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essay B

Mise en abyme, théâtralité, distanciation et dénégation dans Les Fausses confidences Gary Smith University of Toronto Dans Les Fausses confidences, Araminte, riche veuve bourgeoise, tombe amoureuse de son nouvel intendant dont elle vient de faire la connaissance. 1 À la fin du troisième acte, soit quelques heures plus tard, elle est prête à se marier avec lui.

Comment cet amour vraisemblable a-t- il pu se développer si rapide réponse partielle dan forcer Araminte au m théâtraux de la mise la théâtralité, la dista vraisemblable or28 iag=. trouve qu’une ar Dubois pour est que les procédés ont paraître le dénouement de la pièce et naturalisent son inévitabilité. Précisons d’abord la terminologie littéraire et théâtrale sur laquelle se fonde la suite de cet article.

Théâtralité : L’étude de la théâtralité se limitera à deux aspects du procédé, d’abord, au théâtre dans le théâtre qui, dans Les Fausses confidences, ne dépasse pas le stade du jeu dans le jeu et, deuxièmement, à tout procédé qui rappelle au spectateur qu’il est au théâtre et rompt ainsi l’illusion mimétique d’un théâtre réaliste – comme le font les apartés et les adresses directes au public. fferte par Lucien Dallenbach dans son Récit spéculaire: « est mise en abyme toute enclave entretenant une relation de similitude avec l’œuvre qui la contient. ? (Dàllenbach 18) Quoique cette définition se retrouve dans le cadre d’une étude sur le roman, elle paraît également rentable pour une étude du théâtre. La mise en abyme a pour effet de rendre son cadre plus vraisemblable, tout comme la pièce enchâssée dans Hamlet, qui est manifestement du théâtre, prête au drame qui l’encadre, lui aussi théâtral, une vérité plus grande pour le spectateur. (Forestier 138-9 et 177; Ubersfeld 1 12) Le eu enchâssé, en relation avec son cadre, change de polarité.

Ce renversement produit une dénotation nouvelle, mais conserve l’ancienne sous forme de connotation ambiguë et ironique. L’ironie étant l’émission d’un enonce pour dire le contraire de ce qu’il pose manifestement, la mise en abyme produit un effet d’asymétrie qui renverse ironiquement l’objet qu’elle reflète. Distanciation : La distanciation est un « Procédé de mise ? distance de la réalité représentée de façon à ce que Pobjet représenté apparaisse sous une perspective nouvelle Elle s’effectue à plusieurs niveaux e la représentation théâtrale » selon Patrice Pavis. Pavis 1980, 125-6) Dans cet artlcle, je vals limiter l’examen de la distanciation à deux procédés: d’une part celui de la distanciation produite par la mise en abyme, et d’autre part celle qui provient de l’emploi d’un a ent médiateur pour atteindre son PAGF OF atteindre son but, en l’occurrence celui de meneur de jeu en la personne de Dubois. Dénégation : Le spectateur de théâtre oscille entre deux états, celui dune croyance en la réalité de la pièce, créée par l’illusion mimétique, et celui d’une dénégation de la réalité de ce qu’il regarde par les appels qu’il est au théâtre.

Le vouloir croire s’oppose au rappel constant de la situation d’énonciation de la pièce. De la même façon, rémission d’un énoncé négatlf soulève sa contrepartie positive comme possibilité. En termes linguistiques, l’énoncé négatif est le posé, et sa contrepartie positive, un présupposé possible. À force de nier un énoncé positif, on arrive à l’émettre de manière ironique 2. 2. Pauline Lambert discute cet effet d’ironie dans son excellente étude du théâtre marivaudien.

Je signalerais surtout les pages 187-190 qui traitent de la relation de ‘ironie avec la surprise de l’amour. 232 AS/ SA Mise en abyme, théâtralité, distanciation et dénégation dans Les Fausses Confidences 1 . La structure en abyme des Fausses Confidences Ces précisions faites, je passe à l’analyse des Fausses confidences, basée sur la structure des jeux dans le jeu, en identifiant le cadre puis les diverses intrigues en abyme.

Il faut noter que, chaque niveau enchâssant PAGF reflète pas parfaitement son enchâssement dans le texte puisqu’une mise en abyme peut en contenir une autre ou bien se trouver enchâssée elle-même. De plus, une mise en abyme peut être discontinue. Les flèches doubles (+*) du tableau indiquent le destinateur direct tandis que celles qui n’ont qu’une seule pointe (Y), un désir qui va du personnage voulant vers le personnage non-voulant : Sigle Niveau Le cadre – Discussion du complot, Dorante et Dubois : + Dorante Y Araminte Projet matrimonial, Dubois — Projet matrimonial, M.

