Analyse G N Ralit S Les Gommes
l. Généralités. A – Situation historique du roman Le roman « Les gommes » (1) d’Alain Robbe-Grillet est paru en France en 1953 aux Editions de Minuit. Les années 1950 furent le théâtre de bouleversements et ce livre en témoigne. Les guerres mondiales. Les années 1950 sont tout d’abord marquées par la fin des deux conflits mondiaux, qui ont profondément marqué la première moitié du 20ème siècle. La Seconde guerre mondiale fit rage entre les Alliés (France, Royaume-Uni, URSS et USA) et l’Axe (Allemagne Nazie, Japon et l’Italie fasciste) entre 1939 et 1945.
Le bilan humain est catastrophique : pas moins de soixante o nextÇEge Swipe to page deux millions de mo les côtes normandes d’HitIer (1889-1945) c et américaines dans nazismel or 16 ment allié sur 2), l’Allemagne s troupes russes la véritable fin du Alors, les deux grandes puissances du monde vont s’opposer, durant une quarantaine d’années, pendant ce qu’on nommera la guerre froide. On assiste à une bipolarisation du monde entre deux idéologies antithétiques : le capitalisme d’une part, et le communisme d’autre part.
Le communisme est un système politique d’extrême gauche qui prône l’abolition de la propriété privée au profit de la collectivisation, ou de la natlonalisation, des oyens de production. Cette doctrine est mise en place en Russie en octobre 1917 par Lénine (1870-1924) et perdurera jusqu’en 1991. En 1953 justement, Joseph Staline (1879-1953), successeur de Lénine, meurt. Son long mandat d de dirigeant de l’URSS (Union des républiques socialistes soviétiques) fut marqué par un autoritarisme et une cruauté sans nom.
La partie européenne de l’IJRSS était appelée bloc de l’Est, et celui-ci comprend les actuels pays de l’est de l’Europe. Le rideau de fer séparait les deux mondes, coupant ainsi la capitale allemande, Berlin, en deux. Par opposition, le système capitaliste est mise en place dans tout e bloc de l’Ouest. Le capitalisme est une doctrine économique qui recherche le maximum de profit et qui s’inscrit dans un concept plus large appelé libéralisme2. Les pays de l’Ouest sont souverains, et alliés dans l’OTAN (organisation du traité d’outre- Atlantique nord) ou dans l’ONU (organisation des Nations Unies).
La partie européenne libérale débutera vers les années 1950 la construction européenne, aboutissant des années plus tard ? l’Union européenne telle qu’on la connaît aujourd’hui. Le progrès Après une guerre dévastatrice, l’homme dut reconstruire ce qu’il avait détruit. Il s’opère alors une reconstruction matérielle, mais aussi intellectuelle. Ainsi les scientifiques et artistes d’après- guerre vont participer à un nouvel essor du monde. De plus, les tensions politiques et diplomatiques marqueront donc les années 1950. Cette guerre froide va stimuler le progrès de la science.
La décennie où « Les gommes » (1) furent écrites est donc le théâtre d’inventions plus révolutionnaires les unes que les autres. Premièrement, en 1951, apparaît le Polaroid. Cette invention marque un pas de plus dans le développement de la photographie, qui va de pair avec celui du cinéma. La science met u point aussi la télévision c 16 la photographie, qui va de pair avec celui du cinéma. La science met au point aussi la télévision couleur en 1953, et modifie ainsi les moyens de communication par la popularisation de la télévision dans les ménages.
En 1954, l’aviation civile est marquée par l’arrivée du Boeing 707, capable de transporter encore plus de passagers, contribuant ainsi au tourisme de masse. Quelques années plus tard débutera la guerre spatiale : les Etats-Unis et l’URSS batailleront pour être les plus performants. Cette pression sur le monde de la science se traduira aussi par des recherches lus poussées dans des domaines jusque-là inexplorés comme la physique nucléaire ou la génétique. L’art, quant à lui, suivra à sa manière ces changements profonds.
Le drame humain que furent les guerres mondiales ont falt prendre conscience au monde qu’il courrait à sa perte. Les artistes, tout d’abord, vont agir. Beaucoup vont s’engager, prendre position sur des sujets politiques, à l’image du philosophe français Jean-Paul Sartre (1905-1980), qui sera de tendance gauchiste. Certains toutefois, refuseront de défendre une cause politique, estimant que tout engagement brimerait la créativité artistique qu’ils chérissent tant. Ce sera le cas des adeptes du Nouveau- Roman, sur lequel nous reviendrons au cours de cette analyse.
