COMMENTAIRE DE L’ARRET « ASSOCIATION AC ! » DU CONSEIL D’ETAT (11 MAI 2004)
COMMENTAIRE ARRET « ASSOCIATION AC ! » DU CONSEIL D’ETAT (11 MAI 2004) Avec l’arrêt « Association AC ! » du 11 mai 2004, le CE apporte une considérable modification au rôle du juge administratif en ce qui concerne l’annulation d’un acte administratif dans le cadre du recours pour excès de pouvoir. Suite à l’émanation de plusieurs arrêtés en 2003 par le Ministre du travail agréant de à l’emploi et à l’inde trouve saisi par des a « AC! » ; celles-ci invo et en demandent l’an OF Swip next page s de l’aide au retour Conseil d’Etat se ment l’association tés susmentionnés pouvoir.
Les motifs ? l’appuie du recours des requérantes sont au nombre de trois : La commission permanente du comité supérieur de l’emploi se serait réunie de façon irrégulière pendant les consultations du 15 janvier et 6 février 2003 sur le projet d’agrément des accords relatifs aux conventions du 1er janvier 2001 et 2004. De cette façon, elle aurait violé l’article R. 322. 13 du Code du travail ; ly aurait eu violation de l’article L 352. 2 du Code du Travail faite par les articles 2, 4, 6 et 10 du règlement annexé à la convention du 1er janvier 2004.
Ces dispositions prévoyaient la création ‘une commission paritaire nationale composée uniquement des organisations signataires de la convention, dont le but était de définir les règles concernant la démission légitime, le départ volontaire, la procédure d’admission au bénéfice des allocations des salariés dont l’entreprise a réduit ou cessé son activité sans que leur contr contrat de travail ait été rompu et la réouverture des droits en cas de départ volontaire. Ces dispositions du règlement violeraient l’article L352. du Code du Travail, vu qu’il consacre le droit reconnu à toutes les organisations syndicales des employeurs t travailleurs de participer à la formation des accords et qu’il en interdit toute exclusion ; Les accords d’application des deux conventions seraient contraires à l’article 1 de la loi du 17 juillet 2001, en tant qu’ils attribuent à l’ASSEDIC (Association pour remploi dans l’industrie et le commerce) la compétence pour l’octroi de l’aide à la mobilité géographique aux demandeurs d’emploi indemnisés Après avoir déclaré sa compétence pour traiter le litige, vu que les arrêtes sont considérés comme des actes règlementaires, le Conseil d’Etat procède à l’examen des moyens invoqués par les ssociations requérantes.
Est-ce que les arrêtés prononcés par le Ministre du travail le février 2003 sont entachés d’illégalité ? Si oui, est-ce que leur annulation devra avoir un effet rétroactif immédiat, si on tient en compte des conséquences de cette rétroactivité ? Le Conseil d’Etat déclare d’abord que les arrêtés du 5 février 2003 sont entachés d’illégalité et procède à leur annulation. D’un autre coté, il tire des conclusions différentes de l’annulation des mêmes arrêtés. En fait, il juge que les vices procéduraux affectant les arrêtés ne pourront pas remettre en cause le aractère définitif des effets de l’agrément des avenants à la convention du 1 er janvier 2001.
En ce qui concerne la deuxième convention, celle de 2004, l’annulation ne saura produire ses effets qu’à partir du 1er juillet 2004, sous réserve des actions c 20F 13 ne saura produire ses effets qu’à partir du 1er Juillet 2004, sous réserve des actions contentieuses engagées préalablement. De cette façon le Conseil d’Etat affirme une nuance au principe de rétroactivité et immédiateté de l’annulation des actes administratifs : C’est une compétence du juge de prendre en compte les intérêts n jeu avant de statuer sur les conséquences d’une annulation d’un acte administratif. : d’un coté il réunira les éléments susvisés (effets, situations créées par facte administratif lorsqu’il était en vigueur, intérêt général) ; de l’autre il considèrera l’importance du principe de légalité et le droit des justiciables à un recours effectif.
