commentaire arrêt mme Duvignère

essay B

‘arrêt de principe, rendu par la Section du contentieux du Conseil d’Etat le 18 décembre 2002 est relatif aux conditions de recevabilité du recours pour excès de pouvoir à l’encontre d’une circulaire. En l’espèce, une femme s’était vue opposer un refus à sa demande d’aide juridictionnelle du fait de ressources, APL comprise, trop élevées. Le Décret numéro 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la Loi numéro 91467 du 10 juillet 1991 excluait en effet l’APL des prestations familiales dont le montant devait être déduit des ressources du demandeur, lors même que l’allocation de logement familial y était incluse.

Dès lors, la requérante demande au Conseil d’État l’annulation de to vien « ext la décision du Garde demande tendant ? 19 décembre 1991 du IO juillet 1991 et ces deux textes n’exr_ Swap page 2001, rejetant sa méro 91-1266 du oi numéro 91-467 r s 1997 « en tant que alisée au logement des ressources à prendre en compte pour l’appréciation du droit des interessés au bénéfice de l’aide juridictionnelle Deux questions se posent mais nous nous intéresserons particulièrement à la seconde : la différence de traitement ontenue dans l’article 2 du décret du 19 décembre 1991, méconnait-elle le principe d’égalité ?

Le recours pour excès de pouvoir contre la circulaire du 26 mars 1 997 est-il recevable ?

Selon le Conseil d’Etat, l’ampleur de la différence de traitement (exclusion totale de l’allocation de logement familiale des ressources à prendre en considération et, inversement, inclusion dans ces dernières de l’ l’intégralité du montant de l’aide personnalisée au logement) est jugée « manifestement disproportionnée par rapport aux différences de situation séparant les demandeurs d’aide uridictionnelle suivant qu’ils sont titulaires de l’une ou l’autre de ces prestations » ; le refus d’abroger, sur ce point, le décret du 19 décembre 1991 est donc illégal et annulé.

Le Conseil d’Etat détermine, ensuite, les conditions auxquelles le recours pour excès de pouvoir formé à l’encontre des dispositions impératives des circulaires « doit être accueilli », c’est-à-dire jugé bien fondé : « Considérant que l’interprétation que par voie, notamment, de circulaires ou d’instructions l’autorité administrative donne des lois et règlements qu’elle a our mission de mettre en œuvre n’est pas susceptible d’être déférée au juge de l’excès de pouvoir lorsque, étant dénuée de caractère impératif, elle ne saurait, quel qu’en soit le bien- fondé, faire grief ; qu’en revanche, les dispositions impératives à caractère général d’une circulaire ou d’une instruction doivent être regardées comme faisant grief, tout comme le refus de les abroger ; que le recours formé à leur encontre doit être accueilli si ces dispositions fixent, dans le silence des textes, une règle nouvelle entachée d’incompétence ou si, alors même qu’elles nt été compétemment prises, il est soutenu à bon droit qu’elles sont illégales pour d’autres motifs ; qu’il en va de même s’il est soutenu à bon droit que l’interprétation qu’elles prescrivent dadopter, soit méconnaît le sens et la portée des dispositions législatives ou réglementaires qu’elle entendait expliciter, soit réitère une règle contraire à une norme juridique supérieure » La circulaire tombant dans l’un de ces cas puisqu’il s’agi 2 contraire à une norme juridique supérieure » La circulaire tombant dans l’un de ces cas puisqu’il s’agit de la éitération d’une règle impliquée par le décret, contraire au principe d’égalité, le refus de l’abroger a été jugé illégal et annulé. Nous verrons que le caractère impératif de la circulaire attaquée est désormais un critère déterminant de la recevabilité du recours (l) et que dès lors qu’une circulaire, ou certaines de ses dispositions, présentent un caractère impératif, il appartient aux juges de s’interroger sur leur légalité (Il). l/ le caractère impératif de la circulaire attaquée, critère déterminant de recevabilité du recours. A une jurisprudence antérieure en désaccord.

