Les cheminots une identit professionnelle en mutation

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Université Paris I Panthéon Sorbonne Master 2 Professionnel Communication Politique et Animation locales Les cheminots : une identité professionnelle en mutation ? L’exemple de la Direction commerciale des ventes indirectes Mathilde Cartolaro Sous la direction de Madame Sandrine Lévêque. Septembre 2009 AVERTISSEMENT L’université n’entend aux opinions enlises dans ce mémoire.

Ce propres à leur auteur 2 Remerciements Je remercie : orga nn pr tion ni improbation onsidérées comme La Direction des ventes indirectes pour son accueil, et plus particulièrement les équipes Ventes agences de voyages et Réseaux tant pour leur bonne umeur quotidienne, que pour le savoir-faire qu’ils ont partagé. Benoît, Julien, Aurélie, Corinne, Morgane et Agnès, d’avoir bien réalité empirique 12 l. La construction sociale d’une identité par la … 12 grève a) La conception ordinaire des cheminots — 13 b) Une mise en scène de l’identité cheminote . .. 15 Il. La nature de la culture cheminote au sein de la Direction des ventes indirectes…. a) Les fondements de l’identité collective : Pacquisition du statut de cadre permanent . 18 b) Les facteurs révélateurs de l’esprit cheminot Chapitre 2. Un rapport à l’entreprise particulier : une corporation rofessionnelle … 26 l. Les processus de socialisation en cours à la Direction des ventes Agences/Entreprises .. 26 a) L’idéologie d’une identité unifiée : le partage de valeurs communes . ) L’attachement à rentreprise : une présentation 30 Il. Le rôle de l’entreprise dans l’homogénéisation des relations du groupe à la direction .. 34 a) Les possibilités de « faire carrière un moyen de mobiliser cheminots et contractuels 34 b) Intégrer ses employés : les outlls de communicatlon utillsés par la direction……. ….. 38 Chapitre 3. une légitimité professionnelle remise en cause avec ‘ouverture à la concurrence ? . 3 légitimité professionnelle remise en cause avec l’ouverture à la concurrence ? 2 l. L’évolution vers un nouveau modèle économique, social et culturel…… a) D’une logique de service public aux impératifs commerciaux : les reactions face ? l’ouverture à la concurrence au sein de la direction des Ventes Agences/Entreprises …. 43 b) L’engagement des cheminots dans le processus de modernisation de l’entreprise : entre partlcipations et réticences aux changements 46 Il. Les mutations professionnelles en a) Une professionnalisation des métiers : l’histoire des pôles Agences et Réseaux…….. 9 b) Les incertitudes sur l’avenir du statut de Conclusion — 57 Bibliographie 59 Annexes — 60 4 Introduction « Une culture d’entreprise peut être comprise comme la conséquence du type d’identités collectives qui trouvent ? ffronter, se dominer ou PAGF 3 au sein des organisations »1 Travailler au sein d’une organsation, que ce soit une entreprise privée ou publique, un ministère ou encore une association, de petite ou grande taille, appelle forcément à un engagement, souvent vécu de manière inconsciente par l’individu.

On partage un bureau, on mange et discute avec d’autres. On est soumis à des contraintes que ce soit sur le temps de travail, ses méthodes ou sur le respect de sa hiérarchie. On adopte des comportements peu naturels au départ mais qu’on intègre spontanément. On est influencé dans sa façon de raisonner et d’interpréter son expérience ou celle des autres comme l’explique R.

SAINSAULIEU : « les professions sont des formes historiques d’accomplissement de soi, des cadres d’identification subjective et d’expression de valeurs d’ordre éthique ayant des Slgnificatlons culturelles »2 Des codes régissent le milieu où l’on travaille, faisant de la masse individus travaillant au sein de l’organisation, un groupe partageant des valeurs, des normes. Mais l’identité n’est pas seulement celle du groupe, elle est aussi celle de l’entreprise.

Les valeurs de la SNCF sont assez absorbantes : j’ai souvent entendu dire « la SNCF c’est un peu comme la famllle » ou encore « on traite nos stagialres comme la famllle D’ailleurs comme on l’analysera plus tard, de nombreux collègues sont fils ou filles de cheminots. Cest ce qui m’a poussé à orienter mon travail vers la problématique des identités professionnelles. 3 évolution, avec l’ouverture à la concurrence début 2010. Que deviennent les identités professionnelles face au changement de fonctionnement de la structure ?