On assiste à l’introduction d’une modulation dans le temps des effets de l’annulation d’un acte administratif, faite par le juge administratif. Cet arrêt de principe du Conseil d’Etat est notamment important puisqu’elle renouvèle Hoffice du juge administratif face aux écisions contentieuses et surtout face aux conséquences d’une annulation d’un acte administratif. Il faut tout de même s’interroger sur les enjeux de cette nuance au principe de rétroactivité et sur ses conséquences vis-à-vis des justiciables Est-ce que la modulation dans le temps des effets d’une annulation d’un acte administratif porte atteinte au principe de rétroactivité et immédiateté et aux droits des justiciables à un recours effectif ?
Pour répondre à cette question, il faudra d’abord analyser les raisons qui ont amené le Conseil d’Etat à introduire tel écanisme de nuance du principe de rétroactivité (l), pour passer en suite à l’analyse de ce nouveau pouvoir du juge (II) . LES RAISONS DE L’AFFIRMATION DE L’EXCEPTION DE LA MODULATION 30F 13 ce nouveau pouvoir du Juge (II) I. LES RAISONS DE L’AFFIRMATION DE L’EXCEPTION DE LA Depuis l’arrêt Radière de 1925, le principe de rétroactivité des effets de l’annulation contentieuse d’un acte administratif ainsi consacré n’a fait que créer des problèmes : l’annulation d’un acte administratif comporte son inexistence totale dans l’ordonnancement juridique, tant pour le futur que pour le passé.
Il y a par conséquent un défaut de stabilité, en ce qui concerne les situations juridiques créées sous le régime de l’acte illégal et désormais annulé. La jurisprudence communautaire est à l’origine d’un changement de considération face au principe de rétroactivité (A). L’arrêt du Conseil d’Etat de 11 mai 2004 s’inscrit dans cette courante jurisprudentielle : il Introduit un mécanisme qui permet de garantir d’une façon assez efficace la sécurité juridique (B) ; A. L’exception au principe de rétroactivité : un mécanisme annoncé et encouragé par la jurisprudence communautaire. Dans le cadre de l’Union Européenne, on peut identifier un article qui encadre parfaitement la question de la rétroactivité : c’est Particle 264 du traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne.
Cet article, renvoyant à Particle 174 du traité de Rome, affirme d’une part le principe selon lequel la Cour Européenne, lorsqu’elle constate l’illégalité d’un acte, elle doit le considérer comme « nul et non avenu » ; d’autre part, il prévoit une exception : « Toute fois, en ce qui concerne les règlements, la Cour de justice indique, si elle l’estime nécessaire, ceux des ffets du règlement annulé qui doivent être considères comme définitifs Cette norme attribue à la Cour Européenne de justice la 4 3 doivent être considères comme définitifs possibilité de déroger, par une analyse factuelle, aux principes qui régissent l’annulation contentieuse. Elle peut ainsi différer l’application des effets de l’annulation d’un règlement à une date postérieure à celle de sa décision, en la soumettant, par exemple, à l’intervention d’un nouveau règlement (arrêt « Commission c/ conseil, 5 juin 1973).
La Cour européenne a fait de cet article une interprétation ssez large : elle a étendu l’application de l’exception même aux directives (CJCE, 7 juillet 1992, Parlement c/Conseil), au budget des communautés (CJCE, 3 juillet 1986, Conseil c/Parlement) et aux décisions (19 novembre 1 998, Portugal c/Commisslon). En plus elle a affirmé sa compétence à appliquer la modulation dans le temps des effets de l’annulation d’un acte communautaire, même en dehors du recours en annulation. Cette modulation peut être exercée même sur les décisions concernant les recours préjudiciels, qu’ils consistent dans un contentieux d’interprétation du droit communautaire ou qu’ils consistent dans un contentieux ‘appréciation de validité d’actes communautaires.
Concernant le contentieux d’interprétation, elle a proclamé dans l’arrêt du 8 avril 1976, « Mlle Defrenne c/Sabena » que l’effet direct identifié à l’article 119 du Traité sur l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes ne pouvait être appliqué à des périodes de rémunération antérieures à la date de cet arrêt. La décision a été confirmée dans deux arrêts du 27 mars 1980, « Salumi » et « Denkavit Italiana », s’appuyant au principe général de sécurité juridique vivant dans l’ordre communautaire. 3 Italiana », s’appuyant au principe général de sécurité juridique vivant dans l’ordre communautaire.
