MOROCCO DESC REPORT ELEC

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Accès à la justice Les recours contre les violations des droits sociaux au Maroc Constituée de 60 éminents juges et avocats du monde entier, la Commission Internationale de Juristes (CIJ) œuvre pour la promotion et la protection des droits humains dans le cadre de l’Etat de droit. Elle dispose d’une expertise juridique unique pour développer et renforcer les systèmes de justice nationaux et internationaux. r 152 Sni* to nextggge Créée en 1952 et a garantir le dévelop la mise en oeuvre et du droit interna humanitaire, veiller économiques, politiques ts, la CIJ veut es droits humains its civils, culturels, t sociaux, s’assurer de la séparation des pouvoirs et présewer l’indépendance de la justice et des professions juridiques.

Accès à la justice – Les recours contre les violations des droits sociaux au Maroc @ Copyrlght Comisslon Internacionale de Juristes La CIJ permet la reproduction libre d’extraits de toutes ses publications pour autant que la source soit mentionnée et qu’une copie de la publication soit envoyée ? l’adresse suivante: Commission Internationale de Juristes Case Postale 91 Rue des Bains 33 cadre normatif et institutionnel au Maroc : questions transversales pour les DESC 0 1 . Le cadre normatif pertinent pour les DESC A) Le Maroc et le droit international B) La nouvelle Constitution 25 C) La persistance du rôle des coutumes et du droit musulman: défis pour les droits de la femme 31 1. 2 Les institutions garantes des droits 35 A) Le contrôle de constitutionnalité : nouvelles perspectives? 36 B) Les recours devant les trlbunaux 38 1. 3 Des vecteurs pour l’accès à la ‘ustice pour les DESC ? 43 A) Le rôle des institutions éfense des droits de droit à la santé : occasion manquée et nouveaux espoirs ? 95 C) Le droit à la santé au travail 96 Chapitre 4.

Le droit à un niveau de vie suffisant : accès a la justice pour une vie dans la dignité 98 4. 1 Le cadre normatif marocain pour le droit ? un niveau de vie suffisant A) Dispositions constitutionnelles 99 B) Normes et réalité 4. 2 Evaluation de politiques publiques : le logement et la terre 101 103 A) Les politiques du logement et de la ville 104 B) La propriété foncière, les terres rurales et les femmes Bouzlafa et Abdelaziz El Aatiki. Jill Heine, conseillère juridique et politique principale, a entrepris la revue juridique.

Laura Torre et Ana Linhas ont contribué à la mise en forme t à la correction du texte. L’étude a largement bénéficié des informations et discussions collectées et menées au cours d’un processus entamé en 2012. En particulier, un atelier organisé en collaboration avec « Organisation marocaine des droits humains en septembre 2012 et une mission de recherche organisée conjointement par les programmes DESC et MENA de la CIJ en avril 201 3 ont été l’occasion de consulter des acteurs pertinents, qu’ils soient utilisateurs ou au service de la justice.

La CIJ souhaite exprimer sa profonde reconnaissance à toutes celles et tous ceux qui, au cours des 18 derniers mois ont bien oulu partager leur savoir, leurs opinions, leur expertise et, surtout, leur histoire et expérience personnelles. 7 Préface un droit qui, en cas de violation, ne peut être invoqué devant un tribunal, quel qu’il soit, ou, à tout le moins, devant un organe administratif ayant pouvoir de décision, a peu de valeur pour les victimes de cette violation. Cest sous le terme un peu rébarbatif de « justiciabilité » que cette obligation est désignée.

Si généralement, la justiciabilité des droits civils et politiques n’est pas contestée, il n’en a pas toujours été de même pour les roits économiques, sociaux et culturels. Toutefois, de gros progrès ont été fais au cours des dernières années et il est maintenant communément admis que l’ensemble des droits de l’homme sont justiciables, comme l’a rappelé la conférence mondiale des droits de l’homme de Vienne de 1993 : « Tous les droits de l’homme la conférence sont universels, indissociables, interdépendants et intimement liés. ? C’est le thème de ce livre : les droits économiques, sociaux et culturels sont « justiciables », et cette justiciabilité, qui passe souvent par la reconnaissance des droits sociaux comme droits ondamentaux dans de nombreuses constitutions, doit se développer au Maroc. Le livre, résu tat de plusieurs ateliers et de nombreuses consultations, souligne, de façon concrète, la nécessité de mettre en œuvre ou de développer des politiques publiques et, surtout, de lever les obstacles susceptibles de s’opposer à un accès pour tous aux tribunaux, en cas de violations des droits économiques, sociaux et culturels (DESC).

