cours sur l’attention
Synthèse Attention et vieillissement ERIC SIEROFFI , AMBRE PIQUARD2 Laboratoire de psychologie expérimentale, Université Paris V / CNRS 2 Fédération de neurologie Mazarin, Hôpital de I Tirés à part Éric. Siéroff Résumé. Grâce aux a Sni* to View meilleure description des troubles de l’attention qui sont observés au cours du vieillissement normal et des pathologies qui lui sont associées a vu le jour ces dix à vingt dernières années.
Dans cet article, nous présentons ces troubles dans le cadre de la théorie de Posner, qui distingue les sous-systèmes de vigilance, ‘attention sélective et de commande attentionnelle. L’intérêt de cette théorie est de caractériser les principales composantes de l’attention par leur aspect fonctionnel cognitif et par leur soubassement anatomique et neurochimique. Les tests explorant l’attention peuvent être classés par rapport à ces trois sous-systèmes.
Ainsi nous décrivons les principaux résultats concernant la baisse de la commande attentionnelle lors du vieillissement normal associated With normal or pathological aging has substantially improved. ln this article, attentional deficits are presented according to Posner theory, which escribes three sub-systems ln a global network of attention: vigilance, selective attention, command. This theory not only characterizes the functions of these subsystems, but gives precise indications about their anatomical and neurochemical substrates.
Several clinical tests can be described for each of these different subsystems. The main attentional deficits are presented in the second part ofthis paper: if some decline of the attentional command occurs in normal aging, a real deficit in this subsystem is found in most degenerative processes (frontotemporal dementia, Alzheimer and Parkinson diseases). Alzheimer disease is also frequently associated With a deficit of selective spatial attention, early in the evalution of the disease.
Key words: attention, normal aging, Alzheimer disease, frontotemporal dementia, Parkinson disease attention est une composante importante de notre comportement. Elle est incluse dans ce qu’on appelle désormais les fonctions exécutives puisqu’elle assure une fonction de contrôle. Avec l’attention, l’individu peut développer une action appropriée à une situation donnée, c’est-à-dire prendre une décision. Cette décision est le résultat d’une analyse, d’une éflexion, d’une stratégie.
Plusieurs modèles de l’attention ont vu le jour ces vingt dernières années : ils insistent tous sur ces notions de contrôle et reconnaissent, pour la plu e d’un système 8 des différences quant au découpage en composantes au soussystèmes ou quant à la dynamique des processus attentionnels dans le traitement de l’information. Ces modèles considèrent parfois la vigilance comme une composante de l’attention, mais elle reste délicate ? définir : elle correspond pour certains à l’alerte, qui est une mise en disponibilité des ressources globales (non sychol Neuropsychiatr Vieillissement 2004 ; vol. , no 4 : 257-69 sélectives) de l’individu, et, pour d’autres , à Yattention soutenue qui permet d’effectuer des tâches qui se prolongent. Nous ne rentrerons toutefois pas dans le débat sur la nature exacte de la vigilance. Dans cet article, nous présenterons en premier lieu l’attention comme une fonction psychologique, avec des questions propres à la fonction attentionnelle. Nous présenterons ensuite les principaux types d’expériences qui permettent de mettre en jeu l’attention et d’en mesurer les effets.
De ces expériences ont pu être érivés des tests qui sont utilisés en pathologie, notamment neuropsychologique, mais aussi dans d’autres domaines comme le développement, le vieillissement, l’ergonomie, etc. Après ce tour d’horizon rapide et succinct des aspects fonctionnels de l’attention, les notions anatomiques et neuronales seront abordées, permettant de décrire les mécanismes cérébraux de contrôle. Dans les dernières sections de cet article seront présentés les effets du vieillissement sur ratten- 257 E. Siéroff, A.
Piquard tion, tout d’abord le vieillis PAGF 3 8 al, puis les patholoeies autres). L’attention, fonction sychologique de contrôle Une définition opérationnelle de l’attention Presque tous les ouvrages ou les articles sur l’attention se réfèrent à la définition donnée en 1 890 par William James, psychologue et physiologiste américain. Selon lui, rattention est liée à l’expérience consciente de l’individu : l’attention est la sélection d’une information extérieure ou d’une pensée sous une forme claire et précise et son maintien dans la conscience.
