La Strategie Art Ou Science
La Strategie:un Art ou une Science? L’amateur de lecture a souvent du mal à se faire une idée nette et précise en ce qui concerne un certain nombre de concepts qui pourtant sont largement utilisés dans les médias et la littérature de masse en général. Au titre de ces concepts aux contours nébuleux nous pouvons citer celui de stratégie. Il. ‘est, en effet, qu’à consulter deux ou trois dictionnaires de langue pour se rendre compte combien les définitions qui en sont proposées sont imprécises et, par conséquent, déroutantes. Après un retour à l’étymologie du terme (ou stratos signifie, n grec, armée; et agein, dans la même langue, conduire) les différentes sources s’ le contraire de la tact e, or 18 sur deux berges opp es. Sni* to View opposé ou politique concorde absolumen du concept statégie. que la stratégie est ncepts se situent e la stratégique est bien entendu, ne réelle et objective Il importe de signaler ici qu’une des raisons princopales de ce phénomène découle de l’histoire de la stratégie elle-même, qui a connu un grand nombre de conceptions différentes à travers les âges, et d’acceptions revêtant dans chaque aire géo-politique une signification différente. Car la stratégie, en tant qu’art militaire de la guerre, a varié selon les peuples, relativement à leur conception du Soi, du Nous et de l’Autre, comme le disent si bien les sociologues de la connaissance.
Si bien qu’il n’y a jamais eu, au nive Swipe to vlew next page niveau de la vie pratique, d’application uniforme et unifiée de la stratégie pour que ce dernier concept puisse donner naissance, dans la tête des théoriciens, à un concept unique. Ce qui a également joué en défaveur d’une définition unique de la stratégie est le fait que depuis le début du vingtième siècle ce erme n’est plus l’apanage du seul domaine militaire, puisqu’il est souvent question – et a juste titre d’ailleurs – de stratégie politique, économique ou même encore médiatique de telle ou telle puissance.
Pourtant, tout cela n’aura qu’un seul résultat: celui de nous prouves la vitalité de ce concept, de même que son importance de plus en plus grande dans la vie des sociétés contemporaines. La stratégie ne se situe plus sur les seuls champs de bataille, aujourd’hui, mais à tous les niveaux de notre vie citoyenne. Elle s’est déplacée de domaine militaire pur, pour s’introduire dans eux de notre vie pratique quotidienne, car son en jeu n’est plus militaire, mais de plus en plus politique, économique et culturel.
Où se situe le tournant principal du concept de stratégie? Il nous semble que soit avec l’avènement des guerres napoléoniennes que le changement interne ait été opéré sur ce concept d’origine militaire, aujourd’hui largement globalisé. Mais avant de développer le processus suivi par le terme stratégie au cours des âges, revenons un moment sur celui de tactique – qui s’est beaucoup mieux conservé dans son acception militaire soit dit en passant.
Le général et théoricien prussien Carl Von Clavsewitz discerne la nuance suivante: « La tactique, dit-il, est l’emploi des forces armées dans le 18 Clavsewitz discerne la nuance suivante: « La tactique, dit-il, est l’emploi des forces armées dans le combat; la stratégie est l’emploi du combat en vue de la fin ultime de la guerre ». (l) Cette mise au point de la part d’un praticien de la guerre est fort utile, puisqu’elle nous permet de mettre un terme à la fausse dualité dans laquelle est généralement placée la relation entre la tactique et la stratégie.
Les deux piliers de la science de la uerre et des combats se complètent donc, et il est rare, après les guerres napoléoniennes, de rencontres de guerre tactique, sans stratégie, ou de guerre stratégique, sans tactique, ces deux éléments étant devenus inséparables et la stratégie ayant débordé le plan militaire pour rejoindre celui de l’économie et celui de la politique, voire même celui de la culture et de l’information. Comment en est-on arrivé là?