Suite aux critiques émises de la part des juridictions françaises et de la doctrine, la Cour a nuancé son orientation : d’un coté, elle a commencé à considérer la situation des justiciables ayant introduit des actions pour défendre leurs droits. De l’autre, elle a subordonné l’application de la modulation à des critères, conditions et modalités d’exercice qu’elle-même devra respecter. Les critères ainsi établis (considérer les effets de Pannulations à l’égard des situations juridiques qui ont été créées sous le égime de l’acte litigieux; considérer les possibles inconvénients liés à des vides juridiques) sont repris par le Conseil d’Etat en 2004.
Avant de statuer, le juge doit en effet vérifier que l’effet rétroactif de l’annulation ne soit pas « de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que l’acte illégal a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu’il était en vigueur Le Conseil d’Etat va encore plus loin et ajoute que le juge doit considérer aussi « l’intérêt général qui peut s’attacher à un maintien temporaire de ses ffets Tous ces éléments communs entre la décision du Conseil d’Etat et les arrêts de la Cour européenne de justice nous font comprendre que la décision du 11 mai 2004 n’est qu’un produit d’un courant jurisprudentiel, qui, parti du cadre européen, a fini par influencer le Conseil d’Etat. Toutefois, celui ci ne s’est pas arrêté aux critères communautaires de la mise en œuvre de cette modulation, mais il a ajouté des nouveaux éléments. B. L’exception au principe de rétroactivité : une m 6 3 ajouté des nouveaux éléments. B. L’exception au principe de rétroactivité : une modalité de rotection de la sécurité juridique. La sécurité juridique, selon le rapport du Conseil d’Etat de 2006 est un principe qui « implique que les citoyens soient, sans que cela appelle de leur part des efforts insurmontables, en mesure de déterminer ce qui est permis et ce qui est défendu par le droit applicable. our parvenir à ce résultat, les normes édictées doivent être claires et intelligibles, et ne pas être soumises, dans le temps, à des variations trop fréquentes ni surtout imprévisibles Appliquant le principe dans le cadre du droit administratif on peut bien comprendre qu’il y a une xigence de garantir la stabilité des situations juridiques qui se sont constituées, sur le fondement de la décision annulée, avant la date d’intervention du jugement. Ce principe semblerait être incompatible avec le principe de rétroactivité de l’annulation d’un acte administratif : l’un devrait exclure l’autre. Par contre, le Conseil d’Etat avait déjà fait preuve d’une possibilité de tempérament de la disparition rétroactive de Pacte annulé. II avait justifié une limitation de ce principe par l’intangibilité des droits acquis par le bénéficiaire d’une décision individuelle, devenue éfinitive, (CE, 10 octobre 1997, « Lugan b).
Il avait décidé que Pannulation d’une délibération créant une recette inscrite au budget d’une collectivité territoriale postérieurement au vote de ce budget n’affectait pas de façon rétroactive la légalité de ce vote (CE, 27 mai 1994, « Braun Ortega et Buisson Par l’arrêt du 11 mai 2004 le Conseil d’Etat continue l’ouvrage de tempérament du principe de rétroactivité des du 11 mai 2004 le Conseil d’Etat continue l’ouvrage de tempérament du principe de rétroactivité des effets de l’annulation d’un acte administratif règlementaire. En rappelant ue « l’annulation d’un acte administratif implique en principe que cet acte est réputé n’être jamais Intervenu le Conseil d’Etat nous fait comprendre qu’il n’ y aura pas de revirement de jurisprudence : il n’y aura pas de suppression du principe rétroactif. Par contre, il introduit une nouvelle exception au principe.