Il résulte de l’arrêt du 18 décembre 2002 Mme Duvignères un rapprochement et une synthèse entre deux jurisprudences contradictoires intervenues en matière de recevabilité des recours en annulation contre les circulaires : d’un côté la jurisprudence Notre-Dame du Kreisker, issue d’un arrêt du 29 janvier 1954, et de l’autre, la jurisprudence IFOP, relative à l’arrêt du 18 juin 1993. En effet, le régime juridique des circulaires avait été précisé par le Conseil d’État, à l’occasion de l’arrêt d’Assemblée Institution Notre Dame du Kreisker du 29 janvier le Conseil d’État a opéré une istinction entre les circulaires « interprétatives dépourvues de tout effet juridique et insusceptibles de recours contentieux, et les circulaires « réglementaires qui ajoutent au droit et peuvent être contestées devant le juge de l’excès de pouvoir. Cependant, cette distinction a été progressivement remise en cause à partir de l’arrêt IFOP du 18 juin 1993.

En effet, dans cet arrêt, le Conseil d’État précise que « Finterprétation do 3 1993. « l’interprétation donnée par l’autorité administrative des lois et règlements n’est susceptible d’être directement déférée u juge de fexcès de pouvoir que si et dans la mesure où ladite interprétation méconnaît le sens et la portée des prescriptions législatives ou réglementaires qu’elle se propose d’expliciter ou contrevient aux exigences inhérentes à la hiérarchie des normes juridiques De ce fait, selon cet arrêt, sont recevables les recours pour excès de pouvoir dirigés contre certaines circulaires dont l’objet est d’interpréter un texte, lorsqu’elles sont illégales.

Par conséquent, au lieu d’opposer directement une irrecevabilité du recours contre les circulaires interprétatives, le juge recherche ésormais ce que contient l’interprétation, ce qui suppose qu’il examine le fond de la circulaire. Sur ce point, le système institué par l’arrêt IFOP était donc très différent de celui de l’arrêt Notre-Dame du Kreisker et même Incompatible avec lui La jurisprudence IFOP sera confirmée en 2002 par un arrêt du Conseil d’Etat, M. Villemain, rendu le 28 juin en Assemblée et qui a repris le considérant de principe de l’arrêt IFOP. Ainsi, on se trouvait clairement en présence de deux régimes contentieux, distincts et antagonistes, concernant les circulaires administratives. une clarification du régime juridique des circulaires.

Notre arrêt du 18 décembre 2002 Mme Duvignères vise manifestement à réunifier le régime contentieux des circulaires Dès lors, il adopte une règle dont la formulation est unique pour les deux types de circulaires et dans laquelle le critère de recevabilité du recours est le caractère impératif de la cir 4 circulaires et dans laquelle le critère de recevabilité du recours est le caractère impératif de la circulaire attaquée : « les dispositions impératives à caractère général d’une circulaire doivent être regardées comme faisant grief ». Désormais, lorsque l’interprétation que l’autorité administrative donne, par voie de circulaires ou d’instructions, des lois et règlements qu’elle a pour mission de mettre en œuvre présente un caractère impératif, elle est considérée comme faisant grief, tout comme le refus de l’abroger, et se trouve donc susceptible d’être déférée au juge de l’excès de pouvoir.

En revanche, les dispositions dénuées de caractère impératif d’une circulaire ou d’une instruction ne font pas grief et les conclusions tendant à leur annulation sont irrecevables. La décision rendue par la Section le 18 décembre 2002 achève ette évolution jurisprudentielle en faisant de ce caractère impératif le critère exclusif de la recevabilité du recours pour excès de pouvoir dirigé contre la circulaire. Cependant, il est compliqué de distinguer les circulaires impératives de celles qui ne présentent pas un tel caractère ; mais il résulte de la jurisprudence qu’une circulaire doit être considérée comme impérative dès lors qu’elle a pour objet de dicter aux agents une conduite a tenir, qu’elle modifie ou non l’état du droit.

De ce fait, il s’agit de déterminer si l’autorité administrative a voulu créer des droits et des obligations ou imposer une nterprétation, et comme le note Mme Fombeur, cela exclut d’emblée « toutes les dispositions des circulaires qui exposent une politique ou assignent des objectifs et qui, si elles figuraient dans une loi ou un décret seraient également dépourvues de portée normative S Ainsi, le recours formé contre les dispositions impératives à caractère général d’une circulaire ou d’une instruction est recevable. Il/ L’appréciation de la légalité des circulaires impératives. A les conditions de légalité des circulaires interprétatives. Selon notre arrêt du 18 décembre 2002 Mme Duvignères, les irculaires réglementaires peuvent être illégales dans deux cas. e premier est celui où « la règle nouvelle » qu’elles édictent est « entachée d’incompétence parce que leur auteur est dépourvu de pouvoir réglementaire.