Les années 1950 sont aussl les années du Baby-Boom, ou sursaut démographique. En effet les maris revenus après la guerre, le cycle naturel de la procréation humaine a pu reprendre son cours, interrompu cinq ans plus tôt par la mobilisation générale demandée par le conflit mondial. Ce boum démographique, renforcé par l’aviation et le mobilisation générale demandée par le conflit mondial. Ce boum démographique, renforcé par l’aviation et le nouveau Boeing ainsi que par le début de l’immigration de masse, a pour conséquence a naissance d’un monde cosmopolite.
Cette société sera caractérisée par la médiatisation de masse et par l’accroissement des moyens de communication. Ainsi, la voiture se popularise, les nouveaux médias naissent (le télégramme, la télévision ou le cinéma) et s’ajoutent aux moyens existants tels que la radio ou les journaux. Le monde devient moderne. Cette médiatisation de masse évolue en parallèle avec (3) développement de la société de consommation. L’objet en lui-même devient important, mais c’est la possession de cet élément matériel qui va faire fantasmer l’humain de l’après-guerre. La féminisation
La société de l’après-guerre se féminise. Pendant la guerre, les hommes partis combattre, les femmes durent prendre leurs places dans les usines d’armement par exemple pour assurer le ravitaillement matériel sur le front. De plus, nombreuses sont les femmes qui ont fait partie de la Résistance et qui sont mortes pour la patrie. Ces éléments vont faire prendre conscience au monde que le sexe féminin doit avoir une place plus importante dans la société. Ainsi, Simone de Beauvoir (1908-1986), compagne de Sartre, écrira Le deuxième sexe qui sera un facteur déclencheur de la féminisation de la société. ) Celle-ci s’exprima en 1948 en Belgique par l’ouverture du droit de vote aux femmes. (5) Ces droits nouveaux les amènent aussi à ouvrir un compte bancaire au même titre que leur mari. B- Les caractéristiques du courant auqu 6 B- Les caractéristiques du courant auquel l’œuvre se rattache. Le roman « Les gommes » (1) d’Alain Robbe-Grillet se rattache au courant appelé le Nouveau-Roman. Ce courant littéraire s’inscrit dans une tendance plus large nommée (6) modernité, et qui débute par la naissance du symbolisme et s’éteint vers les années 1980.
Le Nouveau-Roman n’est plus l’écriture d’une aventure mais ‘aventure d’une écriture. (Jean Ricardou 1932-… ) 1) Le sens de l’appellation et le contexte littéraire de l’époque Le mot Nouveau-Roman indique déjà plusieurs caractéristiques du courant. On Insiste premièrement sur la nouveauté de la conception que l’on se fait du genre romanesque. De cette manière, les auteurs de ce mouvement se placent aux antipodes de leurs prédécesseurs du 19ème siècle qui appartenaient au romantisme3 ainsi qu’au courant cher à Flaubert, le réalisme romanesque4).
Notons tout de même que les nouveaux romanciers refusent qu’on attribue ce nom à leur courant. Ainsi, ans son essai littéraire « Pour un Nouveau Roman » paru en 1963, Alain Robbe-Grillet (1922-2008) débute par « Je ne suis pas un théorlcien du roman Les penseurs de ce style novateur se réunissent au colloque de Cérisy-la-Salle, en France, en 1971, ayant pour titre « Le Nouveau-Roman : hier et aujourd’hui On perçoit dans ce titre la volonté qui fut celle des romanciers de marquer la rupture avec la littérature du siècle dernier. Cette cassure n’était sans doute pas assez flagrante dans le surréalismes selon eux.
Cette recherche de l’originalité s’inscrit dans une tendance plus large qu’on appelle modernité, et q PAGF s 6 recherche de Poriginalité s’inscrit dans une tendance plus large qu’on appelle modernité, et qu’on tend délimiter entre la deuxième moitié du 19ème siècle jusqu’aux environs de l’an 1980. Les auteurs modernes visent toujours à se détacher de la mouvance conservatrice. Cette mouvance s’amorce timidement dans le réalisme, avec des auteurs tels que Balzac, pour s’accentuer légèrement dans le naturalisme6 de Zola, et connaître un véritable essor dans le mouvement symboliste7 de Rimbaud et Baudelaire.