Il affirme que « toutefois, s’il apparait que cet effet rétroactif de l’annulation est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu’il était en vigueur que de l’intérêt général ouvant s’attacher à un maintien temporaire de ses effets, il appartient au juge administratif d’apprécier, en rapprochant ces éléments, s’ils peuvent justifier qu’il soit dérogé à titre exceptionnel au principe de l’effet rétroactif des annulations contentieuses et, dans l’affirmative, de prévoir dans sa décision d’annulation que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de celle-ci contre les actes pris sur le fondement de facte en cause, tout ou partie des effets de cet acte antérieurs à son annulation devront être regardés comme définitifs ou même, le cas échéant, que Pannulation ne prendra ffet qu’à une date ultérieure qu’il détermine h. Cexception consiste dans la possibilité reconnue au juge administratif de déroger au principe de l’effet immédiat et rétroactif de l’annulation, lorsqu’il constate que les effets de l’annulation d’un acte administratif illégal sont exagérés (ex : B3 lorsqu’il constate que les effets de l’annulation d’un acte administratif illégal sont exagérés (ex : création des vides juridiques).
En l’espèce, le Conseil d’Etat fait déjà application de cette exception : après avoir considéré les doutes sur la situation des allocataires et des cotisants et les risques de désorganisation u régime de l’assurance chômage, il différencie les effets des annulations prononcées. Concernant la convention de 2004, il renvoie l’effectivité de l’annulation au 1er juillet 2004, pour donner au ministre du travail la possibilité de prendre les mesures indispensables à la continuité du versement des allocations et du recouvrement des cotisations. Concernant les arrêtés relatifs à la convention du 1er janvier 2001, le juge retient que l’annulation rétroactive de l’ensemble des dispositions des arrêtés attaqués aurait des conséquences manifestement excessives.
C’est pourquoi il décide que les effets des dispositions es arrêtes litigieux autres que celles déclarées illégales sont définitifs. En application de l’exception ainsi énoncée, le Conseil d’Etat affirme que l’effet rétroactif de l’annulation des arrêtes joue seulement pour les dispositions illégales. La sécurité juridique se trouve ainsi protégée par la création d’un tel mécanisme : la préservation de certains effets et l’appréciation au cas par cas par le juge des effets d’une annulation permettent de contraster fortement l’éventualité d’un vide juridique que créerait des troubles relevant à l’égard des justiciables.
Dans le même temps, e principe des effets rétroactifs de l’annulation d’un acte ne se trouve pas remis en question. Il. LE NOUVEAU ROLE DU JUGE ADMINISTRATIF A’ L’EGARD DE L’EXCEPTI rems en question. L’EXCEPTION AU PRINCIPE DE RETROACTIVITE. par l’arrêt de 11 mai 2004 le Conseil d’Etat renouvèle le pouvoir du juge administratif face à l’annulation contentieuse d’un acte administratif. En prévoyant une exception à la rétroactivité de l’annulation d’un acte de l’administration, le Juge administratif se trouve ainsi doté d’un double pouvoir de tempérament (A) ; néanmoins ce pouvoir est limité par des conditions d’application ?noncées par le même Conseil d’Etat (B). A.
Le double pouvoir de tempérament du juge administratif e Conseil d’Etat encadre dans l’arrêt du 11 mai 2004 le nouveau rôle du juge administratif : « Il lui revient de prévoir dans sa décision d’annulation que tout ou partie des effets de cet acte antérieurs à son annulation devront être regardés comme définitifs ou même, le cas échéant, que l’annulation ne prendra effet qu’à une date ultérieure qu’il détermine Lorsqu’il examine un acte administratif entaché d’illégalité et identifie les conditions de la mise en œuvre de la modulation, le uge dispose de deux pouvoirs : il peut écarter toute rétroactivité de l’annulation, rendant « définitifs » tous ou partie des effets de l’acte en cause antérieurs à son annulation ; il peut différer l’application de Pannulation à une date postérieure qu’il va déterminer. De cette façon l’administration ou l’autorité compétente aura la possibilité de résoudre l’illégalité de l’acte ou de le remplacer avec un acte nouveau. Comme il ressort de l’arrêt commenté, le juge peut mettre en œuvre les deux voies simultanément. En l’espèce, considérant les arrêtés a réant la Convention du 0 3