le juge administratif et les traités internationaux

essay A

« Le juge administratif et les traités internationaux » (Corrigé de dissertation – TD na4 – Novembre 2013) Plan : l) L’application des traités internationaux par le juge administratif A) L’émergence du contrôle de la conformité de la loi aux traités internationaux par le juge administratif B) L’invocabilité des dispositions des traités internationaux devant le juge administratif Il) L’influence grandissante du droit international dans la jurisprudence du jug A) L’influence de l’arti administratif 1) Le contrôle de la r 2) La séparation des Conseil d’État or 19 Sni* to View ice du juge nationaux t contentieuses du 3) L’artlcle 6-1 CESDH et la mutation du commissalre du gouvernement. B) Le juge administratif et la responsabilité du fait des conventions internationales L’article 26 de la Constitution de 1946 énonçait que « les traités diplomatiques régulièrement ratifiés et publiés ont force de loi dans le cas où ils seraient contraires à des lois françaises ».

Grâce à cet article, la France a pu se dégager de l’ « anomalie » d’après laquelle l’administration française se trouvait liée aux engagements internationaux par une seule « obligation naturelle » U. Waline, Droit administratif, Dalloz, 201 2, point 289). L’article 55 de la Constitution de la Ve République dispose article, le pouvoir constituant a intégré le droit international dans l’ordre normatif national. La lettre de l’article 55 de la Constitution se limite aux traités. Il ne vise pas la coutume internationale ou les principes généraux du droit international, soit autant de sources du droit international visées par l’article 38 du statut de la CIJ. Dès lors, la coutume internationale reçoit un traitement différent en droit interne de celui accordé aux traités.

Dans son arrêt Aquarone du 6 juin 1 997, e Conseil d’État a pu énoncer, au regard de la lettre de Farticle 55 précité, « que ni cet article ni aucune autre disposition de valeur constitutionnelle ne prescrit ni n’implique que le juge administratif fasse prévaloir la coutume internationale sur la loi en cas de conflit entre ces deux normes » (sur la question, voir B. Stirn, La place de la coutume internationale en droit public français, conseil-etat. fr, 21 septembre 2012 et CE, 14 octobre 2011, Mme Saleh). Malgré la place importante qu’occupe la coutume dans l’élaboration du droit international, celle-ci se trouve reléguée ? n rang infra-législatif. Ce traitement de la coutume internationale par le juge administratif laisse pressentir un certain hermétisme du juge administratif face au droit international. D’autant plus que, comme le relève B.

Stirn, « le quatorzième alinéa du Préambule de la constitution du 27 octobre 1946 aux termes duquel « la République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public international » » (B. Stirn, op. cit. ). Toutefois, il convient de relever l’importance donnée par le Conseil d’État à la primauté du texte constitutionnel pour omprendre le traitement particulier des trait d’État à la primauté du texte constitutionnel pour comprendre le traitement particulier des traités Internationaux. Comme le rappelait le président Sauvé, « Les juridictions nationales n’ont pu qu’affirmer la suprématie de la Constitution dans l’ordre interne : la Constitution reste la norme suprême dans l’ordre juridique interne, comme cela résulte des jurisprudences tant administrative que judiciaire et constitutionnelle. » (J. -M.

Sauvé, Intervention au colloque organisé par la CEDECE, conseil etat. fr, 27 juin 2008. Référence est faite par l’auteur aux arrêts u Conseil d’État, Sarran du 30 octobre 1998 et Syndicat national des industries pharmaceutiques du 3 décembre 2001 ainsi qu’? Conseil constitutionnel, Décision nD2004-505 DC du 19 novembre 2004, Traité établissant une Constitution pour l’Europe). La lettre constitutionnelle impose la soumission de la loi à la norme conventionnelle. Ce qui ouvre sur la question du contrôle de conventionnalité, soit du contrôle de la conformité de la loi ou des textes de valeur infra-législative aux traités internationaux.

Du traitement de cette question par les juridictions et notamment ar le juge administratif dépend la cohérence de l’ordre juridique national, condition de sa stabilité et de la sécurité juridique de ses sujets. Historiquement, le juge administratif tire son existence de la loi. Son existence a été reconnue à un niveau supra-législatif en 1987 par la décision du Conseil constitutionnel n086-224 DC du 23 janvier 1987. Cette décision permet d’envisager un dépassement de la déférence législative du Conseil d’État pour aborder avec confiance l’environnement des normes supra-législatives, au titre desquelles figurent les traités onfiance Penvironnement des normes supra-législatives, au titre desquelles figurent les traités internationaux.

Hasard du calendrier ou prise de conscience réelle, ce n’est qu’après cette déclsion et par le fameux arrêt Nicolo du 20 octobre 1989 que le juge administratif a décliné les implications de la valeur supra- législative des traites internationaux : à compter de cet arrêt, le juge administratif s’est exercé au contrôle de conventionnalité de la loi, quand bien même serait-elle postérieure à la norme internationale de référence. Mais la relation du juge administratif ux traités internationaux ne s’arrête pas à un arrêt. Elle ne cesse d’ailleurs d’interroger : de l’arrêt Nicolo jusqu’à nos jours, comment le juge administratif a-t-il procédé à l’assimilation des traités internationaux ?

