Groupe Optimal
Le groupe optimal Gabriel Eckert Unité d’évaluation de l’enseignement et d’insertion professionnelle EPFL – UNEED’IP 1998 Table des matières Fonctionnement du groupe Introduction Théorie du groupe o ors3 Sni* to View Modèle énergétique du fonctionnement du groupe 4. Illustration des formes d’énergie Maturité du groupe 6. Résumé du modèle de fonctionnement du groupe Rendement optimal dans le groupe 4 6 7 9 travail en groupe constitue une difficulté souvent relevée par ceux qui le pratiquent — ou le subissent!
Ces difficultés de fonctionnement que l’on rencontre dans eaucoup de groupes nous rappellent que fhomme est moins un être de raison que d’affectivité, et que ce sont justement les aspects affectifs qui se révèleront déterminants pour surmonter les inévitables crises que les groupes devront affronter. On peut en effet affirmer que « ce sont les sentiments qui nous conduisent et non la logique, alors que nous croyons toujours être guidés par notre raison. Celle-ci nous fournit, en réalité, les arguments propres à justifier notre comportement » ([Tournier89] p. 4). Le présent résumé a pour but de présenter une approche du onctionnement du groupe qui accorde autant d’attention aux contenus traités par les participants qu’au processus qui se déroule entre eux. Cette approche évite de considérer l’être humain comme pouvant être « découpé » en tranches qui pourraient être isolées. Ainsi on ne peut pas s’occuper efficacement de l’une (l’argumentation rationnelle par exemple) sans interaction avec les autres (les intérêts, les attitudes, les valeurs, les sentiments).
Or la vie de groupe va immanquablement mêler ces plans et aboutir à des blocages ou des dysfonctionnements si ces divers aspects ne sont pas pris n compte à chaque étape de l’évolution de l’équipe. Ce résumé vise donc à sensibiliser le lecteur à ces aspects, et ? favoriser l’apprentissage d’une attitude plus consciente des mécanismes et enjeux de la vie du groupe. Il faut reconnaître ue ces obiectifs sont rareme ystématiquement car on y PAGF 7 3 rarement poursuivis systématiquement car on y oppose généralement les arguments suivants ([de Landsheere89] p. 60): • Les attitudes ne s’enseignent pas mais se transmettent par lente imprégnations (« Attitudes are caught and not taught »). • Il est moralement inacceptable de vouloir faire acquérir de anière explicite des attitudes déterminées. Si le premier point n’est guère étayé (on trouve plutôt des preuves du contraire), le deuxième caractérise un refus d’admettre que la formation consiste de toute manière à transmettre des attitudes et qu’il est donc souhaitable de désigner explicitement celles qu’on entend développer.
Derrière ces arguments se trouve souvent une vision spontanéiste: le travail en équipe ne peut pas être enseigné, mais seulement être appris par la pratique. Si la pratique est encore davantage qu’ailleurs indispensable, il est indiscutable qu’une ormation est possible dans ce domaine, au mons sous la forme de la conscientisation et de la G. Eckert: e groupe optimal -3- mise en évidence de certains rouages et mécanismes courants du fonctionnement d’une équipe.
La pratique réussie du groupe permet de développer des habiletés importantes, au nombre desquelles on peut citer: la capacité à partager le leadership; le sens de l’organisation, de l’appartenance et du partage des tâches; la capacité à tenir des réunions efficaces; le sens PAGF 3 réactions spontanées. Pour cela, ce résumé se réfère principalement aux travaux issus du Laboratoire e recherche sur le groupe optimal que St-Arnaud a actualisé ensuite ([St-Arnaud78] et [St- Arnaud89]).
Cette approche n’ignore pas les nombreux travaux consacrés au fonctionnement des groupes car chaque aspect traité y fait l’objet d’une synthèse de la littérature existante. Par comparaison, le traitement du fonctionnement des groupes parait bien sommaire dans les ouvrages généralistes, qui ne dépassent guère la distinction contenu-processus et l’énumération des styles de leadership (par exemple [Myers90] chapitre 11).
Bien sûr, une partie de la matière qui suit peut être vue comme u simple bon sens, et à ce titre recoupe une pratique empirique et artisanale. Mais sa formalisation et sa mise en perspective apporte sans aucun doute d’indéniables avantages. Il s’agit effectivement de principes auxquels on ne peut qu’adhérer et qui paraissent même triviaux lorsqu’on les énonce. On peut arguer qu’il ne s’agit guère que de bon sens, et qu’à ce titre il n’y a là aucune connaissance spécifique.
