art depuis 1945 Raymond Hains et Jacques Villeglé, Ach Alma Manetro, février 1949

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«lnventer c’est aller au-devant de mes œuvres. Mes œuvres existaient avant moi, mais personne ne les voyait car elles crevaient les yeux. » (Raymond Halns) Deux amis, Raymond Hains et Jacques Villeglé, en arrachant une affiche des murs de Paris en 1949, commencent une aventure qui bousculera la perception même de l’œuvre d’art. Mais ils témoigneront de la façon la plus pertinente et évidente du changement de la société dans laquelle ils évoluent.

Leur œuvre to neZÇEge se fait révolutionnair l’artiste qui n’est plus or 14 elle représente la co die u, consommation et de encadrée, Hains et Vi . Détachée de e foule anonyme, société de rs l’affiche lacérée reconsidérer l’environnement dans lequel nous sommes par l’effacement des frontières entre art et rue. À la fois colorés, esthétiques, les murs sont le théâtre de mouvements violents, critiques, politiques, poétiques au humoristiques dont se nourrissent les affichistes.

Ironiquement c’est au moment où l’Europe et l’occident de façon générale oublient les douleurs de la guerre grâce à une économie ravivée et un progrès constant que les artistes se tournent vers l’accumulation, la lacération, la compression ou les machines uto-destructrices. En France, ce se sont Arman, Tinguely, Dufrène, César qui mènent le mouvement. Conscient de rapp Swipe to Wew next page rapprochements idéologiques dans cette diversité le critique d’art Pierre Restany [les rassemble dans le] permet leur rapprochement et forme le groupe de nouveaux réalistes. pourtant Villeglé et Hains précèdent et dépassent ce dernier.

De la peinture abstraite à l’objet «ready-made», du collage au décollage il est intéressant de se pencher sur cette période pour comprendre l’œuvre de Hains et Villeglé pour s’interroger : dans uelle mesure Ach Alma Manetro est-elle un acte précurseur dans la représentation des nouvelles perceptions du réel en Europe au tournant des années 1950 ? Nous verrons dans un premier temps comment l’œuvre dans renvironnement de consommation dépasse le dialogue entre Pop Art et Nouveaux Réalistes pour ensuite observer l’interprétation sociologlque de Hans et Villeglé d’une poésie des murs. – L’environnement de la consommation: le dialogue Pop Art et Nouveaux Réalistes Ach Alma Manetro est une œuvre qui s’encre parfaitement dans son époque. Elle est représentative du changement de celle-ci et e la rupture de la conception de l’art. Néanmoins elle dépasse le cadre d’un groupe en partlculier même si les deux artistes adhèrent aux idées des Nouveaux Réalistes. a-l_lne société globalisée : collages et décollages un mouvement ? échelle international L’utilisation par les artistes d’affiches et de matériaux industriels n’est pas limitée par les frontières nationales.

Les nouveaux modes de vies, possibilités techniques de la société de conso 12 frontières nationales. Les nouveaux modes de vies, possibilités techniques de la société de consommation s’accompagne e la diffusion massive d’images par les nouvelles méthodes d’impression. Cette période de prospérité retrouvée couvre l’Europe et les Etats-Unis et correspond à la création en parallèle de mouvements artistiques qui s’en nourrissent.

En Grande Bretagne les artistes, notamment le groupe des Independents, utilisent largement par la page imprimée, (comme nous l’avons vue la semaine passée) et marquent la naissance au milieu des années 1 950 du Pop Art du « popular art » et de la recherche sur les collages, sous l’impulsion de Richard Hamilton et Eduardo Paolozzi. A la fin des années 1950, le pop art amerlcain émerge avec Andy Warhol, Roy Lichtenstein, Robert Rauschenberg ou encore Jasper Johns par la fascination de la multiplication des icones et le détournement des images.

Tout aussi fascinés par ces contrastes, leurs contemporains, à Rome, Paris et au-delà suivent et s’approprient la publicité de grande échelle qui envahit l’espace public. Annonces de divertissement, poster politique, et plus tard la réclame commerciale, couvrent si bien la surface des murs qu’elles en font le défilé d’informations le plus attractif visuellement de leur temps. Le paris Surréaliste avait exprimé le désir de poétiser les murs de la ville. Dans le prolongement le décollage s’impose de lui-même pour transformer l’espace.

L’ironie de l’histoire veut que ce soit en Europe au lui-même pour transformer l’espace. L’ironie de l’histoire veut que ce soit en Europe au sortir d’une guerre destructrice que la lacération des images devienne pertinente dans l’action artistique. L’avant-garde nait parallèlement dans différents foyers du fait de l’évolution parallèle de la société de consommation. L’Italie après 45 cherche à se débarrasser des souvenirs du ascisme, Rome est divisée entre le Figuratif Réaliste et les Novo Secessione, deux groupes artistiques qui débattent au sein du parti communiste italien.

