Droit
Seuls les motifs de la décision et non pas le dispositif, peuvent donc faire jurisprudence (ainsi, les décisions des cours d assises, qui ne sont pas motivées, ne sauraient faire jurisprudence). Plus précisément, au sein des motifs, la mineure et la inclusion du syllogisme judiciaire n ont de sens que pour le litige considéré ; seule la majeure, parfois rédigée sous forme d attendu de principe, possède une signification abstraite pouvant être généralisée par la formation d une jurisprudence.
C est pour la même raison que il convient de distinguer les arrêts d espèce, qui sont dominés par des considérations de fait, se bornent à une application circonstancielle de la règle de droit et dont la solution peut difficilement être transposée à une autre espèce, et les arrêts de principe, qui donnent à la solution une tournure énervée qui dépasse les contingences du litige et est apte à régir d autres situations de même nature. Ces derniers seuls peuvent donc faire jurisprudence (ex : reçu. 15 juin 1892 posant en principe que « I action de ni remet verso, fondée sur le principe d équité qui défend de s enrichir au détriment d autrui, doit être admise dans tous les cas où le patrimoine d une personne s est trouvé, sans cause légitime, enrichi au détriment d une autre personne »). La jurisprudence revêt également un caractère d unité : elle semble exiger la répétition d une même solution. Les juges e se réfèrent certes pas à « a jurais ne se réfèrent certes pas à « a jurisprudence », mais reprennent les motifs de droit qui la fondent.
C est ce qui rapproche la jurisprudence de la coutume : la I jurisprudence naît bien souvent d une « loi d imitation », qui conduit les tribunaux à reprendre une solution déjà adoptée par eux-mêmes, par souci de cohérence, mais aussi par d autres juridictions, selon I idée que la continuité du droit est nécessaire à la sécurité juridique et que I application de la règle de droit doit être dotée de la permanence de cette règle.
La jurisprudence résulte alors d un processus de sédimentation, d une accumulation de décisions convergentes sur un même point de droit. A ce titre, la jurisprudence peut être comparée à la coutume, qui se forme de manière continue, par la répétition d une pratique par les sujets de droit. Cependant, cette similitude doit être nuancée : alors que la coutume est une source spontanée du droit, qui vient « d en bas », du peuple, la jurisprudence est une source de droit volontariste, imposée « d en haut » aux sujets de droit, et est donc aussi comparable à la loi.
En effet, si la jurisprudence se forme anormalement par la répétition, il arrive que la solution retenue par un seul arrêt soit érigée au rang de jurisprudence, notamment parce que la formulation retenue est particulièrement solennelle, ou parce que la formation qui a rendu la solution est elle-même dotée d une autorité particulière. Ce cas (rare cependant) témoigne solution est elle-même dotée d une autorité particulière. Ce cas (rare cependant) témoigne d un autre paramètre de formation de la jurisprudence : la hiérarchie des juridictions, que I on a envisagée précédemment.
En effet, lorsque une seule décision suffit à faire jurisprudence, c est ne décision émanant de la Cour de cassation, qui a pour mission d assurer I unité de I application du droit. Si les solutions adoptées par la Haute juridiction ne contraignent pas les juges du fond, I autorité particulière de cette Cour renforce la loi d imitation, ne serait-ce que parce que les juridictions inférieures veulent s épargner une éventuelle cassation.
En revanche, il est rare que I on confère une autorité particulière aux décisions des juges du fond, moins que la Cour de cassation n ait pas statué sur le point de droit en question ou à moins que il y ait résistance des gués du fond, qui refuseraient de se soumettre à la jurisprudence de la Haute juridiction. On peut encore considérer que la jurisprudence n existe pas réellement en elle-même : d une certaine manière, ce serait la doctrine (les auteurs qui écrivent sur le droit) qui permettrait à la solution retenue par les décisions de justice de devenir jurisprudence.
En effet, lorsque I on entend la jurisprudence dans un sens substantiel, I on désigne I uniformité des décisions sur un point de droit. Or, il s agirait là d une sélection de la part de la doctrine, qui décide de mettre en valeur, parmi les décisions rendues, ratines plutôt que d autres. Cette sélect de mettre en valeur, parmi les décisions rendues, certaines plutôt que d autres. Cette sélection est donc largement arbitraire et elle échappe au juge : le juge ne serait donc pas seul à I origine de la formation de la jurisprudence.
AI existe ainsi, surtout depuis la fin du sexe S, une forte tradition doctrinale qui consiste à analyser et à citer les arrêts (on dénommait au sexe S les auteurs qui sa adonnait, les « radaristes »). Cette tradition pourrait d ailleurs être considérée comme assez narcissique : en commentant un arrêt, i. Eu. Ne donnant du poids à la jurisprudence, la doctrine élève le statut de sa propre intervention, comme un chercheur faisant une découverte scientifique.
Sans aller jusque là, il est vrai que la doctrine contribue à I émergence de la jurisprudence car, si elles ne sont pas commentées, par ex. Dans des revues juridiques, les décisions de justice restent dans I ombre, inconnues notamment des praticiens, juges et avocats notamment. En outre, la doctrine interprète les décisions de justice, surtout les arrêts de la Cour de cassation dont la motivation est traditionnellement peu développée : il faut alors terminer « ce que a voulu dire » la Cour, et une même décision peut être interprétée dans des sens différents par les auteurs.
