Leibniz Algebre Geometrie Theorie Des Nombres Libre
Université de Nantes – 10 avril 2013 « Algèbre, géométrie et théorie des nombres aux XVIIIe et XIXe siècles .
Définitions, organisations, interactions, circulations » « Algèbre, théorie des nombres et géométrie chez Leibniz » 1/12 ALGEBRE, GEOMETRIE et THEORIE DES NOMBRES chez LEIBNIZ or2s Introduction Sni* to View On pourrait se dema er d’une communicatio Leibniz lors d’une jou siècles, alors qu’il meurt 16 ans ns de la présence aux 18e et 19e après le début du 18e siècle et s’inscrit, à bien des égards, dans des thématiques et des problématiques propres à la philosophie et aux sciences du 17e iècle, notamment quand on considère le fondement théologique de son système de la connaissance et le rôle central joué par les mathématiques anciennes et la scolastique. Néanmoins, si l’on envisage le thème de cette journée, il ressort que Leibniz apparaît, non comme un précurseur car il me semble qu’il faut manier cette catégorie avec beaucoup de prudence, mais comme un penseur de la relation entre l’algèbre, la théorie des nombres et la géométrie, ainsi que la géométrie est la science des figures et même, de façon plus générale, la science de l’étendue, voire de l’espace et des situations en lui.
Leibniz conçoit néanmoins une forme d’identité entre ces disciplines mathématiques dont l’examen pourrait être utile pour ouvrir cette journée d’études, en ce que cette idée d’une identité pose d’emblée la question forte de la condition de possibilité d’une unité des mathématiques quand elles s’intéressent à la grandeur prise dans son sens le plus large et dont la définition par extension réunit dans un ensemble apparemment complet les grandeurs déterminées et numériquement quantifiables, les grandeurs indéterminees mais quantitatives, et les grandeurs non-quantitatives ou non- uantifiées telles que la situation. siècles 2/12 Ne sachant dans quelle mesure Leibniz vous est familier, je me propose de vous présenter quelques grandes lignes de ses travaux par lesquelles se puisse saisir la relation qui existe entre l’algèbre, la théorie des nombres et la géométrie.
Ainsi, dans un premier temps, je présenterai le rôle-clef joué par le symbolisme quand il s’agit pour Leibniz de fonder un art des combinaisons qu’il no atoire « spécieuse » ou PAGF 7 OF un second temps, je vous montrerai de quelle manière cette caractéristique se déploie dans le champ de la géométrie, notamment de la éométrie des situations afin, en conclusion, de poser les jalons pour une réflexion sur le rôle joué par le concept de « relation » au sein des mathématiques leibniziennes et de leur unification ce qui, d’ailleurs, fait largement écho à ce que Leibniz présente dans sa philosophie de la connaissance et dans sa métaphysique. 1. Le rôle central du symbolisme : la combinatoire, spécieuse ou caractéristique Le contexte de l’invention de la caractéristique est celui du projet plus large d’une « science générale c’est-à-dire d’une science du pensable en général. Leibniz écrit, dans ses
Fondements du calcul rationnel que la caractéristique universelle est un « art de se servir des signes au moyen d’un calcul exact d’un certain genre « 1 et qu’elle a vocation à être « l’organon de la science générale de tout ce qui tombe sous le raisonnement humain »2_ En tant que telle, la caractéristique prend alors modèle sur les disciplines déjà existantes qui emploient les signes à des fins démonstratives : les mathématiques et, plus particulièrement, l’arithmétique et l’algèbre. Dans ce même texte de 1688-89, Leibniz écrit . (1 [Les] signes sont d’autant plus utiles qu’ils expriment mieux la otion de la chose désignée, de telle sorte qu’ils puissent servir aussi au raisonnement et non pas à la seule représentation. Suivent les exemples des caractères chimiques, des PAGF 3 OF adamique et des langues ordinaires qui ne servent pas, ou pas correctement le raisonnement] Tel est en revanche l’avantage admirable que fournissent, seules à ce jour, les marques de l’arithmétique et de l’algèbre, où tout raisonnement coïncide avec celle du calcul. Fondements du calcul rationnel, 1688-1689, in Recherches générales, page 168. Ibid. , page 168. Ibid. , page 167. 2 siècles : 3/12 Il ne s’agit pas, cependant, d’une simple illustration de la puissance de la caractéristique par le biais de deux types de symbolismes qui incarneraient de façon fortuite et engageante la promesse plus vaste d’une caractéristique universelle qui permettrait de réduire la pensée à un calcul. Il y a, en réalité, entre la caractéristique et l’arithmétique ou l’algèbre une relation que le terme de « combinatoire » ermet sans doute de mieux appréhender que celui de première serait de ne jamais produire quelque contradiction que ce soit.
