Edgar Morin La Voie 9p 1

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LA VOIE à la fois concurrents et antagonistes, d’une part un processus d’homogénéisation et de standardisation selon les modèles nordaméricains, d’autre part un contre processus de résistances et de refloraisons de cultures autochtones, et, en même temps, un processus de métissages culturels. Edgar Morin Enfin la globalisation a produit comme l’infra-texture d’une société-monde.

Une de permanentes et arrivé à la planète ; el né la cas de féconomie m or 40 Itoire comportant unications, ce qui est • . ±pr conomie, ce qul est nque le contrôle de l’économie ; il lui manque les autorit s gitimes dotées e pouvoirs de décision ; il lui manque la conscience d’une communauté de destin, indispensable pour que cette société devienne Terre Patrie.

Aussi ce ne sont pas seulement les souverainetés absolues des Etats-Nations, c’est aussi le mouvement technoéconomique de la globalisation qui, parce qu’incontrôlé, empêche la formation d’une société monde. 2010 «Tout se passe comme si nous savions que quelque chose d’énorme va soit se produire, soit échouer lamentablement. » Mahaswata Devi « Il ne s’agit pas de trouver des « solutions » pour certains « bourgeoise industrielle. Cela ne signifie pas un retour au passé, mais un détour par le passé, vers un avenir nouveau… ? La crise planétaire a) La crise de l’unification L’unification techno-économique du globe coïncide dès 1990 avec des dislocations d’empires et de nations aggravant la balkanisation de la planète: dislocation de l’Union soviétique, de la Yougoslavie, de la Tchécoslovaquie, pulsions multiples d’ethnies vers des micros nations (Ossétie du Sud, Abkhazie en dernier lieu), tout cela dans le déchainement des identités nationales, ethniques, religieuses. D’où l’accroissement d’un chaos en même temp que celui des interdépendances.

La coïncidence n’est pas fortuite. Elle s’explique : Michaël Lowy Première partie La difficulté de penser le présent a) par les résistances nationales, ethniques, culturelles ? l’homogénéisation civilisationnelle et à l’occidentalisation, b) par l’effondrement d’un Progrès conçu comme Loi du devenir humain3 et Paccroissement des incertitudes et menaces du lendemain. Ainsi dans la perte du futur, jointe à la précarité et aux angoisses du présent, s’opèrent les reflux vers le passé c’est ? dire les racines culturelles, ethniques, religieuses, nationales.

La conscience est toujours en retard par rapport à l’immédiat : « no sabemos Io que pasa y eso es Io ue pasa » Ortega y Gasset PAGF OF sociaux, démographiques, politiques, idéologiques, religieux, etc). En même temps, et en dépit de l’hégémonie techno- économcomilitaire des Etats-Unis se développe un monde multipolaire dominé par de grands blocs aux intérêts à la fois coopératifs et conflictuels, où les crises multiples augmentent à la fois les nécessités de coopération et les risques de conflit.

Il y a nos carences cognitives. Les cécités d’une connaissance qui, compartimentant les avoirs, désintègre les problèmes fondamentaux et globaux qui nécessitent une connalssance transdisciplinaire. Ainsi la globalisation, à la fois une et Plurielle, subit sa propre 4 crise de globalité, qui à la fois unit et désunit, unifie et sépare L’occidentalo-centrisme qui nous situe sur le trône de la rationalité et nous donne l’illusion d’être dans l’universel. b) les poly-crises La globalisation ne fait pas qu’entretenir sa propre crise.