C’est la concentration de l’activité mentale sur un objet déterminé (en latin, attentio = tension de l’esprit vers un objet). L’objet de l’attention, c’est-à-dire le contenu du foyer attentionnel, va, selon LaBerge [1] emplir l’esprit (mindfulness). L’état attentionnel se distingue donc du simple état d’éveil par « l’objet » qu’il permet de sélectionner. La sélection est rendue nécessaire dans la mesure où l’individu est confronté simultanément à une multitude d’informations potentiellement intéressantes.
Ainsi, nous ne pouvons pas identifier deux choses en même temps et nous ne pouvons pas exécuter deux actions élaborées et complexes en même temps. Il faut donc bien établir une priorité et faire une sélection. De plus, l’information sélectionnée doit être maintenue ? un haut niveau de traitement pendant un temps prolongé afin de s’en faire une représentation claire et précise et de déclencher une stratégie d’action appropriée. À ce titre, l’attention est fortement liée à la mémoire de travail, conceptuellement et anatomiquement, et de nombreux travaux soulignent ces liens.
En résumé, l’attention demande en premier lieu une opération de sélection (faire attention « à » uel ue chose) et une augmentation de l’ 8 lieu une opération de sélection (faire attention « à » quelque hose) et une augmentation de l’intensité de traitement alloué à l’objet sélectlonné (fonction du « maintien Notion de système attentionnel La majorité des théories cognitives actuelles sont causales et reposent sur l’existence d’un système attentionnel, contrairement aux théories de l’effet qui considèrent l’attention comme un simple épiphénomène du traitement de l’information, un index passif de la complexité du traitement en cours [2]. Deux domaines peuvent être distingués selon la théorie causale. Le premier domaine ou systeme préattentionnel permet 258 ‘analyse de l’information (encodage et catégorisation, accès au code sémantique) à des niveaux multiples Son mode de fonctionnement est automatique et non conscient. Sa capacité est grande (beaucoup d’informations peuvent être traitées). Le deuxième système est le système attentionnel lié à la conscience.
Sa capacité est limitée (on ne peut traiter à un haut niveau de traitement qu’un nombre limité d’informations) et il sélectionne les informations qui entreront dans le premier domaine ou qui en sortiront. Mise en jeu de rattention L’attention, permettant de former des représentations sur esquelles une réflexion ou une décision d’action peuvent être prises, intervient dans toutes les activités pour lesquelles une routine de traitement ou une réponse automatique n’est pas possible ou peu souhaitable. Ainsi, l’attention est mise en jeu cha ue fois que la tâche est complexe ou ions contextuelles sont PAGF s 8 traiter est nouvelle ou quand une stratégie de réponse à l’information doit être élaborée.
En fait, l’attention peut être mise en jeu de deux manières La première manière correspond à un biais interne qui ne dépend pas directement de la réalité actuelle u monde extérieur, c’est la mise en jeu endogène de l’attention : c’est le sujet lui-même qui dirige volontairement son attention vers une certaine information. Cette mise en jeu permet d’assurer la cohérence et la continuité du comportement par rapport ? des buts prédéfinis (et contenus dans la mémoire de travail). La deuxième manière de mettre en jeu l’attention est exogène : l’attention peut être attirée vers un événement soudain du monde extérieur (capture attentionnelle).
Cette attention exogène permet de rendre le comportement flexible en fonction des modifications e l’environnement. Néanmoins, ces modifications ne modifient le comportement du sujet que si celui-ci décide d’en tenir compte. Effet de l’attention plus ou moins d’attention détermine l’efficience de l’esprit et la plupart des auteurs reconnaissent le rôle majeur de l’attention dans le développement de l’intelligence. Selon Lucrèce, les choses ne sont pas vues nettement à moins que l’esprit s’y soit préparé. Pour Descartes, la clarté et le caractère distinctif des choses sont des caractéristiques phénoménologiques qui peuvent être améliorées quand l’attention est dirigée vers une idée.
En fait, selon les modèles actuels, s’il est indéniable que la sélection attentionnelle permet un Psychol Neuropsychiatr Vieillissement 2004 ; vol. 2, no 4 : 257-69 6 8 vieillissement meilleur traitement de Pinformation sélectionnée (bénéfice), l’information non sélectlonnée, en conséquence, sera moins bien traitée, voire inhibée (coût). une question fondamentale de la psychologie cognitive est de savoir à quel niveau agit l’attention dans le traitement de l’information Selon la plupart des auteurs actuels, elle pourrait agir à plusieurs niveaux. Précocement, elle permet une meilleure analyse perceptive de ‘information et donc un meilleur accès à la sémantique. Les informations non sélectionnées auront une mons grande influence sur le comportement. our l’attention spatiale, il s’agirait de l’attention vers des localisations. Tardivement, elle n’est pas déterminante pour l’accès à la sémantique : elle permettrait plutôt de programmer la réponse à des objets. Les paradigmes de l’attention Du fait de la mise en jeu de l’attention dans les situations complexes ou nouvelles, il est relativement facile d’imaginer quelles sont les situations (expérimentales ou de la vie quotidienne) qui demanderont de ‘attention. Rechercher une cible dans un environnement complexe (tâche expérimentale de recherche spatiale ou situation de la vie courante consistant à rechercher ses clés sur un bureau encombré) requiert évidemment de l’attention.
