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ÉCOLE DE PSYCHOLOGUES PRATICIENS DE LYON, 4E ANNÉE Adeline Michel, A. C. Sordet et E. Moraillon Les rumeurs en tant que phénomène d’influence sociale Dossier de psychologie sociale Dossier remis à M. Offroy, professeur de psychologie sociale. voisins…. — Mai 2004 Sommaire Introduction Chapitre 4 or 113 Sni* to View Histoire du concept de la rumeur et définitions… A. B. c. Histoire du concept de la rumeur… . La problématique définitionnelle de la rumeur.. Les genres Chapitre Il 21 Les thèmes récurrents 25 Chapitre Ill — 28 La vie des rumeurs la propagation La diffusion .

Pourquoi croyons-nous les 2 rumeurs Chapitre IV : 40 A. L’analyse du contenu…… .. 28 B.  » La structure d’un mythe ou l’analyse de tous les termes de la 43 Chapitre V 49 La mort de la rumeur d’Orléans… • • • • • • • • • 54 57 Bibliographie…. 59 Annexes L’influence sociale s’inscrit dans un schéma dans lequel chacun est sujet et objet, c’est un phénomène universel. Cinfluence sociale est un processus réciproque : « je participe moi même à l’influence que je reçois ». Chacun d’entre nous peut être influencé par la société ou être source de changement pour cette même société.

Comment la société influence-t-elle l’homme ? Comment fhomme peut-il influencer la société ? La rumeur est une influence sociale car elle peut prendre son origine dans un groupe ou dans une institution pour agir sur les comportements, les croyances, et les opinions d’un individu. Mais elle peut aussi partir d’un fait et avoir une influence sur toute une société. Il s’agit souvent d’une influence inconsciente car on ne se rend pas compte de la réalité de la rumeur et encore moins de l’impact de son message sur notre vie quotidienne. Selon nous, la rumeur s’apparente à la légende urbaine.

Il s’agit dun récit ou d’un message qui n’est pas vérifié et qui transmet une information sortant de l’ordinaire. Elle se diffuse par le « bouche à oreille mais édias et disparait comme paGF3DF113 insidieux dans le sens où on ne perçoit pas tout de suite ce qu’elle est vraiment. A première vue, elle semble mal organisée, colportée au gré du vent et sans logique particulière, comme si elle était répandue par hasard. En réalité ce n’est pas le cas, bien au contraire. La rumeur est un message qui a ses propres règles, un mécanisme bien ancré et qui existe depuis longtemps.

Nous allons donc essayer de comprendre ce mécanisme en nous penchant sur les différentes étapes du développement de la rumeur. Ainsi nous allons étudier la vie de la rumeur : de sa nalssance à sa mort. Notre réflexion s’articule de la manière suivante : un axe théorique illustré par la rumeur dorléans, laquelle a fait l’objet d’une étude complète par Edgar Morin. Comment peut-on définir une rumeur, depuis quand est-elle étudiée ? Comment nait une rumeur ? Quels sont les thèmes récurrents ? Comment se diffuse t-elle ? Pourquoi la croyons-nous ? Comment peut-on l’interpréter ?

Comment meurt-elle ? Autant de questions qui en amènent beaucoup d’autres auxquelles nous allons essayer de répondre tout au long de notre dossier. Histoire du concept de la rumeur et définitions A. Histoire du concept de la rumeur. Evolution du sens du mot L’origine du mot rumeur : « rumor » signifie en latin « bruit qui court, rumeur publique ». À l’origine, la rumeur désign confus de voix qui 4 13 parlement de Paris datant de 1274. II désigne alors le « haro », le cri qu’était obligé de pousser tout citoyen s’il assistait à un crlrne de manière à attirer l’attention de la maréchaussée.

Au XVIe siècle le sens latin revient et c’est les nouvelles qui se répandent dans le public et dans l’opinion. La rumeur implique donc la notion de nouvelle d’information. Cest en remontant vers le XVIIIe siècle et vers la notion du bruit qu’apparait les notions de vrai bruit et de faux bruit avec la notion un peu plus moderne de propagation et de démentit ou au contraire d’authentification de la rumeur. Le mot continue à évoluer jusqu’à la deuxième guerre mondiale où il acquiert la signification que nous lui connaissons. Les études sur la rumeur.