L’ouvrage analyse d’abord le support juridique des DESC, c’està- dire les textes internationaux ratifiés par le Maroc, dont le pacte international des droits économiques, soclaux et culturels PIDESC) et l’ensemble des Conventions universelles contre la discrimination, la torture, etc. , ainsi que les principales conventions de l’OIT. Il précise aussi que le Maroc, qui reconnait la compétence de plusieurs comités pour recevoir des communications individuelles en cas de violations des droits protégés, n’a pas encore ratifié le Protocole facultatif au PIDESC.

C’est sans doute l’un des enjeux de cette étude : 8 faciliter une telle ratification, qui permettrait une réelle avancée dans la protection judiciaire des DESC. La base juridique nationale s’est renforcée avec l’adoption par eferendum de la nouvell le 1er juillet 2011, Constitution, le 1er juillet 2011, promulguée par Dahir du 29 juillet 2011. Le préambule de ce texte se réfère aux grands principes de justice sociale et affirme la primauté des Conventions internationales sur la loi.

La Constitution elle-même garantit certains droits économiques, sociaux et culturels, notamment dans les articles 29 et 31, mais elle ne les garantit pas tous. La protection juridique, comme le souligne l’ouvrage, ne sera pleinement opérationnelle qu’avec l’adoption des lois organiques, annoncées mais non encore votées. De telles lois permettraient notamment un contrôle de constitutionnalité par la Cour constitutionnelle.

L’ouvrage ne masque pas les obstacles qui freinent la pleine réalisation des DESC : la persistance du rôle des coutumes et du droit musulman – malgré les progrès que constituent les textes sur le statut de la femme dans le code de la famille – qui peut expliquer le maintien de certaines limites, comme la polygamie, la procédure de divorce unilatéral de la part du mari ou le maintien de certaines inégalités en matière d’héritage. La persistance de la pauvreté dans de nombreuses couches de la ociété, en particulier dans les zones rurales, est aussi un obstacle matériel et social à un accès pour tous à la justice.

Le rôle de nouvelles institutions dans la protection des DESC est aussi souligné : la création du Conseil national des droits de l’homme en mars 2011 (en remplacement de l’ancien Conseil consultatif des droits de l’homme) est porteuse d’espoir : cet organisme peut recevoir des plaintes, sans aucun formalisme, et apporter sans doute des solutions rapides. Mais des progrès restent à faire en matiere d’aide juridique et d’accès a rapides. Mais des progrès estent à faire en matière d’aide juridique et d’accès ? l’information.

Après l’examen des fondements juridiques, l’ouvrage procède ? une étude rigoureuse de la protection des divers droits énumérés par le PIDESC : l’accès à la justice pour les travailleurs, le droit à la sécurité sociale, le droit à la santé et la justice, le droit à un niveau de vie suffisant et l’accès à la justice 9 pour une vie dans la dignité, en particulier le droit au logement, l’accès à la terre, la protection du consommateur.

Pour chacun de ces droits, l’étude analyse la situation concrète es titulaires des droits au vu des témoignages reçus, puis étudie le cadre normatif (par exemple, le code du travail pour les droits des travailleurs), puis les possibilités de recours juridictionnels de protection. Elle décrit ensuite les forces et les faiblesses du système en vigueur : par exemple, une certaine impunité des employeurs en matière d’infractions au code du travail en raison de la faiblesse des sanctions prévues et, ? l’inverse, une répression contre les syndicalistes, ou une discrimination syndicale et de sérieuses limitations au droit de grève.

Elle pointe la nécessité de progrès à faire dans plusieurs omaines en matière de sécurité sociale pour arriver à une couverture universelle, à partir de constatations très concrètes, telles que le fait que seulement 32% de la population bénéficie d’une assurance maladie, ou bien les carences de la protection maternelle et les insuffisances de la légis ation sur l’interruption de grossesse. Concret, documenté, rigoureux. et ouvrage devrait contribuer à une meilleure connaissance de la situation des droits economlques, soclau devrait contribuer économiques, sociaux et culturels au Maroc, des textes applicables, tant nationaux qu’internationaux et des moyens ‘agir en justice, à partir de la nouvelle Constitution, à condition que les recommandations des auteurs soient suivies, pour lutter contre les inégalités persistantes, en particulier à l’égard des femmes, que les lois organiques soient adoptées et que, progressivement, s’instaure une jurisprudence dans le domaine des DESC.