Il serait alors possible d’assigner à ces notions primitives es caractères, d’établir les opérations par lesquelles les caractères ou les formules (suites de caractères) peuvent être substitués les uns aux autres ou composés les uns avec les autres, et, ainsi, de réduire la pensée en général à un « calcul de la raison Néanmoins, une telle caractéristique n’est pas réalisée, quand Leibniz l’envisage, si ce n’est, affirme-t-il, dans l’algèbre et l’arithmétique. De fait, 10 ans plus tôt, en avril 1679, Leibniz produit une série de petits textes dans lesquels il s’essaie à une caractéristique fondée sur les nombres. Dans ce cas précis, les propriétés des ombres premiers auxquelles il s’exerce par ailleurs – l’aiguillonnent parce qu’il y voit l’analogue des termes primitifs, de même qu’il voit dans la décomposition de tout terme en ses facteurs premiers l’analogue de la définition d’un terme dérivé en ses termes primitifs.
Il se sert également de la propriété relationnelle de « nombres premiers entre eux pour exprimer la qualité et la quantité d’une proposition, c’est-à-dire sa forme négative ou affirmative, et sa forme universelle ou particulière. L’analogie avec les nombres premiers est fondée dans une conception méréologique des notions et des ropositions : dans une pensée vraie, il y a toujours quelque chose qui est contenu dans autre chose, à la manière de la mortalité des hommes qui peut être pensée, soit comme le fait que la notion de mortel est contenue dans celle d’homme, soit comme le fait que l’humain est une espèce du genre mortel. Ancré dans PAGF s OF mortel.
Ancré dans la relation de la partie et du tout, par le prisme de l’inhérence d’une notion dans une autre, le calcul de la pensée semble appeler l’emploi des propriétés spécifiques des nombres, considérés pour leur part comme des ensembles ‘unités sur lesquels il est possible d’opérer des partitions : 4/12 (2. ) Sil y avait une infinité de genres les plus hauts, ou posés comme les plus hauts, comme il y a une infinité de nombres (parmi lesquels les nombres premiers peuvent être pris pour les genres les plus hauts [… l), il faudrait au moins constituer l’ordre des genres les plus hauts comme l’est celui des nombres, et ainsi Fordre apparaîtrait aussi dans les genres inférieurs. 4 Or, de l’aveu de Leibniz lui-même, il n’est pas parvenu à achever cette caractéristique numérique, pour deux raisons.
L’une, non spécifique à la forme e l’arithmétique, consiste en la difficulté de modéliser la pensée dans sa totalité sous la forme prédicative « S est P » et par le truchement des seules méréoloeiques de PAGF 6 OF identique à A : homme homme est identique à homme. Donc, en dépit du postulat méréologique que Leibniz défend pour la pensée, les lois arithmétiques du calcul fondées essentiellement dans la primarité des nombres ne fournissent donc pas le moyen de réaliser sa caractéristique, même si elles en sont un modèle. Alors, en 1686, quelques années après ses essais de caractéristique numérique, Leibniz rédige n long texte important : les Recherches générales sur l’analyse des notions et des vérités5.