On peut alors considérer que la jurisprudence est reconnue a posteriori : elle ne naît pas de I exercice du pouvoir judiciaire, mais de sa révélation par la doctrine, notamment car elle implique une appréciation de la qualité des décisions. B La fonction de la j des décisions. B La fonction de la jurisprudence L originalité de la jurisprudence, déjà perceptible dans son processus de formation, se retrouve quant aux fonctions de la jurisprudence. Traditionnellement, le juge est I interprète de la oie (10) ; 2 mais la jurisprudence peut-elle aller au-delà, et se faire le concurrent de la loi, et créer du droit (20) ? 0) L interprétation de la loi L interprétation est le complément nécessaire de a règle de droit, car elle accompagne le processus d application du droit : pour trancher e litige, le juge doit nécessairement comprendre la règle de droit, déterminer le sens de la règle de droit. Tel point que I art. 4 du Code civil dispose : « le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de I obscurité ou de I insuffisance e la oie, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice ».
La loi est ici comprise au sens matériel : le juge doit interpréter tant la loi au sens formel, que les règlements ou les traités internationaux (mais la CAGE est seule compétente pour interpréter le droit communautaire : v. Inféra, les sources internationales). Après avoir précisé la notion d interprétation (a), il conviendra d en rechercher les méthodes (b). Au) La notion d interprétation L interprétation est la recherche du sens d une règle obscure : quelle est sa signification, quelle est sa direction, son objectif ? Qui doit interpréter ?
Le juge interprète la loi pour pouvoir I appliquer au litige ; tout parti Qui doit interpréter ? Le juge interprète la loi pour pouvoir I appliquer au litige ; tout praticien du droit procède à I interprétation des textes ; la doctrine en fait profession. Mais auteur de la règle peut lui-même I interpréter : c est I interprétation authentique. L idée est logique : I auteur de la règle de droit est évidemment le mieux placé pour en préciser le sens. Cette idée est formalisée par I adage jus est interprétariat cajous est confère : c est au créateur de la oie que il revient de I interpréter.
L adage permet de protéger la souveraineté du pouvoir normatif, de I autorité qui a créé la norme, dans un système de concentration et de séparation des pouvoirs. Le législateur interpréterait la loi, le juge ses décisions et e pouvoir exécutif, les actes administratifs. Ainsi, le Roi s était réservé I interprétation de ses ordonnances et édits. La pratique a été reprise temporairement, au lendemain de la révolution française (de 1790 à I an VIE), au profit du Parlement qui bénéficiait du référé législatif. Ce procédé reposait sur le postulat de I absolutisme de la loi, mais présentait des inconvénients majeurs.
Le juge ne pouvant interpréter la loi et devant en référer au Parlement à chaque litige, les procédures étaient ralenties. En outre, cette pratique était peu respectueuse de la séparation des pouvoirs, puisque elle conduit, d une certaine manière, à faire intervenir le législateur dans le règlement des litiges. Ce sont les raisons pour lesquelles le Tribunal de cassation avait tenté de paralyser des litiges. Ce sont les raisons pour lesquelles le Tribunal de cassation avait tenté de paralyser le référé législatif en élevant que le sens de la loi était clair et précis et que il ne avait donc nul besoin d une interprétation.
L interprétation authentique n a plus guère cours ajoura hui que, d une part, pour le droit communautaire, par le biais des questions préjudicielles à la CAGE (v. Inféra, primauté du droit communautaire) et, d autre part, pour les actes administratifs. Ceux-ci sont interprétés par I Administration elle-même dans des circulaires administratives ou des instructions ministérielles (qui peuvent d ailleurs être opposées à I administration par es usagers lorsque elles sont publiées, depuis un décret du 28 nov.. 83) et des réponses ministérielles aux questions écrites posées par les parlementaires (qui sont au contraire des interprétations officieuses, dépourvues d effet juridique). Mais on peut aussi signaler la tendance des juridictions suprêmes à interpréter leurs propres décisions : certains arrêts de la Cour de cassation font I objet d une note au PIC (Bulletin d information de la Cour de cassation) de la part du conseiller rapporteur, qui éclaire le sens de I arrêt rendu, essentiellement à destination des juges du fond.
D autres arrêts font I objet d un communiqué, moins conique et moins détaillé que la note, qui s adresse davantage au grand public. Cependant, la méthode des notes au PIC a pu être critiquée dès lors que, ce faisant, la Cour de cassation brouille parfois le sens de s PIC a pu être critiquée dès lors que, ce faisant, la Cour de cassation brouille parfois le sens de ses arrêts par des messages annexes, par ex. En y introduisant des nuances que I arrêt ne comportait pas, alors que I arrêt est pourtant 3 destiné à uniformiser la jurisprudence !
Une autre critique peut être formulée : dès lors que les notes au PIC sont gênées par un conseiller rapporteur, cela semble exclure que il s agisse de I interprétation donnée par la formation qui a rendu I arrêt (i. Eu. De une véritable interprétation authentique) et, pourtant, cela ne semble pas non plus constituer une doctrine d auteur puisque elle figure dans un support officiel. On peut donc regretter que la Cour de cassation préfère ces documents complémentaires à une motivation plus explicite que celle que elle adopte traditionnellement, surtout à I heure où elle renonce à I hypocrisie de son absence de pouvoir créateur !