Rémy Marton #3 Projet matrimonial, Mme Argante le Comte Y Araminte projet matrimonial, M. Rémy la riche femme #5 SMITH l’encadrant plus réel ou vrai, chaque imbrication plonge de plus en plus profondément dans la fausseté. Les deux premières scènes du premier acte se déroulent au iveau de la pièce. La raison pour laquelle Dorante est chez Araminte, son amour pour la veuve, est révélée aux spectateurs et Dubois se présente comme adjuvant de cet amour.

Le niveau #1 commence dans la troisième scene avec l’arrivée de M. Rémy et de Marton. Dorante doit p aire ? Marton pour faire réussir son projet principal. Le projet matrimonial de M. Rémy ne peut pas être rejeté sans froisser Marton. L’assentiment tacite, puis ambigu, de Dorante à ce projet, le niveau #2, sert un but dans le niveau #1, mais n’est pas tout à fait candide ni franc. Cette situation se rolonge en silences et réponses ambiguës de la part de Dorante jusqu’à sa sortie ? la fin de la cinquième scène.

Après ce départ, le niveau #2 continue d’agir pour Dorante au niveau #1, Marton le louant à Araminte dans la sixième scène et l’appuyant dans la septième lors de la première rencontre d’Araminte avec Dorante. IJne pause s’ensuit avec deux scènes purement comiques mettant en vedette Arlequin ; ces lazzis insérés n’ont rien à faire avec les intrigues sauf qu’i Arlequin, le personnage PAGF s OF scènes dix et onze expliquent cette autre intrigue, et aussi ‘imbrication de l’intrigue #2 de Marton – elle aura mille écus du Comte si Araminte consent au mariage.

Les intérêts de sont maintenant doubles, et tous les deux sont contraires aux intérêts de Dorante au niveau #1. Dorante trouvera sa justification pour décevoir, voire tromper Marron, dans le double jeu de cette dernière. La position fausse de Marton dans l’intrigue imbriquée permet, quant à la moralité, cette action de Dorante dans l’intrigue qui enchâsse les niveaux #2 et #3. Le premier acte continue d’explorer les possibilités des mises en abyme des trois premiers niveaux.

Toutefois, l’intrigue prend de ‘allure avec la fausse confidence que Dubois fait à Araminte à la scène quatorze. Ce qu’il lui dit est vrai tandis qu’il ne s’agit pas vraiment d’une confidence qui débarrasserait l’émetteur d’un fardeau, mais plutôt de ce que Patrice Pavis caractérise comme un « cadeau empoisonné » (Pavis 1986, 285), destiné à changer le moyen de penser du récepteur. Dubois réussit ? changer la polarité d’Araminte, la projetant dans l’abyme de l’arrièrepensée.

Elle avait constaté la « très bonne façon » de son futur intendant 234 Mise en abyme, théâtralit n et dénéeation dans Les répare Araminte pour sa participation au niveau #1, mais aussi à agir différemment dans les autres niveaux de la pièce. Lors de l’entretien entre Dorante et Araminte à la scène seize du premier acte, flndéclsion et l’hésitation de cette dernière, auparavant prête à embaucher Dorante, témoignent de l’effet de la confidence de Dubois. Araminte est confuse et est consciente de l’effet de la confidence.

Par ailleurs, dans la scène seize du premier acte, on retourne au a, celui du cadre, lorsque Dubois et Dorante discutent leur complot, puis dans la scène sulvante, lorsque Dub01s commence à faire jouer es intrigues les unes contre les autres en suggérant à Marton qu’elle aurait sujet d’être jalouse d’Araminte, à qui Dorante fait les yeux doux. Encore, en confiant la vérité, à Marton cette fois-ci, Dubois met en marche des soupçons qui changent la manière de penser du récepteur. Marton est maintenant aux aguets, cherchant des preuves de l’amour de Dorante pour elle.