Alors que les Chrétiens démocrates prennent le pouvoir en 1948, et à l’occasion de l’importante Biennale de Venise de cette même année, que l’Italie fournit les conditions idéales d’un mouvement d’avant-garde d’importance internationale. parmi les différents figures représentatives de cette période Mimmo Rotella qui après un séjour au Etats-Unis en 1952 arrête la peinture pour se consacrer aux matériaux ue fournit la ville, notamment les posters de divertissement.

L’exécution de dépouiller ces surfaces de leurs fragments était un geste de contestation contre ce que Rotella appelait « le gris des maisons, du ciel, des visages, des routes, de la poussiere, des sentiments, et toutes ces grandes choses grises » de son enfance dans le sud de l’Italie. Arracher les posters était la seule compensation, le seul moyen de protester contre la société qui avait perdu son appétit du changement et des transformations. Rotella débute cette recherche en 1953 et ex 2 appétit du changement et des transformations. Rotella débute cette recherche en 1953 et expose en 1954.

Les décollages, ou affiches lacérées de l’artiste sont constituées par la collectes de morceaux de posters déjà déchirés, l’assemblage est collé sur la toile et parfois coupé ou déchiré à nouveau afin dobtenir une structure incohérente. un des premiers exemples Un Poco in Su de 1954 présente une image dégradée d’une violente beauté représentant les couleurs automnales sous le rougeoiement du soleil de la Piazza di Spania. Cest aussi pour l’artiste, fasciné par l’apocalypse, une image de chaos « le collage ffre une patine jaune de cette décadence géographique, mais c’est aussi la patine de l’espoir D.

Les effets imprévisibles du décollage sont comme un Instrument qui jouerait de lui-même. Rotella dit « je tiens simplement l’instrument qui jour de lui-même Du collage au décollage, Rotella est le parallèle de Hains et Villeglé sans la conception de la destruction réactionnaire. Malgré les publications et les expositions dédiées aux nouvelles tendances italiennes et internationales comme celle de la Biennale de Venise ou lors de l’exposition « l’art italien contemporain » tenue à Bruxelles et Amsterdam, Part xpérimental italien était peu connu à ce moment là à Paris ou à New York.

Néanmoins naissent simultanément des préoccupations pour les jeux entre les surfaces publiques dégradées et les lumineuses icônes de l’émergente modernité commerciale. L’art en France e PAGF s OF L’art en France est lui aussi dominé à cette époque par l’abstraction d’un coté et le Surrealisme d’un autre. Ces deux courants s’opposent à une troisième tendance, celle de la gauche engagée de peinture de style réaliste figuratif. C’est contre cet arrière plan diversifié sans faire partie d’aucun courant que Hains t Villeglé proposent un décollage des publicités dégradées des rues de la ville.

C’est en 1949 qu’ils découvrent la première longue frise de posters arrachés et lacérés qu’ils démontent et transfèrent avec un minimum d’ajustements sur la toile pour créer Arch Alma Manetro. La taille monumentale des affiches implique la manipulation et la gestuelle de l’ensemble du corps de l’artiste et l’immersion totale du spectateur. De plus par cette action ils transfèrent à la fois la scène artistique de la scène publique de la rue à l’intimité du studio en ravivant la philosophie de « ready made » dans sa ersion la plus évidente et colorée.

Hains et Villeglé sont alors responsables initiaux de la révolution du regard qui s’est opérée au début des années soixante, puisqu’ils Pont devancée de plus de dix ans. b- La formalisation par Les Nouveaux Réalistes Les années 1950 sont celles de l’omniprésence de l’expressionnisme abstrait, établit en réaction de la situation traumatique de l’après guerre. Pourtant la société change, s’industrialise à grande vitesse et entre dans une nouvelle cul 6 2 guerre.

Pourtant la société change, s’industrialise à grande vitesse t entre dans une nouvelle culture de la communication et de la consommation de masse. Imprégnés de cet environnement, des artistes manifestent cette rupture en utilisant de nouveaux matériaux et techniques telle que la sérigraphie, et détournent les objets , la communication de propagande ou de publicité. Le changement des années 1950 en font une période d’éveil, celle de la société moderne, urbaine et industrielle. Le critique Pierre Restany est un acteur clef de cet éveil qui permettra la formation du groupe des Nouveaux Réalistes.

Il décèle un grand potentiel chez une nouvelle génération ‘artistes qui voit le jour. Alors que Klein se fait connaitre pas ses monochromes, que Tinguely travallle depuis 1953 à ses sculptures méta-mécaniques, qu’Arman commence ses Accumulations de Poubelle, que Dufrêne découvre les dessous d’affiches, que Hains et Villeglé déchirent depuis 1949 des affiches, Restany prend conscience de nouvelles représentations du réel, idée sur lesquels s’accordent les travaux de ces artistes même si ils sont tres variés.