Comment la distance a-t-elle pu s’estomper entre la tactique et la stratégie d’une part, et comment la stratégie a-t-elle acquis ce caractère de globalité ui la caractérise aujourd’hui? Un retour aux expériences du passé s’avère ici necessaire, en vue de faire la part des choses et de saisir l’évolution de ce concept-clé de la vie des sociétés modernes, pourtant âgé de plusieurs milliers d’années. I – La Stratégie dans le Monde Ancien Dans le Monde Ancien, la stratégie a rarement dépassé le cadre des commandants d’armée, appelés stratéges.
C’etait un art au sewice de dirigeants militaires ayant en charge la responsabilité d’armées imposantes. Cet art, fort personnalisé, visait à la satisfaction des aspirations géo-militaires du commandant-st ersonnalisé, visait à la satisfaction des aspirations géo-militaires du commandant-stratège. La stratégie avait alors pour but essentiel la conquête de territoires se situant en dehors et loin des frontières du peuple inpliqué par son dirigeant dans la guerre.
C’est le cas des Grecs avec Alexandre le Grand, des Carthaginois avec Hannibal, des Romains avec Jules César et des Tatares avec Genkis Khan, pour ne citer que les cas les plus connus. Nous reviendrons tout de suite sur ces cas, mais, avant de pousser plus loin notre analyse, il importe de signaler que dans le Monde Ancien nombreux sont les peuples, en Asie et en Afrique notamment, qui n’ont pas produit de stratèges, se contentant de vivre au rythme des nécessités de leur auto-suffisance biologique. Au titre de ces peuples nous pouvons citer, à titre d’exemple, les Arabes de la Période Pré-lslamique (La Jihiliyya).
Ainsi, le chroniqueur arabe Aboul Fadl AL-MAYDANI – 1124) nous découvre dans son ouvrage Ayyâm al-Arab fil Jahiliyya un aspect inédit de la vie des peuplades arabes de la Presqu’île Arabique. Leurs conflits militaires opposaient essentiellement des clans et des tribus, et était totalement dépourvus de stratégie. Il s’agissait tout au plus de tactiques de combat entre cavaliers plus ou moins nombreux. Les Arabes donnaient à ces conflits le nom de ayy’âm, qui signifie journées, vu que dans l’optique des gens de l’époque on nommait une guerre par le jour où elle se terminait.
Certaines duraient plusieurs jours ou plusieurs semaines, d’autres plusieurs mois ou plusieurs années. Mais on les nommait toutes, invariablement, des 8 plusieurs mois ou plusieurs années. Mais on les nommait toutes, invariablement, des ayyâm, des journées. Or cette terminologie est significative, car la guerre était conçue ans l’espace. Le temps n’y représentait aucune valeur spécifique, perçu dans sa dimension infinie et p ate. C’est ainsi que AL-MAYDANI nous rapporte le nom de 131 guerres, inter-arabes dans leur totalité, ayant eu lieu durant la Jahiliyya.
Il est à la fois curieux et intéressant de noter que ces guerres ponctuelles et inter-claniques, menées sous le signe de la tactique, étaient totalement dépourvues de relever les faits suivants: 34% désignaient une colline, une vallée, une plaine festile ou des espaces verdoyants. désignaient des points d’eau. désignaient le nom de la tribu victorieuse. ésignaient une ville ou un village. désignaient des chevaux ou des chameaux. désignaient des noms propres. désignaient des emplacements sur la route rattachant La Mecque à Médine. % désignaient des qualités. désignait le désert. Le foyer principal des guerres de cette période se situe donc au niveau des pâturages et des points deau. L’instinct de suivre accapare l’essentiel de la pensée militaire. Cest pourquoi donc l’espace prime et le temps est absent. Dans la course ? la survie de la tribu, seuls entrent en jeu les facteurs matériels de l’existence. Et ses supports immédiats (les points d’eau, es collines, les vallées, les espaces verdoyants) accaparrent la dynamique de la guerre dans sa globalité.
Ce type de guerre sans idée, et par conséquent sans stratégie, se situe aux antipodes d’un autre expérience vécue par c PAGF s 8 idée, et par conséquent sans stratégie, se situe aux antipodes d’un autre expérience vécue par ce même Monde Ancien, par des hommes tel qu’Alexandre le Grand (356 – 323 avant J. -C. ), dont le nom est profondément incrusté dans Phistoire pour l’expérience typique qu’il a engendrée. Désireux d’étendre sa zone d’influence géo-militaire, le jeune oi de Macédoine part en guerre contre l’empire achéméni de de Perse à partir de l’année 334.