Il y expose les principes et opérations de son calcul logique – dont les principes de l’idempotence qui affirme que AA=A et de la substituabilité des coïncidents ou, encore, l’existence d’un élément neutre, d’un élément inverse (la négation) et d’un terme indéterminé X qui sert de variable et permet de dire, par exemple, si la notion B est contenue dans la notion A, que A=BX, si homme est animal, animal est contenue dans homme et homme=animal (rationnel, par exemple). Dans ces travaux, ‘inspiration de [‘algèbre est nette, en cela que Leibniz remplace explicitement la triade logique classique de la notion, du jugement et du raisonnement par celle, moderne et algébrique, de la formule, de la relation et du calcul : « Il est donc manifeste que les formules (parmi lesquelles on peut comprendre les caractères eux-mêmes comme les plus simples d’entre elles), les relatlons et les opérations sont entre elles comme les notions, les énoncés et les syllogismes. « 6 Les relations sont, par exemple, celles de l’équipollence, de l’inclusion, de la similitude, de la détermination, etc.
Les opérations sont ce qui Iculer, de « produire des Les opérations sont ce qui permet de calculer, de « produire des relations par des transformations de formules, elles-mêmes accomplies selon certaines lois prescrites au préalable Ce sont, en particulier, des essais légèrement postérieurs aux « Recherches 4 Sur la synthèse et l’analyse universelles ou sur l’art d’inventer et de juger, circa 1683-86, ibid. , pages 135-36. Ibid. , pages 200-302. 6 Fondements du calcul rationnel, op. cit. , page 169. 5/12 générales », Essai de calcul des coïncidents et Échantillon élégant e démonstration dans les abstraits7, qui révèlent deux éléments d’importance.
Le premier est celui d’une prévalence, désormais, de l’algèbre sur l’arithmétique au sein de l’invention de la caractéristique. Ces essais développent en effet un aspect du calcul logique relatif à sa particularité de l’idempotence par l’introduction d’une opération dite d’addition réelle qui exprime la relati mposition d’un terme en PAGF BOF unicité, alors même que la substitution est l’opération fondamentale du calcul. Dans ces essais, tout cela donne un genre d’écriture familièrement algébrique, puisqu’on lit (3. AOB=L signifie que L contient A, L contient B, et que A et B ensemble sont identiques à L, c’est-à-dire le composent. De ce fait, AOA=A.
Il est par ailleurs remarquable que Leibniz propose pour ce calcul dit des « coïncidents » un ensemble de règles qui sont manifestement de nature algébrique sans pour autant se confondre avec les règles mêmes de l’algèbre à cause de l’idempotence. Par exemple, on retrouve la commutativité de l’addition réelle, la possibilité d’additionner deux termes quelconques, la soustraction (qui suppose la possibilité de toujours trouver un élément non-communicant avec n autre et contenu dans un 3e), mais surtout des règles d’addition et de soustraction des termes selon qu’ils sont coïncidents, communicants (avec une partie commune) ou noncommunicants, neutres (le « rien »), etc. – quelque chose qui ressemble à une version algébrique des intersections et unions ensemblistes.
Néanmoins, et tel est le second élément important, dans ces essais, la caractéristique n’est certes pas algébrique mais l’algèbre, elle, se dévoile comme étant caractéristique de la même manière, d’ailleurs, que le calcul de l’addition réelle et des coïncidents est lui aussi une pplication de cette dernière : (4. ) Puisque la spécieuse générale n’est rien d’autre que l’art de représenter et de traiter les combinaisons au moyen de marques et puisqu’on peut inventer différentes lois pour ces combinaisons, il en résulte différentes manières de PAGF calculer. N’est pas prise en compte ici la variation qui consiste seulement dans le changement d’ordre et nous tenons AB et BA pour identiques. La répétition n’est 7 Ibid. , pages 407-33. 6/12 pas prise en compte davantage : AA est pour nous identique à A.
Le présent calcul peut donc être appliqué partout où ces lois sont observées. En effet, on comprend qu’il est admis par Leibniz que la combinatoire est un projet général dont il réalise certains spécimens, soit sous la règle de l’idempotence qui annule toute répétition, soit sous celle de la répétition, soit sous celle de la variation qui requiert le souci de l’ordre, soit sous celle de la commutativité qui l’ignore. Néanmoins, il ressort de tout cela que les éléments de la combinatoire ou termes de la caractéristique ne sont pas des grandeurs, même non-numériques. L’ob’et de la caractéristique n’est pas l’épalité, ni même l’inhére