Selon lui la rupture est fondamentale , la non-avancée de l’art «Nous assistons aujourd’hui à l’épuisement et à la sclérose de tous les ocabulaires établis, de tous les langages, de tous les styles». Il faut dire que l’énergie de la ville et de la nature moderne devient une nouvelle source d’inspiration pour les artistes, ? commencer par les «Affichistes» qui prélèven 7 2 nouvelle source d’inspiration pour les artistes, à commencer par les «Affichistes» qui prélèvent leurs éléments de création directement sur les affichages publics.

Restany met en avant et définit ainsl la nouvelle expressivlté. Le nom de «Nouveau Réaliste» représente, pour Restany, les artistes du groupe proposant une relecture du réel, de la société n tant que telle, il propose en cela: «la passionnante aventure du réel perçu en soi et non à travers le prisme de la transcription conceptuelle ou imaginative». II s’agit d’une certaine tendance au naturalisme, dans le sens ou le monde urbain et industriel serait la nouvelle nature de l’homme moderne, par ces pratiques il réussit à s’approprier le réel.

De nouvelles notions sont introduites comme la revendication d’un art démocratique et sociologique, en s’appuyant sur des éléments du réel et accessible à tous les artistes du Nouveau Réalisme mettent en avant une idée anti-bourgeoise et rebelle. De plus la sensibilité des artistes est menée à changer devant par exemple les accumulations d’Arman, ou encore les monochromes de Klein. La recherche se fait au delà du qualitatif, du beau en art, de la peinture de chevalet critiquée et désignée comme ayant fait son temps dans le manifeste du groupe.

L’impact sociologlque de la culture urbalne ce retrouve dans les différentes appropriations du Nouveau Réalisme : dans l’arrachage et le décollage des affichistes, comme avec les accumulations d’Arman. Restany traduit cette pensée décollage des affichistes, comme avec les accumulations d’Arman. Restany traduit cette pensée comme l’expression artistique de la saturation de l’industrialisation qui mène à une progressive mondialisation. Pourtant si Hains et Villeglé adhèrent à ces idées ils la dépassent.

L’appropriation du réel se confond avec le nouveau realisme mais Hains et Villeglé dépassaient cette définition avant qu’elle soit formulée et la prolonge si bien qu’elle reste d’une poésie très actuelle. ll- La poésie anonyme des murs selon Hains et Villeglé L’œuvre se détachant de Partiste est faite par tous, elle devient le témoignage d’une foule anonyme à un moment donné. Prélevée et conservée, après quel que temps, elle acquière une valeu historico-sociologique. – Une œuvre spontanée et le détachement de l’artiste Jacques Villeglé rencontre Raymond Hains, tout deux nés en 1926, à l’école des Beaux Arts de Quimper où ils entrent l’un pour devenir architecte, fautre pour étudier la sculpture. Les deux amis ny restent que quelques mois mais lie une forte amitié faites de découvertes artistiques communes. La première d’entre elles est créée en février 49 quand Hains et Villeglé repèrent à Paris, près de la Coupole à Montparnasse, lacardée sur la palissade d’un entrepôt de charbon, une série d’affiches de concerts.

Ils vont s’en approprier des morceaux assez longs pour réaliser une nouvelle « tapisserie de Bayeux ». Raymond Hains fait référence à la Tapisserie de Bayeux de 1077 d PAGF tapisserie de Bayeux Raymond Hains fait référence à la Tapisserie de Bayeux de 1077 d’une longueur de 70 mètres sur 50 centimètres de haut, qui raconte la conquête de l’Angleterre par les Normands. L’affiche Ach Alma Manetro n’en a pas la dimension. Elle fait 260 centimètres de long sur 60 centimètres de haut.

Villeglé explique le processus : « L’assemblage, je l’ai commencé seul par la gauche, comme pour l’écriture, une fois au milieu Raymond Hains m’a dit que c’était mal fait. Je lui ai dit qu’il n’avait qu’à continuer et déjà là on pouvait voir une différence très nette de style entre lui et moi. J’estime que je ne compose pas : je fais ce que Je vols. » Le titre provient de quelques mots déchirés qui apparaissent dans le bas de l’œuvre. Ach pour Bach, souvent en référence dans la peinture cubiste. Alma pour la place de l’Alma, voire le métro ? proximité du Théâtre des Champs-Elysées, lieu habituel de grands oncerts.

On transcende ici le langage et ses références. Les fragments typographiques jouent visuellement et pas seulement verbalement. Malgré l’illisibilité narrative, le regard cherche à établir des correspondances de lettres et de mots. Leur résonance compose une manière de poème lettriste. Courant dont les artistes sont proches notamment Hains. Alors que Raymond Hains prend ses distances avec le Nouveau Réalisme pour se consacrer aux calembours et autres jeux de mots Jacques Villeglé poursuivra sa recherche sur l’affiche pendant près de 40 ans démontrant l’inta