Il s’est assuré la loyauté des généraux grecs demeurés dans le pays avant de partir en direction des lointaines contrées de l’Est A la bataille de Issos (novembre 333), les Grecs battent Farmée perse dirigée par Darius en personne et cinquante fois plus nombreuse que l’armée grecque. par une attaque obllque, ? la macédonienne de [‘infanterie grecque, combinée avec une attaque sur le flanc gauche par la cavalerie dirigée par Alexandre en personne, la bataille est emportée et l’armée perse décimée.
A fin d’assurer ses arrières, Alexandre entreprend ensuite de contrôler la côte méditerranéenne (Byblos, Beyrouth, Sidon, Tyr et Gaza) pour livres bataille de nouveau à Gaugamèles à Darius III qui avait rassemblé un armée redoutable de 300. 000 hommes environ. Après une nouvelle victoire, Alexandre se trouve en possensslon de l’empire perse. Quelques temps après, à la tête d’une troupe de 40. 000 hommes, il se dirige vers les montagnes de l’Afghanistan avant de pénétrer en Inde où il vaincra le roi Parus sur les berges du fleuve Hydaspe. C’est là que ses hommes (dont il ne reste plus que 25. 0 hommes) refusent de poursuivre la conquête de l’Asie. Le chef grec n’a plus al 6 8 plus que 25. 000 hommes) refusent de poursuivre la conquête de l’Asie. Le chef grec n’a plus alors qu’un seul choix: il retourne ? Babylone où, quelques temps après, il meurt. Son art de condulre les batailles militaires fut très personnel. La bravoure y jouait un rôle aussi important que la logique (il ne faut pas oublier qu’Alexandre fut rélève dAristole). Mais il demeure, en définitive, que sa conception de la stratégie sera dépouwue de profondeur politique.
Il s’agissait d’élargir les frontières de ’empire grec par la force militaire, à partir d’un rêve plutôt qu’à partir d’un projet aux contours bien définis. Si bien que lorsque les soldats grecs furent lassés de ces combats (pourtant victorieux) sans fin, ils coupèrent l’herbe sous le pied de leur chef et le contragnirent à retourner à Baby Ione. Il en fut de même pour Hannibal (247 – 183 avant J. -C. ) qui, malgré ses qualités de stratège militaire, n’avait à proposer à ses hommes et alliés qu’un projet géo-militaire où la politique avait peu de place.
Le génie du chef carthaginois fut de portes la guerre contre les Romains sur le continent européen. A partir de l’Espagne puis de la Gaule, Hannibal se rapprochait dangereusement ainsi de la cap ‘tale de ses ennemis, préférant les batailles terrestres aux combats maritimes. Après avoir franchi avec difficulté les Pyrénées mais surtout les Alpes, son armée aboutit en Italie où il évitera de fondre sur Rome, laissant ainsi à ses ennemis de longues années pour contre-attaquer.
Sur le plan de la stratégie militaire, Hannibal fera preuve de qualités de géographe à chaque bataille, ne livrant combat con 7 8 stratégie militaire, Hannibal fera preuve de qualités de géographe ? chaque bataille, ne livrant combat contre son ennemi qu’après l’avoir obligé à s’engager dans un vallon ou bien après avoir coupé ses arrières, Les manoeuvres des troupes du commandant carthaginois mettent constamment à profit le relief du terrain et contournent l’ennemi avant de fondre sur lui.
C’est ce qui s’est passé en Espagne, en Gaule, mais surtout lors de la bataille du 2 août 216, sur les bords de l’Ofento, en Italie, où 20. 000 carthaginois vinrent à bout de 65. 000 romains. Jules César (101 -44 avant J. -C. ) par contre se distingue relativement de cette vision de l’art militaire, typique des temps nciens. La stratégie verra avec lui un début de politisation. Cette dernière démarche se fera toutefois dans le profit personnel du stratège Jules César et non dans celui de l’empire qu’il représente.