Malgré une évolution réelle dans le traitement de la norme internationale, le juge administratif a souvent donné l’impression qu’il ne procédait à l’intégration des traités internationaux qu’ « à reculons La relation entre le juge administratif et les traités internationaux serait celle d’une lente assimilation de ces derniers par le juge administratif. Pour prendre la mesure de ce phénomène, il faut prendre en compte la dualité de la relation qui lie le juge administratif aux traités internationaux. Alors qu’il est chargé de veiller à leur bonne appllcation il s’y trouve aussi soumis dans son fonctionnement propre (Il). Le droit des Communautés puis de l’Union européenne et le droit issu de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et du citoyen (CESDH) ont respectivement marqué les différentes étapes de cette double évolution. le partie : L’application des traités marqué les différentes étapes de cette double évolution. Partie : L’application des traités internationaux par le juge administratif L’évolution de l’application des traités internationaux par le juge administratif s’est faite pour beaucoup à travers la réception par le juge administratif du droit de l’Union européenne. Au fil de nombreuses affaires mettant en question la validité d’actes de nature législative au regard d’actes issus du droit dérivé ou du droit primaire des Communautés puis de l’Union européenne, le juge administratif a fait évoluer sa relation au droit international (A). Mais pour articuler et éventuellement contrôler les actes e l’administration au regard des traités internationaux, encore faut-il que leurs dispositions soient invocables près le juge administratif, un préalable qui faisait encore très récemment l’objet d’une évolution (B).

A) Cémergence du contrôle de la conformité de la loi aux traités La chose est désormais connue, dans sa décision IVG du 15 janvier 1975, le Conseil constitutionnel a refusé de procéder au contrôle de conventionnalité de la loi, laissant ainsi cet office aux juridictions judiciaires et administratives. Les traités internationaux se distingueraient de la Constitution par leur aractère contingent et relatif. Cette formulation malheureuse a par la suite été abandonnée, car tout à fait impropre, surtout lorsqu’est en cause la CESDH, comme c’était le cas en 1975. Mais la solution de principe demeure (voir dernièrement la décision 2012-654 DC du 9 août 2012, considérant 58). ette solution a d’ailleurs été étendue au contrôle a posteriori de constitutionnalité (voir par exemple, décis PAGF s OF lg d’ailleurs été étendue au contrôle a posteriori de constitutionnalité (voir par exemple, décision 2011-217 QPC, 3 février 201 2, considérant 3). eu de temps après la décision IVG du Conseil constitutionnel, la Cour de cassation a répondu à l’appel du Conseil constitutionnel dans sa décision Jacques Vabres de la même année. La Cour de cassation y reconnaît sa compétence pour exercer un contrôle de conventionnalité de la lai postérieure à l’entrée en vigueur du traité mis en cause, à savoir le traité instituant la Communauté économique européenne. Jusqu’à sa décision Nicolo du 20 octobre 1989, le Conseil d’État refusait d’exercer un tel contrôle, et ce dans la lignée de l’arrêt du 1er mars 1968, Syndicat général des fabricants de semoule e France.

Dans cette affaire, était directement mise en cause la contrariété d’une ordonnance, à valeur législative, avec un acte dit conventionnel, le règlement dit « no 19 » adopté par la Communauté économique européenne. L’acte européen étant antérieur à l’ordonnance en question, tout comme l’était le traité instituant la Communauté économique européenne elle-même, il n’y avait pas lieu pour le Conseil d’État de contrôler la conformité de la loi au droit conventionnel ici mis en cause. Avant l’arrêt Nicola, le Conseil d’État admettait toutefois l’invocabilité « par les articuliers devant les juridictions administratives » (GAJA, 17ème édition, Nicolo, point 9), en vue du contrôle de la conventionnalité des actes administratifs (CE Ass. 30 mai 1952, Dame Kirkwood), et la prévalence des traités sur les lois qui leur étaient antérieures (CE, 15 mars 1972, Dame veuve sadok Ali). L’arrêt Nicolo intervient lui aussi dans le contexte de la construction c Dame Veuve Sadok Ali). construction communautaire. Le juge administratif devait apprécier la conformité avec le traité instituant la Communauté économique européenne d’une loi de 1977 « relative ? ‘élection des représentants à l’assemblée des communautés européennes b. L’arrêt Boisdet du 24 septembre 1990 a ensuite « affirmé la priorité des règlements communautaires sur les lais nationales » (GAJA 17ème édition, 11093-12).