Le phénomène rumoral, qui a vu les sciences humaines ‘intéresser à lui pendant la deuxième guerre mondiale, a depuis été examiné, décrit et expliqué sous une multitude d’angles d’approche. Selon les auteurs, il a été étudié d’un point de vue sociologique (Reumaux, Morin), psychologique (Marc, Rouquette), sous l’angle des théories du récit (Campion-Vincent, Renard), d’un point de vue marketing (Kapferer), communicationnel et dans l’application de la gestion des crises (Kapferer de la communication interne et relations publiques des entreprises (Gryspeerdt), de son image dans la presse (Klein)… t même, mais dans une moindre mesure, du oint de vue juridique. Pourtant si le hénomène a été étudié sous de nombreux aspect la rumeur soit un phénomène ancien et qui a sûrement toujours existé, elle est un concept récent, scientifiquement parlant. pour p. Frossartl, l’idée de la rumeur, comme phénomène soclal, a été construite. En effet, ce terme a connu une forte croissance au XX e siècle. La rumeur va devenir un outil d’observation La rumeur : histoire ou fantasmes, Belin, 2002, Paris. du moral des populations.

Le XX e siècle fera donc le lit d’une rumeur moderne, la notion va devenir fonctionnelle et fera partie des sciences sociales. Froissart pense donc que la rumeur devient une réalité « de façon incidente » suite à l’article de Stern2 en 1902. Cet article porte sur le témoignage et la psychologie judiciaire et marque alors la naissance de la rumeur comme concept des sciences humaines. Il est question d’une expérience qui met en place une rumeur expérimentale qui passe de sujet en sujet, l’expérimentateur relançant la rumeur et observant ce qui est diffusé entre les sujets.

Froissart voit ici la véritable invention de la rumeur moderne et la mise en place de l’invariant des recherches futures. C’est Oppenheim3 en 1911 qui va renforcer le concept et va définir la rumeur comme média de masse. Cette chercheuse va laisser sous-entendre dans un article la toute puissance des médias contre laquelle on ne pourrait rien. La rumeur va donc être associée pour la première fois à la foule, aux médias, au public. puis Kirkpatnck en 1932 v s DE 113 rotocole de Stern.

Il va celui de la rumeur ou tout simplement celui de l’information en général. Pour Froissart, des lois peu solides vont être tirées de ce protocole, et seront le résultat d’une « fragile extrapolation » à une réalité ppelée rumeur. C’est avec Allport et Postman (1944) que les études sur la rumeur vont « décoller Apparues en temps de guerre pour combattre les fréquentes rumeurs qui démoralisaient les troupes et la population, ces premières études – commandées par l’armée arméricaine- s’intéressent au phénomène rumoral.

Allport et postman, à l’origine du protocole expérimental du « jeu du téléphone » conçoivent alors la rumeur comme : « une proposition liée aux événements du jour, destinée à être crue, colportée de personne en personne, d’habitude par le bouche-à-oreille, ans qu’il existe des données concrètes permettant de témoigner de son exactitude. Les travaux de ces deux auteurs s’inspirent de ceux de Stern, ils reprennent le même concept et l’intègrent dans un modèle de contrôle social fait de propagande et de stratégie militaire.

La rumeur devient une arme de guerre, elle peut tuer. Knapp ( 1944), étudiant de Allport, la définit d’ailleurs comme: « une déclaration destinée à être crue, se rapportant à l’actualité et répandue sans vérification officielle C’est donc pendant la seconde guerre mondiale que le lien entre rumeur, politique et propagande a être fait. Les rumeurs deviennent à cette époque des fausses informations diffusées sur des ondes ennemies. Dans ce cas là, le concept de rumeur a été utilisé comme contre-propa ande il devient politique. ’13 Les légendes urbaines On peut remonter un peu plus dans le temps dans l’origine de l’étude des rumeurs, si l’on rapproche ce concept à celui de légende urbaine comme le fait Jean-Bruno Renard4. L’auteur repère qu’au XVII e siècle, Fontenelle explique la naissance des légendes par quatre facteurs principaux : l’ignorance des peuples concernant les lois de la ature, la force de l’imagination qui exagère les choses, la transmission orale des écrits qui aggrave la déformation de leur 2 Louis — William Stern, jeune professeur américain, s’intéressant ? l’étude de la psychologie du témoignage.