Les fausses confidences sont maintenant à l’œuvre aux niveaux #1 et #2. Le deuxième acte commence avec l’entretien daffaires de Dorante avec Araminte où il fait part de son opinion sur le procès du Comte au niveau #3. Il avance sa cause en trouvant celle du Comte sans mérite. Mais presque immédiatement, M. Rémy arrive et offre un autre mariage a Dorante – l’intrigue #4 enchâssée dans la pièce. M. Rémy avait dit que le mariage avec Marton suffirait « en attendant mieux » (Acte l, scène 4), ce qu’il pense avoir trouvé. C intrigue prend place dans PAGF 7 OF qu’il pense avoir trouvé.

Cette nouvelle intrigue prend place dans les autres. Araminte, au niveau #1, prend le refus du mariage de comme une autre preuve de l’amour qu’il a pour elle. par contre, Marton, sans être au courant des intrigues, dit que « quelqu’un » rêverait n refusant un tel mariage, mais en apprenant qu’il s’agit de Dorante, elle le loue, sans reconnaître l’ambigüité du discours de ce dernier qui cite « ses sentiments » en refusant le mariage, ce qui indique, pour le spectateur, toujours au courant de tous les niveaux de la pièce, son penchant pour Araminte. Acte Il, scène 2) Le niveau #4 représente une intrigue éphémère qui met en abyme les deux premiers niveaux. La polarité de cette intrigue change en passant par chaque niveau, Marton, au niveau #2, interprétant le refus ambigu de Dorante selon son intérêt, Araminte l’interprétant ontre Marton selon le sien au niveau #1. L’arrivée du Comte dans la quatrième scène met en marche le #3. Le Comte veut acheter Dorante et envoie Marton en parler au nouvel vol. I (N 0 3) 235 cary SMI H intendant.

Mais cela n’est qu’un prétexte théâtral pour que le Comte soit présent pour ce qui suit dans les scènes cinq à onze – la question des portraits. Cette dernière met en jeu les niveaux #2 et #3 dans le niveau tent pour que l’on ouvre Le Comte, Marton et Mme portrait caché, chacune pensant en être le sujet. Cette lutte se résout au moment de l’ouverture publique de a boîte révélant le portrait de la veuve, ce qui détrompe Marton, mais tend ? compromettre Araminte.

La jalousie de Marton suscitée au niveau forcé la révélation par Araminte au niveau #1 du portrait qu’on a fait d’elle devant les représentants du niveau #3. Mais Araminte n’est pas complètement compromise par la révélation parce que le peintre n’est pas connu. Toutefois, un deuxième portrait prend la relève à la scène prochaine où il est question d’un portrait d’Araminte dans la chambre de que ce dernier contemple, selon le bruit indiscret que répand Arlequin. Cette fois-ci, le Comte voit qu’Araminte n’a pas de choix. Elle doit congédier Dorante.

Le Comte renonce au procès qui était routil du niveau #3 pour forcer Araminte au mariage et promet son silence sur Dorante. Il adoucit la menace au niveau #3 pour le moment, se croyant dans une position plus forte. Néanmoins, il ne sait rien sur la profondeur du niveau #1 qui utilise les événements semblablement favorables au niveau #3 pour avancer sa propre intrigue. Araminte a un autre choix – prendre Dorante comme époux. Et que dire du niveau #2, coincé entre les deux autres niveaux ? Le mariage avec Marton n’est plus ossible et ce niveau semble perdre son élan.

Ce ro’et cède la place au niveau #3 qui est maintenant plus proba let de Marton, mais qui que la réussite du projet #1 dont il n’est que le reflet — un reflet qui, selon la théorie des mises en abyme, rend plus vrai, voire probable, son cadre. Par ailleurs, le niveau #1 se rétablit directement dans la scène suivante par d’autres fausses confidences que Dubois fait à Araminte au sujet de Dorante. Dubois suggère qu’une déclaration directe de la part de mériterait son congé, ce qui serait le but du projet (celui d’Arami nte de tendre un piège à Dorante).

Le public sait que ce renvoi n’est pas le but d’Araminte. Elle veut flatter son amour propre par un aveu de l’amour de Dorante, mais ne pense pas aux conséquences d’un tel acte. Le piège demande le faux assentiment d’Araminte au projet de mariage avec le Comte qu’elle force Dorante à écrire dans une lettre au Comte. Ara- 236 minte emploie donc le niveau #3 dans le niveau #5, ce qui fait que épreuve a maintenant plus de réalité que le projet #3 qui en fait partie. De la même façon, le niveau #5 ne fait que refléter (à l’envers) le niveau 1 qui reste le plus probable, Ar ant que sa