L’enseignement en France depuis
Bibliographie : Antoine Prost, Education, société et politique. Une histoire de l’enseignement en France de 1945 à nos jours. Seuil (1997) Antoine Prost, Du changement dans l’Ecole, les réformes de l’éducation de 1936 à nos jours. seuil (2013) Antoine Prost, Histoire de l’enseignement et de l’éducation, tome IV : l’Ecole et la Famille dans une société de mutations, depuis 1930. (2004) André D. Robert, L’Etole en France de 1945 à nos jours. (2010) L’enseignement est, depuis la IIIème République, la principale instance d’éducation des enfants.
L’école républicaine se donne our ambition de fournir aux élèves une instruction suffisamment conséquente pour leur permettre de développer leur esprit critique et pour forger des individus autonomes capables de penser par eux-mêmes. Elle se présente comme l’école du peuple, destinée à tous, et cherche à préparer les élèves à la vie active, dans la mesure où elle n’est obligatoire que jusqu’à 13 ans, et que par conséquent, beaucou d’élèves ne poursuivent pas leurs études. En revanche, l’école de tout le peuple. out le peuple. Censeignement repose sur la juxtaposition de trois ystèmes d’éducation étrangers, dont les deux principaux sont le primaire et le secondaire. Ces deux ordres recrutent des élèves sociologiquement différents, et fondent leur éducation sur une préparation à la vie active pour le premier, et sur la prédominance des humanités classiques pour le deuxième. D’autre part, l’école de républicaine est lai@ue ; elle se distingue ainsi radicalement des écoles libres, dont l’enseignement est totalement indépendant.
Dès 1936, le Front Populaire au pouvoir, Jean Zay à sa tête, propose une unification du primaire et du secondaire. S’il a pour ambition l’école unique et la démocratisation de l’enseignement, ce n’est réellement qu’à partir de 1959 que l’enseignement se démocratise réellement, grâce au régime lui- même puisque les réformes proposées par les gouvernements ne sont plus contrôlées par le Parlement. Dès 1959, l’école républicaine est donc en marche, et accueille de plus en plus d’élèves.
L’enseignement supérieur se démocratise également et devient un enseignement de masse. Il est valorisé à la fois par les parents, qui y voient un moyen de promotion sociale pour leurs enfants. Les gouvernements gaullistes lancent par ailleurs des politiques volontaristes afin de recruter les meilleurs élèves dans les universités dans le but de forger plus d’ingénieurs et de scientifiques ; il en va de l’intérêt de la nation.
En résulte l’instauration d’une sélection à l’entrée des universités. Ainsi, par cette trop forte affluence d’élèves dans le supérieur, c’est tout le principe de base de récole de la IIIème République qui se trouve bouleversé : l’école primaire ne prépare plus à toute la vie, mais aux étu République qui se trouve bouleversé : l’école primaire ne prépare lus à toute la vie, mais aux études supérieures.
D’autre part, si la démocratisation de l’enseignement permet, tout au long du XXème siècle, à une plus forte proportion d’élèves de faire des études, les inégalités socioprofessionnelles d’origine des élèves déterminent souvent leur parcours d’études. En quoi l’enseignement, par sa forte démocratisation et sa valorisation dans les représentations des Français, a-t-il changé radicalement d’ambition à partir de 1936 ? L’enseignement, à partir de 1936, entend encourager se démocratiser et encourager les élèves à poursuivre leurs études.
En outre, c’est dès 1959, avec les premières années de la Vème République, que la démocratisation prend une réelle ampleur dans le but de produire des élites dans l’enseignement supérieur. Toutefois, subsistent des inégalités, et ainsi, à partir de 1981, la gauche au pouvoir entend décentraliser l’enseignement et le démocratiser non plus uniquement pour former des élites, mais pour élever globalement le niveau de tous les élèves. . 1936 – 1959 : Rupture avec la distinction entre primaire et secondaire A.
La situation de l’enseignement en 1 936 1. L’organisation de la scolarité depuis Ferry L’enseignement scolaire, depuis le début de la Ille République, repose sur la juxtaposition de trois systèmes d’instruction indépendants, de trois « ordres » en quelque sorte : le primaire, le secondaire, ainsi que l’enseignement technique, qui est minoritairement représenté. L’ordre primaire est le projet d’instruction des républicains positivistes, il s’agit de l’éc rrv. Ecole gratuite, laïque 4 39 de l’école de Jules Ferry.