Rosa Oppenheim, collaboratrice de Stern. Rumeurs et légendes urbaines, que sais-je, 1999, Paris. contenu et, enfin, le rôle explicatif du mythe. un sociologue d’aujourd’hui approuverait certainement ces conclusions selon Renard. Cependant, il faut attendre les études folkloriques, nées au début du XIXème siècle, pour que l’on s’intéresse réellement aux légendes. L’intérêt scientifique pour les légendes urbaines est donc né il y a environ un siècle. Dès cette époque les « folkloristes » ont commencé à se pencher sur l’étude des légendes et ont tenté de trouver leur origine et leur signification. olkloriste Gabriel Vicaire se osait les questions suivantes, e 113 Ainsi, en 1886, le té : « Les villes n’ont-elles de fer. A répoque, dans certains pays, on considérait cette invention comme diabolique. Ainsi en Turquie, la population pensait que la locomotive fonctionnait grâce à un diablotin que les Européens enfermaient dans une boite de eu, et ses bonds de souffrance entraînaient le mouvement de la machine. En Allemagne, les paysans pensaient que le diable enlevait un passager à chaque voyage en guise de salaire.

Une rumeur a même traversé l’Amérique pour arriver en Europe expliquant qu’une locomotive maudite avait tué bon nombre de personnes : « les machinistes du chemin de fer de Pennsylvanie viennent de mettre à l’index la locomotive no 1313, à laquelle ils reprochent une quantité de méfaits. Dès son premier essai elle a tué deux enfants. L’année suivante, elle se jeta dans un précipice, entraînant avec elle plusieurs wagons, noyant le achiniste, le chauffeur, six autres personnes, et en blessant un nombre considérable.

Sortie des ateliers de réparation, elle se jeta dans un train de marchandises. Ce tamponnement eut pour résultats un mort et trois blessés. Quelques semaines après, la chaudière éclatait : le machiniste et un chauffeur étaient déchiquetés. Nouvelle visite à l’atelier de réparation : nouvelle sortie et nouvelle collision : trois tués. Puis une lampe à pétrole éclate sur la locomotive : le machiniste et le chauffeur sont grièvement blessés. Epouvantés, les mécaniciens ont refusé de onter sur cette tueuse d’hommes.

La compagnie a dû finir par remiser la meurtrière machine. » Les rumeurs concernant les technologies modernes seront nombreuses par la suite et notamment les véhicules maudits por leur propriétaire comme notamment les véhicules maudits portant malheur à leur propriétaire comme la voiture dans laquelle fut assassiné parchiduc François-Ferdinand ou encore la Porsche de James Dean. une autre rumeur pris naissance dans les années 1 880 et est racontée par Frédéric Ortoli dans le journal « La tradition » (1894-95).

Il s’agit de la légende de la rincesse russe du cimetière du Père-l_achaise qui se répandit dans toute l’Europe et jusqu’aux Etats-Unis : « On se souvient peut-être qu’en 1889 ou 1890, une légende commença à courir dans la presse, d’après laquelle une princesse russe aurait laissé un legs de 100 000 à 1 million de francs à la personne qui consentirait à passer un an et un jour dans la chapelle élevée sur sa tombe au Père-Lachaise.

La morte était exposée, disait-on, dans un cercueil de verre, et pour que celui ou celle qui entreprendrait auprès d’elle cette longue veillée ne pût jamais la perdre de vue, les murs de la hapelle étaient revêtus de miroirs. L’exigeante légatrice n’autorisait point son compagnon ou sa compagne à travailler mais seulement à lire.

Et pour que sa pensée fût toute à elle, elle le condamnait à ne voir personne, ni amis, pas même le domestique qui devait apporter chaque jour les repas en un certain endroit. » Selon Ortoli, cette rumeur pourrait reposer sur des faits réels : on sait que certaines personnes redoutant d’être enterrées vivantes demandaient à leur domestique de veiller le cercueil pendant quelques jours en échange d’une prime. 6 Dans le début du XX e si 13 sur les léeendes ont