Lecture Analytique – La mort de Phèdre
LA Phèdre: Au XVIIe siècle, le classiscisme domine la littérature. Cune des icônes de ce mouvement littéraire visant à éduquer la population est Jean Racine. Il se fait connaître notamment grâce à Phèdre, une nouvelle adaptation de la célèbre pièce de théâtre du dramaturge Euripide. L’extrait que nous étudierons est le dénouement ultime de l’œuvre, caracterisé par la mort de l’héroine, Phèdre. En quoi cette scène (de dénoument) est elle spectaculaire ?
Dans un premier temps, nous étudierons la présence d’un double-aveu effectué par Phèdre, puis nous nous pencherons sur e cadre tragique offert par la scène dans l’omniprésence de la mort qui enveloppe page l. Une scène de doub ave • A. Révélation des s Phèdre O) vers 7 : « C’est moi qui sur ce fils, chaste et respectueux, Osai jeter un oeil profane, incestueux » chiasme Ph avoue à Thésée ses penchants incestueux envers Hippolyte tout en prenant un ton tragique dans l’éloge de la vertu du défunt et le blâme de sa propre passion qui a eu raison de l’un comme de l’autre.
Elle se met tout d’abord dans une position de coupable. @ vers 1 : « Non, Thésée, il faut rompre un injuste silence; Il aut à votre fils rendre son innocence. » métaphore « rompre un silence » 0 le terme fort « rompre » indique un changement, une mutation de la situation, c’est ici qu’explicitement, Phèdre annonce qu’elle met un terme au secret de son i to next page inceste, mais aussi, et Implicitement, à sa vie. Et ici le terme « rompre » a un impact tel qu’il indique la détermination de Ph, puisqu’il est synonyme de « briser » qui s’accorde avec la colère, la violence. vers 3: « il n’était point coupable. » 0 Ph motive son discours par une phrase explicite sans détours dès le début de la scène afin de éculpabiliser H. Par cette phrase en prose (absence d’alexandrin et de rime logique avec les vers alentours) elle annonce son aveu. Q B. Phèdre en position de victime (thème de la malédiction) pathétique O) utilisation abondante de pronoms personnels venant de Phèdre : « mon », « ma », « mes », « me », « moi », « je », égocentrisme et égoiÉme de Ph. tout au long de la pièce qui subsiste jusqu’à ses derniers instants où elle se lamente sur son propre sort. vers 10: « la detestable Oenone a conduit tout le reste » adjectif péjoratif « detestable »+métaphore « conduire » C] Ph reporte âchement la faute sur quelqu’un qui n’est pas présent. Le verbe « conduire » ici prend toute sa signification puisque par définition il indique qu’Oenone etait à la tête de tout ça, comme si elle etait aux commandes de la mort d’Hippolyte et avait manigancé les faits. Ph insinue par là qu’Oenone s’est servie de la passion qui affaiblissait Ph pour diriger ces évenements malheureux, prenant tout en main. Ph se délecte de toute responsabilité de la calomnie. vers 9: « le ciel mit en mon sein une flamme funeste » métonymie du ciel s’attribuant aux dieux+ adjectif funeste ndiquant la m 2 sein une flamme funeste » — métonymie du ciel s’attribuant aux dieux+ adjectif funeste indiquant la mort en rupture avec le nom flamme qui réfère souvent à la vie (oxymore)/ vers 26 Ph cite une seconde fois « le ciel », et vers 17 « ma destinée » (forme passive) Ph rejette la faute sur les dieux, le destin, une force supérieure contre laquelle elle est impuissante, a laquelle elle attribue un verbe d’action (« mettre », par personnification puisqu’elle emploie le terme « ciel » comme sujet), qui aurait jetté son courroux contre sa destinée. Le terme « funeste » renvoyant vers le thème de la mort permet de renforcer le tragique de la situation et de s’apitoyer sur le triste sort de l’héroine éponyme. Ph subit l’action mais n’en est pas l’auteur. Elle se décrit comme la victime et plus la coupable. @ vers 13: ‘faiblesse extrême » hyperbole. C] En exagérant ses propos, elle se victimise, tentant de se délecter de toute culpabilité, se disculper, en abordant des circonstances atténuantes. ers 10+13 « la detestable Oenone »; « la perfide » / vers 16: « A cherché dans les flots un supplice trop doux. Ph qual’fie Oenone par des noms péjoratifs, voire insultants 0 Par le blâme de la défunte elle tente d’atténuer sa faute et de se soulager l’âme. Elle va jusqu’à l’extrême en déclarant implicitement qu’elle aurait préféré inculquer à Oenone une mort plus brutale, la faire souffrir plus. C. Révélation du suicide (î) vers 21-22: « j’ai pris, j’ai fait couler dans mes brûlantes veines Un poison que Médée apporta dan 3 21-22: « j’ai pris, j’ai fait couler dans mes brûlantes veines Un poison que Médée apporta dans Athènes. légère redondance ans l’utilisation successive de 2 verbes d’action ayant la même signification dans la phrase41itote (elle en dit moins pour faire entendre plus) L] Ses veines sont brûlantes à la fois à cause du poison qui est en train de « la refroidir », de la tuer progressivement et de sa passion pour H qui émane de son être, toujours présente (vers 17 le mot « few s’attribue à l’épée d’H avec laquelle elle avait pensé se donner la mort). L’allusion a médée rappelle la monstruosité qui la caractérise en se référant à Médée, mère homicide de Ph. @ vers 20: « Par un chemin plus lent descendre chez les morts. — périphrase du suicide par le poison (euphémisme, registre pathétique) D Phèdre envisage la mort comme le juste châtiment de leurs fautes • « Elle s’en est punie » « un supplice», c’est une justice compensatrice. Phèdre et Œnone se sont donc administrées elles-mêmes le châtiment qu’elles pensaient mériter. 6) vers 23-24: « Déjà jusqu’à mon coeur le venin parvenu Dans ce coeur expirant jette un froid inconnu. répétition du mot coeur+personnification (« coeur’ associé à l’adjectif « expirant’) + métaphore de la mort dans « froid inconnu » 11 Racine utilise le athétique par l’utilisation répétée du mot « coeur » de Ph puisque c’est ce coeur (synecdoque de Phèdre) qui est principale cause des tristes évènements par la démesure de l’amour qu »il » portait à H. Cest comme si avec son coeur, sa faute 4 évènements par la démesure de l’amour qu' »il » portait à H. C’est comme SI avec son coeur, sa faute pouvait « expirer ». Phèdre se lamente sur le sort qu’elle s’inflige par des termes pour parler de la mort tendant vers le tragique, la mort dont le « froid » donne un effet désagréable à celui qui en subit les effets. Il. Omniprésence de la mort dans un cadre tragique A.