Cependant, il y a là bien davantage que du bon sens: il s’agit de bon sens formalisé et explicité. C’est cela qui le rend utile et précieux, et qui fait qu’au-delà des rincipes auxquels on ne peut qu’adhérer, il y a là des principes que l’on peut appliquer. Il ne faut cependant pas perdre de vue le fait que cette matière traite surtout de comportements, d’attitudes, et de leurs valeurs sous-jacentes. Dans ce domaine les principes, les règles et les recettes sont de peu d’utilité our ne s dire qu’ils s’avèrent plutôt néfastes.
Voilà pour 3 pour ne pas dire qu’ils s’avèrent plutôt néfastes. Voilà pourquoi cette matière ne peut pas être enseignée comme une matière théorique. Il importe de demeurer proche de la vie du groupe, par exemple en amenant rogressivement l’éclairage voulu au moment où les membres sont particulièrement sensibles aux thèmes traités: naissance du groupe, participation et communication au sein de celui-ci, et enfin maturité du groupe.
On peut, de cette maniere, offrir un cadre théorique suffisamment étoffé pour permettre le recul et la prise de conscience féconde. 2. Théorie du groupe optimal La notion de groupe optimal met l’accent sur la vie quotidienne du groupe, sans prétendre atteindre un idéal mais en visant à se rapprocher de l’état le plus favorable, compte tenu d’une sltuation donnée. Dans la présente section, le modèle théorique utilisé est d’abord présenté et fournit ainsi la grille d’analyse qui est ensuite utilisée pour des considérations plus pratiques.
Dans le cadre de ce modèle, le groupe est vu comme un organisme qui va traverser des phases d’existence (naissance, croissance, maturité, mort) et former une réalité psychosociale, en partant du postulat selon lequel il ne suffit pas de réunir quelques personnes dans un lieu donné pour constituer un groupe. On peut considérer qu’il y a deux facteurs qui permettent la naissance d’un groupe, c’est-à-dire G. Eckert: Le groupe opti PAGF s 3 Pour que celle-ci devienne commune, il faut ensuite qu’elle nécessite réellement la mise à contribution des membres, et non d’un seul individu par exemple.
Notons enfin que c’est la réalité perçue par les membres qui compte et non les données objectives existantes. Les auteurs relèvent qu’il serait utopique de croire qu’une perception commune est rapidement et simplement obtenue dans un groupe naissant. La passibilité de relations entre chacun des membres On désigne par relation les « liens de dépendance ou d’influence réciproque entre les personnes » ([St-Arnaud78] p. 5).
On ne considère icl que des groupes à caractère «démocratique» dans lesquels chacun des membres interagit avec chacun des autres membres et dans lesquels il y a une répartition du pouvoir entre les membres. De ceci découlent différents thèmes tels que le leadership, les normes de groupe, la communication, le climat ou encore la cohésion. On voit donc apparaitre ici la dualité tâche-coopératlon, qul formera la grille d’analyse générale pour l’étude et l’évaluation du fonctionnement du groupe.
Le groupe est caractérisé par l’interaction ou l’interdépendance de ses membres, ce qui se anifeste aussi bien dans leurs relations que dans leur perception d’une cible. Cette façon de voir évite à la fois de se polariser sur le but commun en négligeant les relations entre membres, comme dans le courant du développement organisationnel, ou au contraire de mettre l’accent sur les interactions et relations au détriment de la tâche du groupe (tendance typique du courant de la dynami ue de groupe).
On peut distinguer le prou , du eroupement, de la PAGF 6 3 distinguer le groupe de la foule, du groupement, de la bande et de l’organisation. Formellement, un groupe peut être défini comme « un champ sychologique prodult par l’interaction de trois personnes ou plus, réunies en situation de face à face dans la recherche, la définition ou la poursuite d’une cible commune; interaction de chacune de ces personnes avec cette cible commune, et interaction des personnes entre elles » ([St-Arnaud78] p. 26).
En plus du caractère bipolaire déjà relevé, une pareille définition met l’accent sur la notion de champ pour préciser qu’un groupe a des propriétés différentes de celles de ses membres, et non pas qu’il a des propriétés supplémentaires à celles-ci. Cette différence e consiste donc pas en une caractéristique supplémentaire (être ensemble) mais signifie que les propriétés de l’ensemble remplacent les propriétés de ses éléments, qui ne peuvent plus être considérées isolément.
Le terme de synergie est parfois employé dans ce contexte, même s’il traduit mal cette idée car il fait seulement intervenir un effet ou une action auquel concourrent plusieurs facteurs bien coordonnés [Robert82]. Alternativement, la biologie parle d’émergence, c’est-à-dire de propriétés nouvelles d’ordre supérieur [Robert82]. Dans le cas du groupe, la tentative d’isoler es propriétés de ses éléments détruit la réalité globale.
