MAROC Culture Et Gestion
Chapitre VI. 3 Culture et gestion au Maroc une osmose atypique Brahim Allalil Résumé. La culture marocaine est très hétéroclite et a été progressivement forgée au gré des occupations qu’a connues le pays au fil de l’histoire. Elle est composée d’une alchimie peu commune de cultures dont certaines ont tout de même gardé se définitelle à la fois présente de nombre dans les valeurs fond de la culture marocai mesure où les m Snipe to particularités. Ainsi, dans le sens où elle ement incarnées e Babel dans la sous-cultures qui la constituent refusent de se fondre entièrement.
Les valeurs fondamentales qui caractérisent la société marocaine sont nombreuses, mais peuvent être ramenées aux valeurs suivantes la logique d’allégeance, le familisme2, et la sacralité de a dignité. La mise en œuvre de ces valeurs dans une perspective de gestion donne lieu à l’apparition de nombreux types et modes de gestion qui caractérisent l’entreprise marocaine d’aujourd’hui. . Brahim Allali détient un doctorat en administration des affaires des PME publié en 2004 ainsi que L’Audit-export, un outil stratégique pour le développement international des PME paru en 2005. . Solidarité familiale. Allali, Brahim, « Culture et gestion au Maroc : une osmose atypique dans Eduardo Davel, Jean-Pierre Dupuis et Jean-François Chanlat (dir. ), Gestion en contexte interculturel : approches, problématiques, pratiques et plongées, Québec, Presses de l’Université Laval et Télé-université (UQAM), 2008. 2 Partie VI Plongées en Afrique et au moyen-orient Introduction a culture marocaine suscite Pintérêt de nombreux chercheurs depuis fort longtemps. aradoxalement, ce sont les chercheurs étrangers y ont trouvé un terrain fertile de fouilles anthropologiques, alors que ‘intérêt de nombre de leurs homologues marocains s’est plutôt porté, faute de financement, sur des recherches plus lucratives. Il est curieux de constater que plusieurs chercheurs occidentaux qui étudient les cultures des pays en voie de développement (PED), restent, en fin de compte, des « touristes sophistiqués » qui Sintéressent davantage au côté « folklorique » de la culture qu’à la fixation des sens.
En fait, la culture marocai simple et complexe. Elle avec lesquelles elle cohabite dans le giron de la culture marocaine. Dans le présent chapitre, nous allons justement examiner omment ces sous-cultures fondées sur des apports ethniques et raciaux, dont la société marocaine a fait la litière depuis des temps immémoriaux, se sont amalgamées pour donner naissance à la culture marocaine tout en continuant de graviter dans des orbites différentes.
Nous allons identifier le commun et le particulier ou encore, l’etic et l’emic dans cette culture. Nous allons également montrer quelques-unes des implications de cette culture et de ses constituantes sur les modes de gestion et identifierons certains types de comportements qu’elles conditionnent. La culture marocaine : melting-pot ou tour de Babel? Le peuple marocain est fait d’un mélange peu commun de races. Eu égard à sa position géostratégique, le Maroc a depuis toujours suscité les convoitises des peuples marchands et guerriers.
Plusieurs peuples se sont donc succédé au Maroc : Romains, Byzantins, Carthaginois, Phéniciens, Vandales, Arabes, Espagnols, Portugais, Français, entre autres. Chacun de ces peuples a profondément, et d’une manière indélébile, marqué marocaine. D’autre part, la traite des esclaves a fat venir au Maroc des tribus entières d’Africains. La reconquête espagnole en 1492 a, elle aussi, chassé vers le Maroc, outre les « Sarrasins » un nombre considérable de Juifs de PAGF 3 OF créant ainsi un amalgame exceptionnel de races et d’ethnies.
Ainsi constituée, la culture marocaine paraît être tantôt un melting-pot ayant réussi à fondre en son sein toutes les cultures des peuples qui ont habité le pays, tantôt une tour de Babel dans la mesure où lesdites cultures ont largement gardé leurs spécificités et leurs caractéristiques. Afin d’aider le lecteur ? répondre à cette question, nous allons rappeler dans la section suivante les ondements de la culture marocaine ainsi que son évolution comme suite aux apports faits par les différents peuples ayant habité le Maroc.
Les fondements de la culture marocaine3 Nous distinguons à cet égard entre les fondements historiques et ethniques, les fondements religieux et cultuels et enfin, les fondements économiques. Évolution historique et ethnique de la société marocaine Les écrits disponibles de même que les preuves archéologiques montrent que le Maroc était déjà peuplé vers 800 000 avant J. -C. comme en témoignent, entre autres, les outils retrouvés à Casablanca. Vers 5000 ans avant J. -C. , de nouvelles populations arrivèrent au Maroc et se mêlèrent aux descendants des premiers habitants.