Son dynamisme provoque de multiples crises à l’échelle planétaire, Ainsi ce n’est pas seulement notre ignorance, c’est aussi notre connaissance qui nous aveugle. ?? crise de l’économie mondiale, dépourvue de véritables dis5 positifs de régulation De la mondialisation à la globalisation • c rise écologique, issue de la dégradation croissante de la biosphère, qui elle-même va susciter de nouvelles crises économiques sociales et immédiates sur tout le globe (fax, téléphone portable, Internet). Cette globalisation opère une unification techno-économique occidentalisante sur la planète en croissance rapide. ?? crise des sociétés traditionnelles, désintégrées par l’occidentalisation ininterrompue • crise de la civilisation occidentale, où les effets négatifs de ‘individualisme et des compartimentations détruisent les anciennes solidarités, où un mal-être psychique et moral s’installe au sein du bien être matériel, où se développent les intoxications consuméristes des classes moyennes, où se dégrade la sous-consommation des classes démunies, où s’aggravent les inégalités La globalisation a comporté, suite à l’effondrement de l’URSS et la déconfiture du maoïsme, une vague démocratisante en diverses parties de la planète, une valorisation des droits de l’homme et des droits de la femme, dont les effets sont demeurés incertains et limités. Elle a comporté également trois processus culturels • c rises démographiques produites par les surpopulations des pays pauvres, les baisses de population des pays riches, le développement des flux migratoires de misère et leur blocage en Europe tion hyper spécialisée remplace les anciennes ignorances par le nouvel aveuglement. • crise des villes devenues megapoles asphyxiées et asphyxiantes, polluées et polluantes, où les habitants sont soumis ? d’innombrables stress, où ettos pauvres se statistiques qui prétendent tout mesurer) . Autrement dit, il ne fonctionne qu’avec le quantifiable.

Il gnore non seulement es activités non monétarisées comme les productions domestiques et/ou de subsistance, les services mutuels, l’usage de biens communs, la part gratuite de l’existence, mais aussi et surtout ce qui ne peut être calculé : la joie, l’amour, la souffrance, l’honneur c’est-à-dire le tissu même de nos vies. • crise des campagnes devenant déserts de monocultures industrialisées, livrées aux pesticides, privés de vie animale, et camps de concentration pour ‘élevage industrialisée producteurs de nourritures détériorées par hormones et antibiotiques • c rise de la politique encore incapable d’affronter la nouveauté ‘ampleur des problèmes Le développement est une formule standard qui ignore les contextes humains et culturels.

Il s’applique de façon indifférenciée à des sociétés et cultures très diverses, sans tenir compte de leurs singularités, de leurs savoirs, savoir-faire, arts de vivre, présents aussi chez les peuples que l’on réduit à leur analphabétisme, et dont on ignore par la même les richesses de leurs cultures orales traditionnelles. Il constitue un véritable ethnocide pour les petits peuples indigènes sans Etats. • c rise des religions écartelées entre modernisme et intégrlsme, ncapables d’assumer leurs principes de fraternité universelle • c rise des laïcités de plus en plus privées de sève et corrodees par les recrudescences religieuses • c rise de l’humanisme universaliste qui d’une part se désintègre au profit des identités nati uses, et d’autre PAGF s OF respectant le lien indissoluble entre l’unité et la diversité humaines.

Le développement, promu comme vérité universelle pour la planète, est en réalité pseudo-universaliste, puisqu’il donne le modèle occidental comme modèle universel. C’est un produit du sociocentrisme occidental et c’est aussi un moteur ‘occidentalisation forcené. Il suppose que les sociétés occidentales sont la finalité de l’histoire humaine. c) La crise du développement L’ensemble de ces multples crises interdépendantes et interférentes est provoqué par le développement, qui est encore considéré comme la voie de salut pour l’humanité. Or le développement-solution ignore que les sociétés occidentales sont en crise du fait même de leur développement. Celui-ci a produit un sous- développement intellectuel, psychique et moral.

Intellectuel parce que la formation disciplinaire que nous recevons, en nous apprenant à séparer les choses, nous a fait erdre l’aptitude à relier, et du coup l’aptitude à penser les problèmes fondamentaux et globaux. Psychique parce que nous sommes dominés par la logique purement économique et quantitative, qui ne voit comme perspective politique que la croissance et le développement, et que nous sommes poussés à tout considérer en termes quantitatifs et matériels. Moral parce que partout l’egocentrisme prime la solidarité. Il faut dire aussi que l’hyper- spécialisation, Vhyper- individualisme, la perte de solidarité, tout cecl conduit à un mal-être, y compris au sein du bien-être matériel.

Et ainsi nous vivons dans une société où les solutions que nous voulons apporter aux autr ues nos problèmes. PAGF planète des zones de prospérité selon le modèle occidental et il a déterminé la formation de classes moyennes accédant aux standards de vie de la civillsation occidentale. Il a certes permis des autonomies individuelles délivrées de l’autorité inconditionnelle de la famille, l’accession aux mariages choisis et non plus imposés, l’apparition des libertés sexuelles, des loisirs nouveaux, la consommation de produits inconnus, la découverte d’un mande étranger magique, y ompris sous l’aspect du Macdonald et du Coca-cola, et il a suscité de grandes aspirations démocratiques.