Puisse-t-il aussi, comme le recommandent les conclusions, inciter les autorités compétentes à ratifier le Protocole facultatif au PIDESC et à amender la charte des droits constitutionnels pour y inclure les droits qui n’y figurent pas encore. juge Philippe Texier Commissaire de la Commission Internationale de Juristes IO Chapitre O.

Introductlon et démarche méthodologique Accès à la justice et la justiciabilité des DESC Bien que le débat sur la nature et la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels (DESC) ne soit pas clos, des progrès indéniables ont été réalisés dans le domaine de la garantie constitutionnelle de ces droits, notamment avec leur inclusion dans la charte des droits et libertés de plusieurs constitutions adoptées au cours de ces dernières années. De même, la reconnaissance du rôle que doivent jouer les ribunaux et cours de justice dans la défense et la réalisation des DESC s’est largement répandue.

Cependant, les Etats sont encore loin d’adopter toutes les mesures nécessaires à la garantie de voies de recours internes efficaces pour les victime lorsque certains de ces pour les victimes. Ainsi, même lorsque certains de ces droits sont garantis dans l’ordre juridique interne, d’autres facteurs, tels que le manque de formation des acteurs impliqués, ou le manque d’accessibilité économique et/ou physique du système judiciaire pour une grande partie de la population, empêchent l’accès à la justice et la réalisation des roits en général.

Comme il est détaillé plus loin, dans le contexte de l’entrée en vigueur du Protocole Facultatif au Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels (PIDESC), la Commission Internationale de Juristes (CI]) est convaincue qu’il est plus important que jamais de contribuer à promouvoir et ? protéger les DESC, à identifier les obstacles qui empêchent les victimes de violations de ces droits d’accéder à la justice, et, ? discuter de recommandations et stratégies pour surpasser ces obstacles et pour garantir le droit à un recours utile au niveau national. 2 Projet et méthodologie Le présent document se base sur un processus de recherche suivant la méthodologie générale employée par la CIJ dans ses études sur raccès à la justice pour les victimes de menaces et de violations affectant leurs DESC. Cette méthodologie combine l’information documentaire et de terrain, et comporte ainsi des sections descriptives et analytiques.

En septembre 2012, un atelier de consultation d’acteurs de la société civile et d’avocats, organisé en collaboration avec l’Organisation Marocaine des Droits Humains, a eu lieu autour du thème de raccès à la justice pour les DESC. En outre, un symposium avec des magistrats, des avocats, des experts universitaires et des représentants de la société civile s’est égaleme avocats, des experts également tenu en septembre 2012 pour entamer la discussion sur le rôle des tribunaux dans la protection des DESC.

Ces deux événements ont été organisés pendant la phase de recherche documentaire dont les premiers résultats ont pu servir de base aux discussions. La recherche sur le cadre juridique et sur les travaux pertinents déjà existants a été complétée non seulement par les discussions de l’atelier mais aussi par des ntretiens menés par la CIJ essentiellement en avril 2013.

Ces entretiens et conversations avec des victimes de violations des DESC, avec des usagers et acteurs de la justice plus genéralement ont eu lieu dans les villes sulvantes et leurs alentours • Rabat, Casablanca et Ouarzazate. Nous espérons que les résultats de ce processus, la recherche et les consultations qui forment la base de la présente étude seront une référence utile aux victimes de violations des DESC et à leurs représentants.

Le panorama proposé qui inclut le cadre normatif et institutionnel, ainsi que les témoignages de ivers acteurs concernant les difficultés rencontrées par les usagers du système de justice, met en exergue les défis restants mais aussl les opportunités que représentent notamment la nouvelle donne générée par les réformes de 2011, notamment en matière de protection des DESC La présente étude ne prétend en aucun cas être exhaustive, aborder tous les droits économiques, sociaux et culturels ou tous les aspects spécifiques de l’accès à la justice en cas de 13 violations de ces droits.

En particulier, la situation relative à la réalisation des DESC de catégories spécifiques d’individus tel PAGF 52