En effet, les valeurs et les normes changent, faisant évoluer la culture d’entreprise, du fait du repositionnement des acteurs face à la structure. La SNCF fut jusqu’à aujourd’hui un symbole de l’entreprise publique française. Sa situation de monopole, a souvent été justifiée au nom du sen,’ice public. Ce point controversé par les partisans du modèle libéral, est remis en question dès janvier 2010 avec R, Sainsaulieu R , l’identité au travail, Presses de Sciences po, Paris, 1988 Cr, Dubar, P. Tripier, Sociologie des Professions, Armand Colin, Paris, 1998 l’ouverture à la concurrence.

En effet, l’intégration européenne est une menace pour ce sen,’ice public typiquement français, d’autant plus que son secteur d’activité est marchand. Mais depuis plus dune quinzaine d’années, la SNCF développe sa branche commerciale avec ses logiques économiques de rentabillté et de productivité. La SNCF est constituée de cinq branches. La branche commerciale est SNCF Voyages (anciennement Voyages France Europe), où j’effectue mon sta e et ui fut donc mon terrain d’obsen,’ations, au niveau PAGF s 3 europeen.

De nombreux chantiers sont mis en œuvre, pour améliorer la qualité du service aux voyageurs, la relation client/agent SNCF, ou encore pour tenir les promesses quant à la sécurité, la régularité des trains… Cela s’accompagne de changements internes, que ce soit au niveau de la gestion des ressources humaines comme de la mise en place de nouveaux instruments pour moderniser l’entreprise et son fonctionnement. La SNCF prend clairement de nouvelles orientations, liées au contexte européen et mondial, qui tendent vers l’optimisation commerciale.

Les nouvelles positions de ‘entreprise, plus offensives face à la concurrence, ainsi que la modernisation de ses outils de travail, semblent remettre en cause le statut de cheminot et la dimension culturelle qui l’accompagne. Les « avantages » que procure ce statut, à la veille de l’ouverture à la concurrence, peuvent être assez contraignants pour l’entreprlse. Cette masse salariale est peu flexible car le statut garantit la sécurité de l’emploi à ses bénéficiaires.

L’entreprise recherche des profils de personnes ne rentrant pas à la SNCF uniquement motivées par ce statut, mais surtout intéressées au développement du potentiel e l’entreprise. De plus, les mouvements sociaux, les grèves, ont noirci Pirnage de rentreprise et des cheminots, il est assez courant d’entendre parler des cheminots en tant que « privilégiés La SNCF connait de nombreuses failles au niveau de sa communication externe, et a du mal à contrôler son imaee dan Nous entendons plus PAGF 6 3 innovations technologiques ou le développement de sa gamme de services.

Aussi, l’ouverture à la concurrence représente un changement dans l’organisation de l’entreprise et dans son fonctionnement interne. La SNCF risque d’embaucher moins au 6 tatut de cheminot, et plus au statut de contractuel. Ces changements sont en train d’être pensés, et vont sûrement provoquer une mutation de l’identité professionnelle dans l’entreprise. On peut en effet parler d’une corporation cheminote, avec ses propres valeurs, ses cadres d’identification et un système de pensées qui lui est propre.

La relation qui lie le salarié à son entreprise est particulière, elle repose sur ce statut de cheminot qui fait de ce groupe professionnelle « une profession fermée »3. Le fait que la SNCF soit une entreprise publique, implique une structure d’organisatlon ociale particulière avec comme corollaires : l’existence et l’attachement à un statut professionnel, la forte présence des syndicats et un certain sens du service public.

Le caractère spécifique de la SNCF se repère aussi et surtout au niveau de son histoire, socialement marquée par les grèves et Pimaginaire que nous pouvons avoir des employés des chemins de fer : les cheminots. La représentation que nous avons du cheminot, est plutôt caricaturale : le cheminot serait celui qui travaille dans les ateliers, ou qui conduit les trains et surtout, celui qui ferait PAGF 7 3 l’imaginaire collectif. Pourtant, être cheminot est avant tout un statut salarial ; celui de cadre permanent, statut obtenu après la soumission de la personne à des tests.