Ecole gratuite, laïque et obligatoire, elle se réclame comme 1’« école du peuple se structure autour de l’obligation scolaire, de 6 à 13 ans. A la fin de cette nstruction, les meilleurs élèves peuvent continuer leurs études dans l’enseignement primaire supérieur, et les autres peuvent préparer le certificat d’études primaires. L’enseignement primaire supérieur, qui dure en principe 4 ans, est dispensé soit dans les écoles primaires supérieures (EPS), établissements autonomes, soit dans les cours complémentaires (CC), se déroulant dans les écoles communales elles-mêmes.
L’un des principaux débouchés du primaire supérieur est le concours d’entrée à l’école normale primaire, qui forme les instituteurs, mais elle débouche de manière générale sur la vie active. L’ordre primaire est ainsi parfaitement autonome, c’est sur ses propres bancs qu’il recrute ses enseignants. Pourtant, l’école de Ferry n’est pas l’école de tout le peuple. Il existe en effet Fordre secondaire qui, composé des lycées et des collèges communaux, forme les élèves à une instruction parallèle dans des classes de la Ile à la philosophique.
Cette administration, payante et conservatrice, repose sur la prépondérance des humanités (l’enseignement du latin et du grec), et se solde par le passage du baccalauréat qui ouvre ensuite les portes aux études supérieures, notamment aux classes préparatoires. Cest ainsi du fait de sa conception élitiste de l’instruction et de la sociologie de ses élèves, issus de milieux supérieurs, que le secondaire tient son prestige.
Jautre part, le secondaire se distingue aussi par son corps enseignant : là où des instituteurs enseignent dans le primaire, ce sont des professeurs s OF corps enseignant : là où des instituteurs enseignent dans le primaire, ce sont des professeurs spécialisés qui se chargent de l’instruction des élèves du secondaire. ‘ambition de récole républicaine est tout d’abord émancipatrice : il s’agit d’inculquer aux enfants les valeurs républicaines et aïques, de doter aux individus la capacité de penser par eux- mêmes, de se déterminer de manière autonome.
L’enseignement affiche ainsi la volonté de ne pas modifier la position sociale de ses élèves. L’instruction n’a pas pour but de remédier aux inégalités sociales, mais d’enseigner aux enfants, jusqu’à 13 ans, le strict minimum de ce qui leur sera utile durant toute leur vie. ‘école entend enseigner aux enfants ce qui n’est pas permis d’ignorer, elle leur offre les armes pour toute une vie. L’école républicaine entend conserver les inégalités sociales, qui sont, elon elle, dans l’ordre naturel des choses. 2.
Dualisme école libre et école républicaine L’école libre doit son existence au refus par les catholiques du caractère laïque de l’école publique ; elle répond ainsi, au XIXe siècle, à une exigence religieuse. En effet, l’Eglise revendique un droit « suréminent » sur renseignement. Le catholicisme considère que l’Eglise a reçu la mission de l’enseigner à toutes les nations. Les catholiques craignent que les écoles lai@ues ne fassent « perdre la foi » à leurs enfants, et c’est la raison pour laquelle ils envoient leurs enfants dans des écoles libres.
C’est sur cet argument aussi que se basent les Républicains pour donner à l’école son caractère laic : puisque c’est pendant l’enfance et l’adolescence que se construisent les individus, il s’agit de leur inculquer des valeurs laïques qui leur permettr 6 9 se construisent les individus, il s’agit de leur Inculquer des valeurs laïques qui leur permettront de ne pas rester sous la domination religieuse. La distinction entre écoles libres et publiques remonte à la loi Guizot de 1833.
Elle ne se fait que par la nature du financement, et n’a rien à voir avec le caractère religieux ou non des tablissements. Les écoles publiques sont entretenues par l’Etat et les collectivités territoriales, et les écoles privées tirent leur financement de subventions privées. Pourtant, avec les lois de 1886, qui laïcisent tout le personnel enseignant de l’école primaire publique, et la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat de 1905 qui empêche toute institution religieuse d’être subventionnée par l’Etat, la distinction entre écoles libres et écoles publiques prend un caractère religieux.
Les congréganistes, exclus de l’enseignement public, vont fonder leurs propres écoles libres, onc payantes, puisque non subventionnées par l’Etat, et refusant eux-mêmes ses aides : « Quand on veut être libre, il faut savoir être pauvre déclare l’abbé Lemire en 1921 en refusant l’octroi de bourses aux pupilles de la nation dans les écoles libres. ‘enseignement libre propose, de fait, une éducation parallèle à celle des écoles publiques ou des collèges et des lycées.
Bien qu’elle accueille gratuitement les familles les plus modestes, elle reste payante et, plus proche de l’enseignement secondaire que du primaire, elle garde un certain prestige. En résulte une hostilité son égard de la part des collèges et des lycées dans les années 1930, qui considèrent qu’il s’agit là d’une concurrence déloyale 3. Les conditions de travail des élèves : la classe préparatoire à 6 L’instruc déloyale. Cinstruction des enfants se base sur une éducation très stricte et très impersonnelle, liée à la nature même de l’école républicaine.
