement de l’industrialisation se faisait principalement par les emprunts russes venus surtout de France. Alors, Nicolas Il devient l’empereur de la Russie à l’époque très conservative et il décide de continuer la politique de son père.

Il conserve l’organisation centralisée du pouvoir, qui avait permis de conserver la stabilité gouvernementale et affirmer l’autocrtatie, ce qui causait de nombreuses émeutes. Le problème des minorités nationales et religieuses faisait aussi partie de l’héritage du règne d’Alexandre Ill. Les années 1870-1880 sont marquées par des actions de masse violentes envers les Juifs – des pogroms. Comme l’écrit la « Pet PAGF30F11 marquées par des actions de masse violentes envers les Juifs – des pogroms.

Comme l’écrit la « Petite encyclopédie juive », c’est dans l’Empire russe au xixe siècle qu’il faut chercher l’origine de la dlffuslon de ce mot « pogrom «Du fait même de l’occurrence de nombreux pogroms en Russie, le mot russe pour désigner ces actions est passé dans toutes les langues européenne»l . La vraie terreur contre les Juifs va éclater un peu plus tard, après la Première Revalution en 1905, mais c’est à l’époque d’Alexandre Ill qu’on commence à oppresser les minorités. Quelles sont les origines de ces pogroms cruels avec des milliers de victimes?

On trouve un des motifs possibles dans la déclaration du gouverneur de Nijni Novgorod (1890) : « … dans la population apparait le sentiment de totale impunité quant aux crimes les plus graves, lorsqu’ils sont commis à l’encontre de juifs»2. Or, «les pogroms anti-juifs, alors qu’ils obscurcissent notre époque, sont considérés par le Tsar comme une expression du soutien populaire à son régime»3. En outre, une historienne russe, Dina Amanjalova, écrit dans son ouvrage: «L’idéologie politique délibérée de l’antisémitisme s’est établie au cours des pogroms.

En politique, si on a affaire à un Juif – c’est un révolutionnaire, et vlce versa, si cest à un révolutionnaire – c’est un Juif»4. La situation s’est aggravée après les lois de mai (15 mai 1882) qui ont imposé une politique systématique de discrimination qui bannissait les Juifs de toutes les zones rurales et des villes de moins de dix mille habitants, même dans la Zone de Résidence. Des quotas stricts ont été fixés concernant le nombre de PAGFd0F11 habitants, même dans la Zone de Résidence.

Des quotas stricts ont été fixés concernant le nombre de Juifs autorisés dans l’enseignement secondaire et supérieur et pour de nombreuses professions. Pendant les dernières années du règne de Nicolas Il, l’antiséminisme est devenu l’idéologie nationale. Des organisations d’extrême-droite comme les Cent-Noirs, formées par l’État, commettaient des massacres jusqu’à 1917. Finalement, 1 1 1’affaire Beilis qui ressemble beaucoup à celle de Dreyfus en 19 a eu lieu qui a poussé des mouvements antisémites.

Ainsi, à la charnière de deux siècles la place des juis dans l’Empire russe était même pire que celle dans la Troisième République. Ce qui n’a pas du tout empêché les cercles dirigeants russes de critiquer l’État français et sa participation dans l’affaire Dreyfus. On va s’arrêter sur ce paradoxe dans la partie suivante. Il. L’affaire Dreyfus et la Russie «Quel écoeurement pour notre Russie, amie du peuple français, d’assister à ce abominable spectacle! » Bigewia Wiodemosti Nicolas Il a pris le pouvoir au moment où la France était le pays européen le plus proche de la Russie.

Ses visites à Paris ont affermi des relations amicales établies par les documents officiels. En même temps, il faut dire que pour les intellectuels russes la France a toujours été le pays sur lequel il fallait prendre l’exemple. Cette tendance se manifestait pendant des siècles pas la langue utilisée, par la mode, par les coutumes du monde qu’on empruntait avec plaisir. Alors, il n’est pas étonnant que les russes se sentent déçus par l’affaire Dreyfus qui a détruit l’image de leur Belle France et sa Belle s 1 déçus par l’affaire Dreyfus qui a détruit l’image de leur Belle

France et sa Belle Époque. « Les nations inférieures, où l’instruction et la culture étaient moins avancées qu’en France, et qui avaient coutume de chercher chez elle leurs inspirations, ne reconnaissent plaus la patrie de Voltairem de Hugo, de Zola»l. Les idéals de la Révolution Française ont été trahis parce que l’affaire avait montré que la haine sans aucune raison était possible même dans une société progressiste. On se donnera la liberté de dire que ce désenchantement accompagné par la réaction politique a contribué à la diffusion des idées révolutionnaires en Russie.