Tous les salariés de la SNCF ne sont pas cheminots, le statut de contractuel existe en parallèle » Derrière le terme cheminot se cache une multitude de métiers, de grades, de profils sociaux, dont « les profanes » de la SNCF, ne peuvent avoir idée, tant l’association du terme cheminot à celui de grève semble être une évidence. Ce contraste entre les cheminots que je côtoie tous les jours dans la branche commerciale et ceux décrit ans les médias, les films, les livres, m’a paru intéressant à analyser.

Bien sur, nous pourrions objecter que cette distinction tient du fait que ce sont les cheminots du terrain qui participent aux mouvements sociaux, et que ceux avec qui je travaille, sont à la direction, environnement professionnel plus feutré et peu propice à la lutte syndicale. Ainsi, les « vrais » cheminots seraient les mécaniciens, les conducteurs, les électriciens, bref, les corps de métiers les plus proches du monde ouvrier, constituant une force revendicative et de défense des droits pour tous les employés de la SNCF. Pourtant l’identité cheminote existe en dehors du syndicalisme, qui D.

Segrestin, le phénomène corporatiste. Essai sur l’avenir des systèmes professionnels fermés en France. , Revue Française de sociologie, 1987, Volume 28, nD2 Annexes : Entretien n04, p partagée par mes collègues et qu’un attachement à l’entreprise ressortait des discussions qu’ils pouvaient avoir. Ainsi je voulais voir comment l’identité cheminote dépassait le cadre syndicale et tendait à créer une culture d’entreprise forte, en m’appuyant sur mon expérience au sein de l’équipe des ventes agences de voyages. La profession de cheminot intéresse beaucoup les théories de l’action collective.

La bibliographie est vaste, mais se cantonne souvent à l’étude des mouvements sociaux ou encore, de la construction de l’identité des cheminots à travers les grèves5. Ces écrits font abstraction des problématiques liées à la structure de l’organisation ou à Videntité professionnelle, et participent à la diffusion d’une image combattive et ouvrière du cheminot. Ainsi, je me suis intéressée aux constructions sociales et culturelles au sein des entreprises, sewant d’instruments de soclallsatlon des individus en rganisation.

La sociologie des organisations, sous-champs de la sociologie, fait écho à ces problématiques. Nous avons pu retrouver ces théories dans différentes lectures. L’exemple des cheminots est souvent un appui pour la réflexion d’auteurs sur « les professions dites fermées » ou encore le « corporatisme d’entreprise »6. Ainsi je me suis inspirée de ces différents travaux pour théorlser nos problématiques et rendre compte du fonctionnement de cette profession. Les travaux de Lucie BAUGNET7 sur les identités sociales présentent une vaste réflexion sur leur instabilité et leur ynamique.

Nous ne Claude DUBAR et Pierre TRIPIER8, qui analyse les systèmes professionnels dans toutes ses dimensions. Cette sous-discipline est apparue dans le courant des années 1980 en France, auparavant aucun ouvrage primordial français n’abordait le rôle des métiers et des professions dans la socialisation des individus. Ce champ reste encore incomplet : la recherche en sociologie sur la culture d’entreprise est peu riche. J’ai trouvé très peu d’ouvrages traitant du sujet d’un point de vue sociologique, l’angle managérial étant souvent la perspective d’analyse. Mais C. Chevandier C.

Cheminots en grève ou la construction d’une identité (1848-2001 Maisonneuve & Larose, Paris, 2002 D. Segrestin, Le phénomène corporatiste. Essai sur l’avenir des systèmes fermés en France, Fayard, 1985 7 L. Baugnet , L’identité sociale, Dunod, paris, 1998. 8 C. Dubar, P. Tripier, Sociologie des professions, Armand colin, paris, 1998 cette insuffisance bibliographique fut comblée par les théories sociologiques concernant les systèmes professionnels9. Tous ces ouvrages ont constitué un instrument de travail adéquat et indispensable à notre étude de la profession ch ous avons complété avec