Les personnes qui constituent un groupe ne sont donc vues qu’en tant que membres du groupe, en laissant au second plan leurs autres aspects. Le groupe est considéré à partir de deux pôles aussi important l’un que l’autre: la embre avec la cible participation — interactio interaction de chaque membre avec la cible commune —, et la communication — interaction des membres entre eux. Ces deux facteurs sont toujours liés: les relations influencent la particpation et, inversement, l’intérêt commun influence les relations entre membres. G.
Eckert: Le groupe optimal -5- Un groupe qui fonctionne bien — un groupe optimal — est un groupe qui fait un usage judicieux de l’énergie totale disponible du groupe, autrement dit qui transforme les énergies individuelles latentes de chacun des membres en une énergie de groupe ([Prégent90] p. 205). Cette VISIOn conduit à considérer différentes formes d’énergie, et permet de formuler quatre principes du développement du groupe: • « La perception d’une cible commune ainsi que les relations qui s’établissent entre les membres par rapport à cette cible, sont génératrices ‘énergie » ([St-Arnaud78] p. 0). L’énergie est ici « ce qui rend capable de produire un comportement » mais, contrairement au cas d’un indlvidu, ne peut pas provenir d’une transformation bio- chimique d’éléments de l’environnement (air, nourriture). L’énergie du groupe doit être prélevée chez ses membres, et c’est ce prélèvement qui est ici dési né par génération, au sens de transformation PAGF 8 3 disponible augmente par rapport à l’énergie résiduelle. Il se détériore dans la mesure où l’énergie résiduelle augmente au détriment de l’énergie disponible » ([St-Arnaud78] p. 1). Ceci signifie simplement qu’un groupe n’est viable que dans la mesure où il y a une bonne participation des membres et un bon climat de groupe, puisque ces deux facteurs permettent la disponibilité d’énergie. • L’énergie disponible dans le groupe se décompose spontanément en une énergie de production et une énergie de solidarité ([St-Arnaud78] p. 34). Dans un groupe, un processus primaire de production est à l’œuvre, qui pousse sur le chemin de la recherche, de la définition, de la poursuite et de l’atteinte de la cible commune.
Ce processus collectif est lié à un mouvement énergétique individuel spontané — le besoin ndividuel de produire, qui est en soi lié à une énergie résiduelle — et se poursuit tant qu’il n’y a pas d’obstacles à la production. par allleurs, la conversion d’énergie individuelle affective — le besoin fondamental de chaque individu d’aimer et d’être aimé — conduit à une énergie disponible collectivement qui résulte de l’interaction entre les membres.
Il y a là un processus primaire de solidarité qui transforme cette énergie affective résiduelle en énergie de solidarité, disponible pour le groupe. Etant donné que les groupes de travail sont généralement formés ur la base des compétences de leurs membres, et non en partant de leurs affinités affectives, la solidarité est cet intermédiaire apte à faire dépasser la seule dynamique affective individuelle au profit d’un ffectif commun. Cette PAGF ç 3 mouvement affectif commun.
Cette solidarité est liée à une communauté d’intérêts et à l’obligation morale de ne pas desservir les autres et de leur porter assistance. Là également, on suppose que ce processus de solidarité est spontané, inhérent à tout groupe, et qu’il va se poursuivre tant que ne surviennent pas d’obstacles à la solidarité. ?? « Le groupe maintient son harmonie dans la mesure où il convertit une partie de son énergie disponible en énergie d’entretien » ([St-Arnaud78] p. 42).
Le groupe est un organisme fragile car, s’il peut être assimilé à un organisme vivant, il n’en a pas la structure physique stable. Il lui manque les organes sensoriels et le système neweux qul assureraient spontanément la régulation de la conversion de l’énergie des personnes (résiduelle) en énergie de groupe (disponible). C’est pourquoi le groupe doit développer la vigilance qui va repérer et lever les obstacles à la production et à la solidarité. Il y a donc là un processus secondaire d’autoG.
Eckert: Le groupe optimal -6- régulation qui est nécessaire à la survie du groupe et doit être alimenté par le prélèvement d’une énergie d’entretien, soustraite à l’énergie disponible. Il faut noter que, dans cette vision, la communication entre membres n’est pas une activité d’entretien du groupe mais bien une activité primaire et spontanée. Cest le repérage et la levée des obstacles à la communication qui doit faire l’objet de tâches d’entretien, et rien dans les éléments constitutifs du groupe (pe ible commune, relations 10 rif sa