C’est, la situation la plus fréquente et il est d’ailleurs utile, sur le plan contentieux, d’identifier ce vice d’incompétence car il présente un caractère d’ordre public. Le second cas est celui où les dispositions réglementaires de la circulaire «compétemment prises », sont néanmoins « illégales pour d’autres motifs Compétemment prises, les dispositions litigieuses le sont dans la esure où leur auteur dispose d’un pouvoir réglementaire. Les autres motifs d’illégalité que l’incompétence, peuvent consister dans tous les types d’illégalités dont n’importe quel règlement peut-être affecté, tels que la contrariété aux normes qui lui sont supérieures. Ce vice peut également affecter les circulaires Interprétatives.

Concernant ces dernières, le Conseil d’Etat estime qu’une circulaire impérative sera illégale « quand l’interprétation qu’elle prescrit d’adopter méconnait le sens et la portée des dispositions législatives ou réglementaires qu’elle entendait expliciter Il considère aussi qu’une circulaire interprétative est également illégale quand elle « réitère une rè le contraire à une norme juri interprétative est également illégale quand elle « réitère une règle contraire à une norme juridique supérieure Ainsi, il vise le cas où une disposition réglementaire illégale ou une loi incompatible avec une norme du droit international transmet son vice à la circulaire qui l’interprète fidèlement.

En l’espèce, dans notre arrêt, la circulaire du 26 mars 1 997 ne se bornait pas à rappeler les dispositions du décret du 19 décembre 991, elle en tirait la conséquence nécessaire, c’est pourquoi elle a été regardée comme réitérant la règle illégale fixée par ses dispositions. 3 L’obligation d’édicter et d’abroger les circulaires impératives Deux obligations principales se rapportent à l’exercice du pouvoir réglementaire, quelles qu’en soient les formes : édicter, dans un délai raisonnable, les dispositions nécessaires à l’application des textes législatifs et réglementaires légalement applicables ; abroger, sur demande, les règlements illégaux ou devenus illégaux par suite d’une modification des données de fait ou de roit qui existaient au moment de leur édiction. Ces deux obligations sont-elles transposables au pouvoir d’interpréter ?

L’arrêt Mme Duvignères répond positivement pour la seconde l’auteur d’une circulaire interprétative impérative illégale a l’obligation de l’abroger si la demande lui en est faite ; il commet une nouvelle illégalité en refusant ; acte faisant grief, ce refus peut être attaqué devant le juge de l’excès de pouvoir qui en prononcera l’annulation (57). Il s’agissait, en l’espèce, d’une illégalité originaire. Mais on ne voit pas pourquoi il en irait ifféremment pour une illégalité résultant d’un changement de circonstances. une précision est toutefois utile ici. Il est probable qu résultant d’un changement de circonstances. Une précision est toutefois utile ici. Il est probable qu’un tel changement consistera, le plus souvent, dans l’abrogation ou la modification de la règle interprétée.

Dans ce cas, une jurisprudence assez fournie admet fort logiquement que la disparition d’un texte entraine la caducité des interprétations qui s’y rapportent et ce, automatiquement, sans attendre qu’elles soient expressément ou implicitement apportées par une nouvelle instruction(58). Une abrogation est alors inutile. Faut-il en inférer que le recours contre le refus de la prononcer serait irrecevable, pour défaut d’acte faisant grief ou absence d’intérêt ? En invoquant ce second motif, Mme Fombeur le suggère et voit là un moyen de « couper court à toute tentative de développement du contentieux sur des refus d’abrogation de circulaires anciennes »(59).

Cet avantage paraît douteux : si, sollicitée d’abroger de telles circulaires, l’administration refuse parce qu’elle les estime toujours en vigueur, le juge sera saisi et n admettant la caducité, il donnera satisfaction au requérant, serait-ce pour rejeter le recours comme irrecevable. Quant à la première obligation précédemment évoquée, la réponse est négative. Avant même l’arrêt Mme Duvignères, le Conseil d’Etat avait jugé que le refus d’édicter une circulaire qui « se bornerait à rappeler l’état du droit existant » ne constitue pas une décision faisant grief(60). Voilà qui est limpide : comme la circulaire sollicitée ne changerait rien à la situation juridique du requérant, le refus de la prendre ne saurait être considérée comme affectant cette situation. 8