Caractère mortel de l’aveu que Phèdre a retenu jusqu’au dernier moment (î) « flamme funeste « les morts », « poison », « supplice « venin « expirant « froid mort » champ lexical de la mort LI confère une ambiance funeste à la scène, en en annonçant le dénouement. Ph dresse le récit de son agonie. @ « les moments me sont chers » (v. 6); « par un chemin plus lent descendre chez les morts » (v. 20); « J’ai pris, j’ai fait couler dans mes brûlantes veines Un poison ; « et la mort, à mes yeux, dérobant la clarté » (v. 7)Û mort de plus en plus explicite avec une gradation, passage d’une mort implicite à une mort citée (un aveu de suicide brutal et bref). Cest une mort diffuse. ‘Autres morts évoqués : Oenone (v16) Hippolyte » ce qu reste « (V32-36) 4 référence à Médée , l’infanticide • l’Achéron ( descendre chez les morts) et les mânes d’Hippolyte = référence mythologique qui insistent sur le registre tragique par les morts successives d’Hippolyte, Oenone, et Phèdre par leur mauvais sort et l’injustice par laquelle H est tué @ vers 27 : « et la mort à mes yeux dérobant la clarté » ersonnifi S laquelle H est tué personnification de la mort la mort vient la chercher, ce n’est pas Ph qui se plonge dedans. La clarté de ses yeux se réfère sans doute à la faute qu’elle se rend compte avoir commise, aux péchés qu’elle vient d’avouer, qui l’ont libérée et qui ont éclairci sa vie passée. Phèdre se retire définitivement du côté de l’ombre et cesse de rechercher la lumière. B. Présence à la fois de la mort et du remord chez une héroïne qui s’abandonne, abandonnée elle même par les siens, consumée par la (flamme de la) passion, démesurée (hybris)
O) solitude de Ph : La fin de sa tirade s’apparente à un monologue ou un soliloque : à qui parle-t-elle? ni » tu » nl « vous ‘ + aveuglement progressif qui la coupe des humains et la fait ‘ descendre chez les morts » 0 isolée , retranchée des vivants et de la lumière @ Mort physique « brûlantes veines » (la passion) s’oppose « un froid inconnu » ( la mort) + cécité progressive (« Déjà je ne vois plus… » ) après la révélation de la vérité. + Rupture avec la bienséance car mort violente sur scène. @ vers 19-20 : « j’ai voulu, devant vous exposant mes remords, Par un chemin plus lent descendre chez les morts. » verbe « vouloiff qui exprime le désir de Ph de se donner la mort après s’être libérée du poids de ses fautes.
Le terme « remord », lui indique qu’elle est perpétuellement et de façon tragique dans le pêché bien qu’elle s’apprête à quitter le monde des vivants. @ Elle se tragique dans le pêché bien qu’elle s’apprête à quitter le monde des vivants. @ Elle se double de l’image récurrente de la flamme amoureuse et funeste à la fois : « flamme funeste », « un feu qui lui faisait horreur », « mes brûlantes veines qui s’oppose au froid et l’eau liés tous deux à la mort : la noyade d’Œnone et le froid inconnu jeté par le poison dans le corps de Phèdre. Elle rappelle sa volonté de se suicider avec l’épée d’Hippolyte : « Le fer aurait déjà tranché ma destinée » (V. 1 7). C.
Un tragique dénouement (î) « Et la mort, à mes yeux dérobant la clarté,’ Rend au jour qu’ils souillaient toute sa pureté »(+ antithèse pureté/souillure; euphémisme). Significativement, le dernier mot prononcé par Phèdre avant de mourir est « pureté ce qui révèle le caractère tragique d’un personnage épris de pureté et victime ‘un désir profane et incestueux. Phèdre appelle la mort depuis le début de la pièce, et la mort lui permet de se réconcilier avec son rêve de pureté comme le montrent les dernières paroles qu’elle prononce, sa mort joue à la fois le rôle de punition et de délivrance. @ par des points d’exclamation et «injuste famille » (v. 37) On découvre un Thésée outré, qui a honte.
Aucun pardon de sa part malgré le repentir (v30) + il ne la nomme jamais elle » 4 Panope (v29) et la sécheresse du constat » elle expire ‘ 6) peut alors, suite à ces drames et ces morts, par ce énouement tragique, s’établir un ordre nouveau, fondé non plus sur le silence ou la calomnie mais tragique, s’établir un ordre nouveau, fondé non plus sur le silence ou la calomnie mais sur la vérité (Thésée décide d’adopter Aricie « Que malgré les complots d’une injuste famille / Son amante aujourd’hui me tienne lieu de fille » ) afin de clore la pièce ultimement. Thésée pour la première fois cède à la tristesse et ne représente plus l’autorité dans sa tirade.