Car après avoir vaincu les Gaulois et les Germains (entre 58 et 52), notamment à la bataille d’Alésia où il fait prisonnier Vercingétorix, le chef des Gaulois, le voilà qui se retrouve, avec son armée, contre l’empire romain lui-même, en l’année 50. A cette date-là, il franchit le Rubicon pour livres combat à un autre chef d’armée romain, Pompée, en vue de devenir empereur lui-même.
Après avoir mis à profit l’organisation et la discipline de fer dans son armée et largement compté sur la division de ses ennemis ainsi que sur l’effet de surprise dans ses combats contre les Gaulois et les Germains, voilà Jules César qui applique les mêmes tactiques contre ses propres frères d’armes, dans le cadre de ce que nous pouvons nommer sans 8 contre ses propres frères d’armes, dans le cadre de ce que nous pouvons nommer sans hésitation une guerre civile.
C’est d’ailleurs le titre que Jules César donne à un de ses écrits les plus connus. La fin ultime de la guerre et son but se confondaient avec le rojet personnel de Jules César dont la stratégie militaire n’avait dautre dessein que servir de tremplin à ses aspirations politiques propres. Si bien que nous pouvons dire que la conception traditionnelle et ancienne de la stratégie n’a nullement évolué.
Elle est demeurée dans le giron des capacités militaires d’un chef hors du commun, poursuivant un projet aux dimensions limitées, impliquant son propre pouvoir et cherchant à instituer ou a asseoir sa propre dynastie. La stratégie était ainsi comprise, essentiellement, dans sa dimension géo-militaire. e politique n’y tenait de place que dans a mesure où il assurait un bénéfice direct au stratège lui-même. C’est pour cette raison donc que la stratégie du Monde Ancien n’a jamais pu s’élever jusqu’au niveau d’une science, préférant demeurer un art manié avec dextérité par un génie.
Il La stratégie à l’époque médiévale en Europe La guerre de Cent Ans qui a, en fait, duré cent seize ans (1337 – 1453), est une guerre interne européenne, issue du conflit opposant les représentants de la double monarchie franco- anglaise. Le conflit dynastique entre les deux Couronnes, doublé d’une dimension féodale, remonte au mariage d’Henri Plantagenêt avec Aliénor d’Aquitaine, répudiée par le roi de France Louis VII en 1 152.
Or, en 1 1 53, Henri Plantagenêt devient roi d’Angleterre; ce qui signifiait qu’il était PAGF 18 qui signifiait qu’il était désormais – dans le cadre géo-militaire de l’époque – plus puissant que le roi de france. Cela ne Pempêchait pas d’en demeurer le vassal pour un certain nombre de fiefs (la Normandie, le Maine, l’Anjou, L’Aunis et surtout la prospère Guyenne). Ce qui était fort incommodant et allait servir de base au long conflit, de type féodal, entre les deux pays, car la guerre llait bientôt traverser les lignages féodaux et dynastiques communs aux deux pays.
Il s’agira donc là d’une guerre à stratégie féodale, basée sur les sièges de places-fortes et surtout sur les chevauchées. Une guerre qui sera chèrement payée par la paysannerie française. La noblesse déclarait la guerre (la « guerre du roi » comme on le disalt si bien à ‘époque) et le peuple n’avait d’autre choix que de la suivre. La vision du monde prévalant à l’époque ne permettait pas une remise en question de ce principe et l » glise lui offrait même sa bénédiction par son concept de « la guerre
Il était hors de question que le peuple participe, en tant que personne politique ou morale indépendante à la guerre juste dont seuls les souverains avaient le privilège. Par contre, le peuple ployait sous les devoirs, puisqu’il devait la financer et lui servir de main-d’œuvre gratuite. D’ailleurs, le célèbre mot d’ordre lancé par Charles V, roi de France, en 1359, et repris par toute la noblesse (« Mieux vaut pays pillé que terre perdue » révèle à quel point le cynisme politique de la noblesse était grand. Les armées anglaises entreprenaient alors des :chevauchées »