Les populations ainsi constituées ont été désignées par la suite de « barbares h, puis de « berbères » par les navigateurs et les Romains. Entre les VIIIe et VIe siècles avant J. -C. , ‘écriture libyque, inventée par les Berbères, est apparue dans l’Atlas marquant ainsi le début de l’histoire du Maroc. Depuis, la diver de la population allait marques phéniciennes datant du Ve siècle avant J. -C. ont été trouvées sur des poteries à l’ile d’Essaouira. Des peuples dlts « les Éthiopiens » ou ceux qui sont brûlés par le solei14, s’installèrent au Maroc.
Les Atlantes occupèrent le centre de l’Atlas et donnèrent leur nom à l’océan Atlantique. Le royaume de Maurétanie a pris naissance au Ve siècle av. J. -C. et atteint son apogée sous le règne du roi Juba Il entre les années 25 avant J. -C. et 23 de l’ère chrétienne. Cependant, en l’an 42 après J. -C. , les armees 3. Pour la rédaction de cette partie, nous nous sommes inspirés de plusieurs sites officiels dont ceux des ministères de la Communication, de la Culture, des Habous, du Commerce et de l’Industrie, et de l’Agriculture.
Nous nous sommes également inspirés d’une copie ronéotypée de l’ouvrage d’Ahmed Naciri : « AI Istiqssa 4. Ministère de la Communication, http://www. mincom. gov. ma/french/generalites/histoire/ histoire. html (consulté en septembre 2005). 4 Partie VI + Plongées en Afrique et au moyen-orient romaines envahirent le Maroc, mettant ainsi fin au royaume de la Maurétanie Tingitane. Des vestiges sont encore debout des villes de Tingis, Lixus et Volubilis attestant de la force de la présence romaine au Maroc qui s’est aintenue jusqu’en l’an 429 avec l’arrivée des Vandales dans la région.
Il semblerait également qu’ PAGF s OF les flottes byzantines marquant ainsi l’entrée de l’islam au Maroc et ce, malgré la résistance des Berbères et des Byzantins. Néanmoins, l’affaiblissement de la dynastie omeyyade à Damas, siège du calife, survenu à la suite de nombreux soulèvements, entraîna le morcellement du Maroc en plusieurs royaumes et principautés. Malgré l’islamisation progressive de la population, la première musulmane ne s’installa au Maroc qu’à partir de 788 avec l’arrivée ‘Idriss 1er, descendant du prophète. ersécuté par les Abbassides à la suite de la bataille de Fakh en Arabie, Idriss s’est réfugié au Maroc avec son valet auprès de la tribu berbère d’Ouraba qui en a fait son roi. Après sa mort en 7926, le fils qui venait de naître de son épouse berbère Kenza fut proclamé nouveau roi sous le nom d’Idriss Il. C’est lui qui a fondé la ville de Fès et en a fait sa capitale administrative. Sous le règne des Idrissides, la ville de Fès a atteint une prospérité inégalée. Des mosquées prodigieuses et célébrissimes comme Al Quaraouiyine t Al Andalos y ont été érigées.
Les Idrissides, qui entre-temps étendirent leur pouvoir sur une grande partie du Maroc, ont été même proclamés califes de Cordoue au début du XIe siècle. Cependant, la division de l’Espagne a causé leur décadence et leur disparition en 1055. Après les Idrissides, ont régné sur le Maroc de nombreuses autres dynasties. Ainsi, les Almoravides7 d nastie berbère originaire du Sahara occidental, prir à un moment où le PAGF OF ville de Marrakech vers 1070 et en a fait sa capitale. C’est également lui quia 5. Ministère de la Communcation, 6.
Idriss 1er mourut empoisonné par Jarir Achammakh, prétendument envoyé du calife abbasside. L’empoisonneur qui avait pris la fuite après son méfait fut rattrapé et tué dans la région d’Oujda. 7. En arabe AI Morabitt (AI Morablttoun au pluriel). Le nom est susceptible de plusieurs interprétations. Ainsi, désigne-t-il les combattants qui ne cèdent pas leur position et repoussent courageusement les attaques ennemies; il désigne également les moines guerriers qui partagent leur temps entre la prière et la guerre sainte.
Il désigne également ceux qui, après la prière collective, ne sortent pas de la osquée et restent à y attendre la prochaine prière en s’occupant de lire le Saint Coran ou à faire le Dikr qui signifie « supplications » en arabe. VI. 3 + Culture et gestlon au Maroc assuré l’unification politique entre le Maroc et l’Espagne musulmane qu’il a étendue jusqu’à l’Èbre après sa victoire sur les troupes d’Alphonse VI. Les Almoravides ont été remplacés par les Almohades8, une autre dynastie berbère originaire du Haut Atlas qui a étendu son règne sur toute l’Afrique du Nord ainsi que sur toute l’Espagne musulmane.