La poursuite d’études dans l’enseignement primaire supérieur étant assez rare, l’école se donne en effet pour objectif d’instruire les enfants et de leur apprendre tout ce dont ils auront besoin dans la vie active. L’instituteur part ainsi du principe que tout ce que les enfants n’auront pas appris avec lui, ils ne l’apprendront jamais. Les programmes sont alors très chargés aux disciplines de bases s’ajoutent des sciences, de l’histoire, et de la géographie, qui, poussés très loin, sont sanctionnés au certificat d’études. Les cours sont ainsi magistraux, complets, et difficiles à assimiler pour des enfants.
Les programmes sont considérablement chargés, et les enfants enchaînent souvent des semaines de 30 heures de cours jusqu’en 1969. Alors que l’éducation physique, normalement obligatoire, permettrait ux écoliers de se détendre, nombreux sont les instituteurs qui s’estiment trop vieux, pas en assez bonne forme, ou que les infrastructures sont insuffisantes, et passent ainsi à côté de cette discipline. Condamnés au silence et à l’immobilité, les écoliers, pour beaucoup, suivent peu à l’école. D’autre part, le mode de fonctionnement de l’école est sévère envers les élèves.
Notés sur dix ou sur vingt et classés dans les écoles, les élèves ont, en plus de leurs heures de cours, des devoirs à faire chez eux, pour lesquels ils passent plus d’une heure de travail par jour ; ainsi, eurs journées de travail durent presque 8 heures, et ce à l’âge de IO ou 11 ans ! Quant aux punitions, r journées de travail durent presque 8 heures, et ce à l’âge de 10 ou 11 ans ! Quant aux punitions, rarement corporelles, elles sont pourtant fastidieuses : il s’agit la plupart du temps de recopier 20 ou 50 fois la conjugaison d’un verbe ou d’une table de multiplication.
Lors des inspections à l’école, le seul critère permettant de juger de la capacité d’enseigner d’un professeur est la tenue des cahiers : ainsi, un rapport d’inspection contenant la mention « les ahiers sont bien tenus » signifie que l’instituteur fait son travail, à savoir faire en sorte que les élèves tiennent bien leur cahier. L’échec scolaire, à partir de là, n’est lié qu’au mauvais travail des élèves, et est particulièrement fréquent : en 1956, 22,3% des élèves du cours moyen 2e année redoublent leur classe, soit près d’un sur quatre.
Le cas normal est donc de redoubler. B. 1936 – 1939 : Le Front Populaire au pouvoir L’enseignement est loin d’être au cœur de la politique du Front Populaire, mais la nomination au ministère de l’Education Nationale de Jean Zay, un jeune radical, aux nombreuses mbitions, permet de réformer l’enseignement. 1. Une première tentative de démocratisation de l’enseignement Jean Zay, républicain de conviction, part san de l’égalité des chances, considère que l’école primaire est l’école du peuple, qu’elle doit accueillir le plus gros de la nation et les préparer à la vie active.
Il a pour ambition de réunir le primaire et le secondaire, d’élaborer des passerelles entre ces deux ordres étrangers, et de permettre à des enfants du peuple de poursuivre leurs études dans des filières nobles. Son projet de loi déposé en 1937 prévoit ‘unification totale de l’école élémentaire avec la disparition loi déposé en 1937 prévoit runification totale de récole élémentaire avec la disparition des petites classes de collèges et de lycées, ainsi que l’obligation de passer le certificat d’études, dont l’âge minimal est abaissé à 11 ans.
Toutefois, si ce projet d’école unique semble démocratique dans la mesure où il efface la distinction entre primaire et secondaire, il est trop longtemps discuté et entraîne une forte opposition de la part des professeurs du secondaire qui craignent de perdre leur prestige et la prépondérance des humanités. Le Sénat, fort conservateur, n’accepte pas les projets de Jean Zay. Jean Zay réussit pourtant à faire voter la loi du 9 août 1936 qu prolonge l’enseignement obligatoire dans les écoles publiques jusqu’à 14 ans en instaurant une classe de fin d’études.
Alors que dans les années 1930, seulement la moitié des élèves réussissaient le certificat d’études selon l’histoire Antoine Prost, cette classe vise à relever l’éducation populaire. Elle est conçue comme préparant à la vie et non au certificat d’études. Toutefois, le succès de ces classes est fragile dans la mesure où elles ont trop proches de l’enseignement élémentaire.