Il est évident aussi que l’exécution simultanée de plusieurs tâches, à la condition que celles-ci demandent de puiser dans les ressources cognitives, requiert plus d’attention (ce qui est appelé parfois l’attention partagée) que l’exécution d’une tâche simple. Pour objectiver le phénomène attentionnel, les chercheurs ont recours à diverses situatio tales (voir des exemples PAGF 7 8 recours à diverses situations expérimentales (voir des exemples dans la figure 1), dans lesquelles ils mesurent les temps de réponse (l’attention permet de répondre plus vite à une information) et la précision de la réponse (elle permet une représentation plus précise). Cependant, il est important de comprendre qu’une mesure de l’attention ne peut en aucun cas se faire sur une valeur isolée.
Pour évaluer l’intervention de l’attention, il faut comparer les résultats d’une condition requérant de l’attention avec une condition n’en requérant pas ou moins (méthode de la soustraction, écrite à la fin du XIXe siècle par Donders). by only one characteristic at the top and two characteristics at the bottom; Ill. Exemple of stimuli organized into hierarchy; IV. Flankers paradigm. The patient has to press a key when the central letter (target) is a C or as framed by distractors similar to the target (top) or different from the target (bottom). 259 Orientation de l’attention dans l’espace • Recherche spatiale Lorsque l’on recherche une cible dans un dispositif comprenant de nombreux éléments distracteurs, une orientation de l’attention spatiale peut être requise.
Ainsi, rechercher un trait vert incliné à droite (cible) parmi des traits verts inclinés à gauche et des traits rouges inclinés à droite (distracteurs) requiert de l’attention. Il s’agit d’une recherche séquentielle dont la nature attentionnelle peut être mise en évidence en variant le nombre d’items : plus le nombre d’items est grand plus le temps de réponse est long [4]. On peut opposer cette condition a une condition de recherche plus simple dans laquelle la recherche de la cible demande peu d’attention. Ainsi, lors de la recherche d’un tralt Incliné à droite parmi des traits inclinés à gauche, e temps de réponse est beaucoup moins influencé par le nombre total d’items : la cible semble « sortir » automatiquement du fond (phénomène de pop-out). ?? Modification de la taille d tentionnelle PAGF g 8 L’effet le mieux connu est le fait que Von traite plus rapidement l’information globale (la grande lettre) que l’information locale (les petites lettres), ce que Navon a bien décrit dans sa métaphore : « On identifie la forêt avant les arbres eux-mêmes » [51. Les conditions permettant de mettre un tel effet en évidence sont variées : recherche d’une cible (une certaine lettre) pouvant apparaître ? l’un des deux niveaux (global ou local), congruence entre les lettres de chaque niveau lors d’une tâche d’identification des lettres d’un seul niveau, copie, etc. L’attention peut être mise en jeu en « forçant » l’attention vers un niveau, par exemple en faisant en sorte que la cible soit plus souvent rencontrée à un niveau plutôt qu’à un autre.
Des différences hémisphériques ont été trouvées, avec l’hémisphère droit plutôt spécialisé au niveau global et l’hémisphère gauche au niveau local • ndiçage spatial Lors d’une tâche de détection d’une cible simple pouvant apparaître à différents endroits dans le champ isuel, il est possible d’améliorer la vitesse de réponse du sujet si un indice vient au préalable indiquer la localisation de la cible à venir [7]. Cela peut se faire grâce à un indice apparaissant dans la localisation exacte de la cible ; dans ce cas, l’indice, dit périphérique, attire l’attention exogène du sujet. L’effet est très rapide et apparait pour des SOA (stimulus onset asyn- 260 chrony : ici, le délai entre le début de Findice et le début de la cible) courts, situés entre 50 et 200 ms. Un indice central ou symbolique (flèche n’a araissant pas nécessairement à l’endroi is, par exemple,