Concernant le droit dérivé des Communautés puis de l’Union européennes, il faut préciser que les directives, décisions et règlements de l’Union européenne tirent leur force du droit prlmaire, soit des traltés ayant institué les Communautés puls l’Union européenne. À ce titre, on devra évoquer factuel article 288 du traité sur le onctionnement de l’Union européenne, ancien article 249 du traité instituant la Communauté européenne. Aux termes des alinéas 2 et 3 de cet article « Le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout État membre. / La directive lie tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en lalssant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens. ? L’effet contraignant de cette disposition est notamment assuré par le biais du contrôle de la Cour de justice de l’Union uropéenne (anciennement Cour de justice des Communautés européennes) et l’accès au juge de droit commun du droit de l’Union européenne qu’est le juge national, dont le juge administratif. D’après l’arrêt Francovitch, rendu par la Cour de justice des Communautés européennes le 19 novembre 1991, « le prlncipe de la rendu par la Cour de justice des Communautés européennes le 19 novembre 1991, « le principe de la responsabilité de l’État pour des dommages causés aux particuliers par des violations du droit communautaire qui lui sont imputables est Inhérent au système du traité. ? (considérant 35 de l’arrêt, aff. C-6 et 9/90). Les États membres sont donc dans l’obligation de réparer les dommages causés par la violation, par exemple du fait de l’administration, du droit de l’Union. M.

Waline rappelle que par la suite, le Conseil d’État a reconnu l’engagement de la responsabilité de l’État du fait d’une « violation manifeste du droit communautaire ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers Référence est faite par l’auteur à CE 18 juin 2008, Gestas (J. Waline, op. cit. , point 296). On citera aussi l’arrêt Rothmans rendu par le Conseil d’État le 28 évrier 1992. Dans cette affaire, le Conseil d’État devait considérer qu’un acte administratif pris en application d’une loi du 24 mai 1976 était contraire à un acte antérieur de droit dérivé de la Communauté économique européenne, une directive du 19 décembre 1972, et tel qu’interprétée par la Cour de justice des Communautés européennes dans deux arrêts des 21 juin 1983 et 13 juillet 1988.

Les auteurs du GAJA (1 7ème édition, nD89-9) relèvent que, par cet arrêt, « le Conseil d’État a accepté d’écarter l’application d’une disposition législative incompatible avec une irective antérieure, une fois passé le délai de transposition et d’en tirer comme conséquence que la responsabilité de l’État pouvait être engagée à raison de l’intervention d’un acte réglementaire pris sur le fondement d’une loi inapplicable du fait de son incompatibilité avec de son incompatibilité avec les objectifs d’une directive ». Au sens de parrêt GISTI du 23 avril 1997, seules les dispositions des traités internationaux dotées d’effet direct peuvent être invoquées utilement devant le juge administratif, que ce soit pour « annul[er] un acte administratif ou écart[er] l’application d’une loi u d’un acte administratif incompatibles avec la norme juridique qu’elles contiennent, dès lors qu’elles créent des droits dont les particuliers peuvent directement se prévaloir Cet état du droit est rappelé dans un autre arrêt GISTI du 11 avril 2012, le Conseil d’État a précisé son approche de Peffet direct.

Dans cette dernière affaire, il s’agissait d’examiner la compatibilité du décret n02008-908 « relatif aux conditions de permanence de la résidence des bénéficiaires du droit à un logement décent et indépendant » avec l’article 6 de « la convention nternationale du travail n097 du 1er juillet 1949 concernant les travailleurs migrants » (A. Levade, Effet direct des conventions internationales : quand le droit de l’Union européenne inspire le Conseil d’État, Constitutions, 2012, p. 297). Comme l’expose le rapporteur public et le relève A. evade, la méthodologie ici dégagée est exclusive du droit primaire de l’Union européenne « « dont les particularités ne lui permettent plus d’être entièrement assimilé au droit international général » (concl- G. Dumortier, p. 6).

Le Conseil d’État en prend acte en réservant les cas où est en cause un traité pour lequel la Cour de justice de l’Union européenne dis PAGF lg réservant les « cas où est en cause un traité pour lequel la Cour de Justice de l’Union européenne dispose d’une compétence exclusive pour déterminer s’il est d’effet direct » (consid. 3). Où l’on voit que la spécificité du droit de l’Union est de nouveau affirmée ! » (Levade, op. cit. ) Or, le rapporteur public prend appui sur l’expérience acquise en matière d’effet direct du droit de l’Union européenne pour préciser les conditions de l’effet direct des dispositions contenues dans un acte conventionnel.

Il en ressort qu’ « une stipulation doit être reconnue d’effet direct par le juge administratif lorsque, eu égard à Vintention exprimée des parties et à l’économie générale du traité invoqué, ainsi qu’à son contenu et à ses termes, elle n’a pas pour objet exclusif de régir les relations entre États et ne requiert l’intervention d’aucun acte complémentaire pour produire des effets à l’égard des particuliers ; que l’absence de tels effets ne saurait être déduite de la seule circonstance que la stipulation désigne les États parties comme sujets de l’obligation qu’elle définit Au regard de cette même affaire, Y. Aguila (« L’effet direct des conventions internationales : une nouvelle grille d’analyse AIDA, 201 2, p. 729) suit cependant le rapporteur public dans l’encouragement fat au Conseil d’État et laissé sans suite de distinguer l’effet direct des autres modes d’invocabilité du droit international. Dans ce sens, la Cour de justice de l’Union européenne a souvent eu l’occasion de préciser qu’une disposition, quand bien même dépourvue d’effet direct, pouvait se voir reconnaitre une portée juridique » (Y. Aguila, op. cit. ) et ce, notamment par le jeu de l’interprétation confo