Mals, bien sûr, la désillusion n’était pas la seule réaction des russes à ce scandale. Comme tout pays européen, la Russie observait avec curiosité ce spectacle mondial et même y participait. On peut dire sans doute que la majorité pléthorique des intellectuels russes a pris le parti de Dreyfus et de Zola. Mais il y avait des anti-dreyfusard aussi: normalement parmi les autorités. Bien sûr, cette affaire n’a pas divisé la Russie aussi profondement que la France, mais cette question qu’on préférait discuter en famille a fait détruire des relations autrefois très fortes.

Par exemple, c’est le cas d’Anton Tchekhov, un grand écrivain, dramaturge, philanthrope, et Alexeï Souvorine, éditeur et journaliste proche des cercles dirigeants. Tcheckov, qui à l’époque habitait Nice, se passionait pour l’affaire Dreyfus qu’il suivait dans les journaux français et admirait l’attitude de Zola. Il juge « ignoble » la conduite de Temps nouveau, le journal de Souvorine, qui a pris une attitude anti-dreyfusarde. 6 1 conduite de Temps nouveau, le journal de Souvorine, qui a pris une attitude anti-dreyfusarde. Mais le désaccord entre deux amis était plus profond que celui enre un dreyfusard et un anti- reyfusard. our Souvorine, c’est toujours l’État qui compte, parce que si c’est bon pour l’État, c’est bon pour l’individu. Tchekhov ne peut pas accepter cette approche. Même si Zola avait fort, Tchekhov prendrait son parti de toute façcon, parce que Zola est aussi ecrivain. D’après Tchekhov, c’est le devoir de tout écrivain de défendre ceux qu’on accuse. Comme ça arrive souvent aux russes, une question assez simple a provoqué une discussion sur les choses fondamentales. «Je ne veux plus lui écrire de lettres ni recevoir les siennes» , – ces paroles de Tchekhov ont mis le point inal à famtié qul avait duré pendant plusieurs années.

Néanmoins, les anti-dreyfusards en Russie étaient plutôt l’exception que la règle. C’est ici que le paradoxe se trouve: dans la plupart des journaux (y compris les officiels) on voit des articles passionnés à la défense de Dreyfus, des droits de l’homme tandis que des pogroms antisémites se passent tous le jours. Peut-être, les auteurs avaient raison accusant la France d’avoir trahis les idéals révolutionnaires parce que si en Russie l’égalité restait une cible des révolutionnaires, en France c’était déjà une réalité.

Les journaux russes publiaient regulièrement des reportages de la salle du tribunal. A mesure que le procès se déroulait, le découragement augmentait. Voici un extrait très curieux des Rousskia Wiedomosti (les Annales russes, de Moscou): «La populace de Paris n’a jamais eu encore une si bonne oc PAGF70F11 Wiedomosti (les Annales russes, de Moscou): «La populace de Paris n’a jamais eu encore une si bonne occasion pour manifester contre la liberté, contre l’égalité, contre la fraternité. ourtant, tous les édifices publics, là-bas, portent gravé sur leurs frontispices les mots : Liberté, Égalité, Fraternité»l. Des pensees pareilles exprimées sur les pages des journaux respectables lus partout en Europe, evidement, posaient de nombreux problèmes à PÉtat français. Pourquoi c’est la presse russe qui était la menace la plus grande et pas celle de n’importe quel d’autres pays? Exactement à cause des relations proches établies entre les deux pays. Comparons deux situations.