Puis ce fut au tour des Mérinides – nom du bassin de la haute PAGF 7 OF la vallée du Draa, ont pris le pouvoir au XVIe siècle après fessoufflement des Mérinides. Ainsi en 1578, Ahmed Al Mansour, dit le Doré, a réussi à sauver le pays de l’invasion européenne après sa victoire à « la Bataille des trois rois » à la localité d’Oued El-Makhazine au nord du Maroc IO. C’est également lui qui a conquis Tombouctou au Mali d’où il a ramené or et esclaves augmentant ainsi la diversité ethnique de la population. Le règne d’Ahmed Al Mansour a pris fin 1 602.
Depuis le milieu du XVe siècle, le Maroc est sous le règne de la ynastie des Chérifiens Alaouites. Le fondateur et chef spirituel de la dynastie est Moulay Ali Chérif. Cependant, parmi les rois ayant marqué le plus le pays, Moulay Ismaël figure en position de tête. C’est lui, en fait, qui a étendu le règne des Alaouites jusqu’au Sénégal d’où il a ramené les soldats de son armée guich. Le fondateur de la ville de Meknès a consacré l’ouverture du Maroc sur l’étranger en établissant des relations diplomatiques avec des pays européens et en particulier avec la France et l’Angleterre.
Après la mort du glorieux défunt [Moulay Ismaël] en 1727, Sidi Mohamed Ben Abdallah (Mohamed Ill) lui succéda en 1757. Musulman fervent, fier de sa qualité de chérif, il ne songeait qu’à apporter au pays le repos et la paix. Aussi fut-il accueilli comme un homme providentiel et sa proclamation prit le caractère d’un véritable t investi du pouvoir, il PAGF commerce avec le Danemark, la Suède, l’Angleterre et les États-Unis, qui venaient de proclamer leur indépendance 11. . En arabe Al Mouahhid (Al Mouahhiddoun au pluriel). La traduction littérale du terme veut dire les « unificateurs Le mot désigne cependant les « monothéistes » sermonnant l’unicité de Dieu. g. Chérifiens ou Chorfas (en arabe) désignent les descendants du Prophète de l’Islam, Mohammed (pbAsl). Chez les Musulmans, chaque fois que le nom du prophète est prononcé, ils doivent dire : « Prière et bénédiction d’Allah sur lui. » Par abréviation, ils utilisent PbAsI. 10.
Forts de la reconquista et de l’expulsion des musulmans et juifs de l’Andalousie en 1492 ainsi que de leurs exploits dans le nouveau monde, les Espagnols, appuyés des Portugais et des troupes du Vatican, entreprirent d’envahir le Maroc. 11. Ministère de la Communication, http://vww. mincom. gov. ma/french/generalites/histoire/ 6 Cette politique d’ouverture sur les pays occidentaux fut cependant abandonnée du temps de Moulay Slimane. Ce dernier favorisa en effet le renforcement des relations avec l’Orient et la méfiance vis-à-vis des pays occidentaux.
Cependant, son soutien à la résistance algérienne et sa figure de proue, l’émir Abdelkader rovo ua une crise politique avec la France et, PAGF q OF imposés par la Grandegretagne, PEspagne et la France. L’endettement du pays auprès des banques étrangères a atteint un niveau tel que quatorze puissances europeennes réunies à Algésiras au sud de l’Espagne, instituèrent l’ouverture ommerciale du pays ou ce qu’il est convenu d’appeler « la porte ouverte ».
La France et l’Espagne instaurèrent un « protectorat » sur le Maroc en tant que mandataires des participants à la conférence d’Algésiras et envahirent le pays. Durant ce double protectorat qui a duré de 1912 à 1956, de nombreux Européens, surtout français et espagnols, ont définitivement élu domicile au Maroc contribuant davantage à l’approfondissement de la diversité culturelle de sa population. Qui plus est, la fameuse légion étrangère de l’armée française a amené au Maroc de nouveaux habitants de ays étrangers et en particulier des pays de l’Afrique de l’Ouest.
Aujourd’hui, le Maroc présente une société composite, où presque la moitié de la population parle le berbère, langue à l’intérieur de laquelle se distinguent trois sous-groupes : tarifit (Rif ), tamazight (Moyen Atlas) et tachelhit 12 (Haut, Anti-Atlas et Souss). La plupart des historiens s’accordent désormais pour reconnaître que, les conquérants arabes du IXe siècle ayant été peu nombreux, la très grande majorité des Marocains a du sang berbère. Ce qui ne signifie pas nécessairement qu’ils sont berbéro hanes (Ministère de la Communication).