La modernité atteindra son paroxysme au 20ème siècle sous les courants surréaliste et existentialiste8, insi que sous le Nouveau-Roman. La modernité est suivie dans tous les arts, y compris en peinture (impressionnisme, fauvisme et cubisme) ainsi qu’en musque (dodécaphonisme) et en architecture (Art Nouveau). Elle prend sa source dans l’accélération démographique, économique, sociale et technologique qui nait suite à la Révolution industrielle vers le milieu du 1 9ème. L’art devient en fait un refuge pour l’homme qui souffre des conflits sociaux inhérents à la mise en place du système capitaliste.
La modernité aborde des sujets novateurs : l’automatisation, l’essor des villes industrielles, ou encore la vitesse et la technique. Tous ces thèmes sont aux antipodes de ceux évoqués par les courants précédents, qui demeuraient beaucoup plus classiques et universels. Les écrivains modernes vont ensuite se détacher du fond pour accorder une immense importance à la forme. Ainsi, dans le surréalisme, le sens, souvent difficile à saisir, est éclipsé par la technique romanesque utilisée par l’auteur. On se plait à transgresser les 6 6 éclipsé par la technique romanesque utilisée par l’auteur.
On se plait à transgresser les règles établies des décennies plus tôt pour créer d’une manière novatrice, et le Nouveau-Roman s’inscrit ans cette transgresslon artistique. Ainsi des intellectuels de tous bords se réunissent et forme un groupe littéraire appelé OULIPO, acronyme d’ouvroir de littérature potentiel. Le sens même de cette dénomination est assez obscur, néanmoins l’objectif du cercle est connu : écrire avec des contraintes et développer ainsi le sens analytique du lecteur. C’est Raymond Queneau (1903-1976) qui fonde ce groupe avec le scientifique François le Lyonnais (1901-1984).
L’OULIPO est toujours actif aujourd’hui, à raison d’une réunion mensuelle. Les contraintes rigides imposées sont selon eux une source népuisable d’inspiration littéraire. De cette manière, Georges Perec (1936-1982) écrit La disparation (1969), livre où la lettre « e » est totalement absente, ou encore Raymond Queneau qui écrit Exercices de style, où il s’amuse à raconter la même histoire de nonante-neuf façons différentes. Les membres se définissent comme des « rats qui construisent eux-mêmes le labyrinthe dont ils se proposent de sortir.
L’organisation fait l’objet d’une exposition en ce moment à Paris intitulées « Les Zozos de l’Oulipo (8 : ok) 2) Les traits majeurs du nouveau-roman Il est assez ardu de codifier un style si particulier, car son but remier est de ne pas être cardé comme l’étaient les mouvements précédents considérés comme « classiques Nous allons tout de même tenter de dégager des caractéristiques générales, qui ne tiennent pas compte des parti 7 6 tout de même tenter de dégager des caractéristiques générales, qui ne tiennent pas compte des particularités que chaque roman aura par la force des choses.
En effet, l’emploi de contraintes stylistiques entralne inévitablement des tralts, mineurs, qul restent nonobstant assez liés aux caractéristiques générales que nous enumerons cl-apres. Le Nouveau-Roman a eu le soutien d’une maison d’éditions, Les ?ditions de Minuit, et de son directeur Jérome Lindon (1925-2001 sans quoi sa propagation intellectuelle eut été beaucoup moins aisée qu’elle ne le fut. 1. La mort de l’homme et plus généralement le refus d’être classique La structure même du roman classique va être bouleversée.
Le personnage, qui permettait aux auteurs d’avoir un fil rouge durant la rédaction, va être abandonné, ou plutôt la psychologie de ce héros. En effet, les nouveaux romanciers utilisent tout de même des personnages, parfois dénommés parfois pas. Mais ces derniers (10) sont totalement dépourvus de caractéristiques classiques. Ainsi Harpagon dans L’avare de Molière (1622-1673) était cupide, et Coupeau dans L’Assommoir de Zola était alcoolique.
Mais aucun de ces traits de caractère ne ressort des romans novateurs. Cette volonté d’abolir la structure même du personnage peut s’expliquer par le contexte historique, évoqué plus haut. Le rejet du codage classique est en fait le reflet du dégout que les intellectuels ont pour les valeurs traditionnelles (famille, hiérarchie ou religion). Elles sont, selon eux, les principales causes des désastres humains évoqués plus haut. La mort du personnage classique s’ajoute à la nouvelle conception du temps