Il a apporté aussi, au sein des nouvelles classes moyennes, les intoxications consuméristes propres aux classes moyennes occidentales, l’accroissement de la composante imaglnaire des désirs ainsi que l’insatiabilité de besoins toujours nouveaux. Il a apporté aussi les côtés sombres de l’individualisme, c’està-dire l’égocentrisme, la soif du profit, et l’autojustification (qui suscite l’incompréhension d’autrui). Le développement a créé de nouvelles corruptions dans les Etats, les administrations, les relations économiques. Il a détruit les solidarités traditionnelles, exacerbé les égoiÉmes sans récréer de nouvelles solidarités et de nouvelles communautés. D’où la multiplication des solitudes individuelles.

Aussi, l’occident ressent en lui un vide et un manque, puisque de plus en plus nos esprits désemparés font appel aux psychanalyses et psychothérapies, au yoga, au bouddhisme Zen, aux marabouts ; on essaie de trouver dans les cultures et les sagesses d’autres continents, des remèdes à notre vide créé par le caractère quantitatif et compétitif de nos vies. La conscience de la crise du développement n’est arrlvée que de açon partielle, insuffisante, limitée à la problématique 7 OF développement n’est arrivée que de écologique, ce qui a conduit à attendrir la notion de développement en lui accolant l’épithète « durable b. Mais l’os demeure. De plus, le développement a créé d’énormes zones de misère, ce dont témoignent les ceintures démesurées de bidonvilles qui auréolent les mégapoles d’Asie, d’Afrique, d’Amérique latine.

Comme l’a dit Majid Rahnema, la misère y chasse la pauvreté des petits paysans ou artisans qui jouissaient d’une relative autonomie en disposant de leurs polycultures ou de leurs outils de ravail. Je ne sais qui a dit « le développement est un voyage qui comprend plus de naufragés que de passagers Enfin, si l’on considère que le développement, l’occidentalisation et la globalisation sont les moteurs l’un de l’autre, alors toutes les crises que nous avons énumérées peuvent être considerées aussi comme les composantes d’une mega-crise à trois visages inséparables : crise du développement, crise de l’occidentalisation, crlse de la mondialisation.

Le moteur du développement est techno-économique. Il est censé entraîner les wagons du bien-être, de l’harmonie sociale, de la démocratie. De fait, il est compatible avec les dictatures pour qui le développement économique comporte resclavagisation des travailleurs et la répression policière comme ce fut le cas au Chili et au Brésil et comme le montre l’hyper développement de la Chine actuelle.. Crise cognitive / crise politique / sociale d) la crise de l’humanité La globalisation, l’occident veloppement sont donc E OF interdépendantes et enchevêtrées, et qui elles-mêmes produisant la crise de la globalisation, celle de l’occidentalisation, celle du développement.

Mais comme ce caractère complexe même de la crise planétaire est généralement ignoré, cela Indique ue la multi crise est aussi cognitive.. La gigantesque crise planétaire n’est autre que la crise de rhumanité qui n’arrive pas ? accéder à l’humanité. D’autre part, le développement instaure un mode d’organisation de la société et des esprits où la spécialisation compartimente les individus les uns par rapport aux autres et ne donne à chacun qu’une part close de responsabilité. Et, dans cette fermeture, on perd de vue l’ensemble, le global, et la solidarité. De plus, l’éduca2 Vers l’abîme ? probable catastrophe. Elle porte en elle l’improbable donc possible espérance.

Le développement du développement développe la crise u développement et conduit l’humanlté vers de probables catastrophes en chaînes. Tous les processus actuels portent en eux des ambivalences. Toute crise, et la crise planétaire de façon paroxystique, porte en elle risque et chance. La chance est dans le risque. La chance s’accroit avec le risque. « Là où croit le péril croit aussi ce qui sauve » (Holderlin). Le vaisseau spatial terre est propulsé par quatre moteurs incontrôlés : la science, la technique, l’économie, le profit. Leurs effets sont ambivalents. La science a roduit non seulement des élucidations et suscité des énéfiques, mais a produit