Quand on montre au gouvernement français des extraits de journaux belges, hollandals, danois, suédois, anglais, condamnant l’attitude du gouvernement dans l’affaire Dreyfus-Esterhazy, ils peuvent toujours répondre : «La reuve que Dreyfus et consorts sont des traitres et des vendues, c’est que tous les ennemis de la France les soutiennent»l. Mais que diront-ils si la Russie, la grande alliée, élève à sont tour la voix pour critiquer? Le journal Syne Otetchestwa (loyal au tsar) se demande, par exemple, pourquoi l’État français fait intervenir la police et l’armée dans une simple affaire judiciaire.

N’ayant pas trouvé une bonne explication, le journal accuse le gouvernement français «d’avoir fermé hypocritement les yeux» et «d’avoir laissé un noble pays se transformer en un foyer d’antisémitisme et de léricalisme»2. Mais il ne faut pas oublier qu’à ce moment-là la Russie elle-même survivait une période où l’antisémitisme était presque une idéologie officiell B1 elle-même survivait une période où l’antisémitisme était presque une idéologie officielle pendant que les pogroms faisaient partie de la vie quotidienne.

La revue de presse russe au cours de l’affaire Dreyfus serait incomplète sans parler de l’article «J’accuse… rédigé par Émile Zola et publié dans le journal «l’Aurore» et sa perseption dans la société russe. On a déjà dit qu’Anton Tchekhov était parmi es premiers intellestuels russes qui a appercié cette lettre de Zola. C’était plutôt la personalité de Zola qui l’attirait, parce que Tchekhov avait l’habitude de faire confiance aux bons écrivains. De plus, par rapport à Souvorine qui avait l’accès à la plupart des papiers du gouvernement, Tchekhov n’avait presque pas du tout de sources qu’il pouvait croire.

Alors, l’article de Zola est devenu pour lui une sorte d’un compas dans la mer de rumeurs et complots. Ensuite, c’était le compte Léon Tolstoï qui lui-même s’est adressé plusieurs fois à l’État russe sous la forme d’une lettre ouverte. Au reporter du Courrier de Moscou, le compte à dit «qu’il n’admirait pas beacoup le talent littéraire de Zola», mais qu’il était profondement convaincu du son désintéressement: «en écrivant sa lettre, il fit tout ce qu’il pouvait et devait faire»3. Il y avait également des journaux pro-tsariste qui se rangeaient entièrement du côté de Zola, comme, par exemple, «le Fils de la Patrie».

Il y avait aussi des particuliers qui exprimaient leurs solidarité avec Zola personellement (souvent ils avaient des postes haut placés). Comme on peut vair dans les archiives, Zola lui-même recevait de Russie de nombreux témoignages de sympathie et d’ad dans les archiives, Zola lui-même recevait de Russie de nombreux témoignages de sympathie et d’admiration. Entre autre, il y a une lettre du savant Jacques Novikovv qui commence comme ça: «Les vérltables ams de la France en Russie sont profondément affligésl Mais il ne faut pas exagérer et surestimer le soutien de Zola en Russie.

Il devait être au courant de sa popularité parmi les intellectuels russes mais il est douteux qu’il s’en soit servi parce qu’il avait une campagne bien réfléchie et organisée en France. Finalement, on peut dire que bien qu’à l’époque les russes soient préoccupés de ses propres problèmes (et, comme d’habitude, on en avait assez), ils étaient quand même passionés par l’affaire qui avait bouleversé toute l’Europe.

Conclusion pour conclure, il faut dire que l’attitude de la Russie envers l’affaire Dreyfus était assez contradictoire. D’un côté, on a des discours divers dans la presse et en publique remarquables par leur démocratisme et leur liberté de l’esprit. De l’autre côté, toutes ces belles phrases ne restaient que de belles phrases andis qu’en réalité des choses même pires que l’affaire Dreyfus se passaient inpunément.

La mort d’un seul homme est une tragédie, celle des millions — une statistique. L’affaire Dreyfus, cette tache sur la robe blanche de la Belle Époque, aurait pu apprendre aux russes leçon, mais elle ne l’a pas fait. Peut-être, en France on a tiré des conclusion de ce scandale le plus connu du XIXe siècle, mais ce n’est pas le cas de la Russie. Sinon, l’affaire Beilis ne se serait jamais produite en 191 1, sans parler de l’. poque stalinienne, où « les affaires Dreyfus sont devenue 11