dissertation de littérature
1) « Dans ces dessins mes mains rêvent » disait Man Ray, en quoi s’agit-il d’un recueil de rêves ? Par l’expression « mes mains rêvent », Man Ray désigne ici la part active, autonome des mains de l’artiste. Celui-ci se prend au jeu du dessin automatique qu’il réalise dans un état de semi- conscience, libérant son esprit de toute entrave à la creation. Paul Eluard et André Breton se désignent d’ailleurs comme des « rêveurs éveillés » (dictionnaire abrégé du surréalisme), on peut donc noter l’importance de la notion de rêve dans ce recueil, les ujets des œuvres témoignant de cette liberté propre au rêve.
On peut donc se demander en quoi « les mains libres » constitue un recueil de rêves ? Pour répondre à cett cette œuvre est le tr un moyen de libérer présents dans l’œuvr pour renouveler leur or 12 tout d’abord que is que le rêve est • aysages oniriques Snipe to View nextÇEge rréalistes tentent de libérer leurs pensées en exp rimentant le r ve à travers diverses techniques inspirées des travaux de Freud telles que le sommeil hypnotique (emprunté à la psychiatrie) et les états de demi- sommeil.
Ainsi, Man Ray réalise des esquisses avant le coucher et après le lever qui sont des moments propices à la création. Quant à Paul Eluard, il se qualifie de « rêveur » dans la préface des mains page libres, « la nuit blanche » faisant référence à l’idée de perte de la raison. Rêves et fantasmes sont donc au cœur de ce recueil pour nourrir l’imaginaire de l’artiste qui leur donne libre cours sans s’imposer de censure rationnelle ou morale.
Cette volonté de retranscrire les rêves accorde donc une grande place à la liberté de création qui s’exprime en se libérant des contraintes rtistiques et rejette la tradition en détournant les modes de représentation. Ainsi, les deux artistes essayent de garder le cadre onirique de leurs œuvres en se libérant des règles esthétiques. Man Ray en ne respectant ni la perspective, ni les proportions de ses dessins, offre à ceux-ci un espace illimité où le cadre et les contraintes matérielles sont absents.
Il donne ainsi ? ses desslns un aspect de collage (principe d’Introduire un élément emprunté à un tableau dans un autre tableau, sans que cet élément ne subisse de transformations), comme dans le dessin ? l’espion » où un vase, un arbre, une forme géométrique et une main, disposés ainsi à la même taille sur le même plan, semblent être issus d’univers différents et n’avoir aucun lien. Tous comme les rêves, les poèmes d’Éluard dissimulent une complexité métaphorique derrière leur apparence limpide et simple et attendent d’être déchiffrés par le lecteur.
Si le poète fait allusion à son propre mécanisme de création, on voit qu’il se qualifie de conditions proches de celles de Man Ray. ui aussi semble laisser son e 12 voit qu’il se qualifie de conditions proches de celles de Man Ray. Lui aussi semble laisser son esprit divaguer à partir des dessins. Le rêve permet donc aux deux arts de communiquer à travers le hasard et les associations fortuites qui offrent au lecteur un paysage surprenant bordé d’arbres roses et tapis d’ « herbe courbe comme un ventre Cependant les deux imaginaires se rencontrent dans la confrontation du dessin et du poème et se révèlent assez différents.
Dans « main et fruit Man Ray détourne la nature morte en dessinant un panier de fruit, animé par une main qui caresse un coing, symbole du sexe féminin ; Paul Eluard infléchit a thématique érotique de Man Ray vers plus de sentimentalité mêlée à la sensualité. Ainsi, à partir de cette scène, il imagine un retour dans le passé, où les fruits symbolisent la nostalgie de la jeunesse. Ses sentiments se superposent alors aux dessins de Man Ray pour en rendre la signification plus personnelle.
Les créations deviennent alors des comptes-rendus de rêves qui donnent lieu à des scenes fantastiques comme dans le tournant où une main disproportionnée attrape le flan d’une montagne, ou des scènes oniriques notamment le rêve du 21 novembre 936 qui montre le vol d’une locomotive au-dessus de New- York. On a ainsi l’impression que les œuvres sont réalisées sans contrôle de la raison par l’absence de cadres, en particulier de cadre temporel.
En effet les dessins en noir et blanc de Man Ray semblent 19 cadres, en particulier de cadre temporel. En effet les dessins en noir et blanc de Man Ray semblent n’appartenir à aucune époque du fait de la quasi-absence d’indices temporels pour les situer dans un contexte précis, ou du mélange de ces indlces quand il y en a. Il est ainsi complexe d’attribuer une date à l’arbre ose » qui semble représenter le jardin d’Eden avec Adam et Eve sous la fleur gigantesque ; l’arrière plan dissimulant un bateau, élément ici anachronique.
Les auteurs mettent donc l’accent sur le hasard de la rencontre par ce rapprochement d’éléments sans lien explicite ni implicite, le but étant de produire des effets de surprise et de questionnement à la manière des oracles de l’antiquité qui révélaient le sens caché des évènements ou de l’avenir. Ces œuvres en forme d’oracle révèlent la vérité derrière ce qui la masque et font surgir un sens. ne autre caractéristique de ce recueil est la liberté morale de ses créations.
En effet l’ensemble du recueil nous offre des images récurrentes, représentant le désir et le fantasme sexuel à travers des corps dénudés, objets de désir. Dans « l’arbre rose » notamment, les deux corps masculin et feminin entourent une plante phallique épanouie face à un poème qui parle de la fécondité. Dans ce recueil le corps est mis en valeur pour célébrer la sensualité et abolir tous les tabous sexuels, les images sont alors proches de l’expression onirique.
Cette liberté morale est une référence direct 2 ne référence directe au marquis de Sade qui justifie les pulsions sexuelles les plus cruelles. L’auteur des « cent vingt journées de Sodome devient une figure paradoxale de la liberté pour les surréalistes, en réalisant durant son emprisonnement une œuvre transgressive qui explore tous les tabous, notamment sexuels. En guise d’hommage, le recueil consacre deux pages à ses portraits imaginaires réalisés par Man Ray. Le paysage des œuvres participent également à la thématique du rêve.
A la manière d’un songe ou d’un souvenir, il s’associe à un portrait comme dans « fil et aiguille » où le poème comme e dessin évoquent le souvenir maternel à travers l’activité de la couture. Le paysage est alors une sorte de mise en scène de l’inconscient, un paysage intérieur qui accueille une scène fantastique comme c’est le cas du vaste panorama du poème « Où se fabriquent les crayons» : avec le clocher en forme de crayon, le serpent géant qui crève le paysage de montagne impressionnant.
On pourrait se dire que c’est dans cette sorte de pays imaginaire complètement fantastique que sont en effet fabriqués les crayons qu’utilisent les auteurs surréalistes Mais le rêve se transforme vite en cauchemar quand on saisit es connotations négatives des paysages oniriques. En effet, les châteaux prennent une dimension inquiétante en symbolisant l’enfermement et la solitude. Dans le dessin qui accompagne PAGF s 9 dimension inquiétante en symbolisant l’enfermement et la solitude.
Dans le dessin qui accompagne « Les tours du silence», les corps sont comme emprisonnés dans la pierre et Eluard écrit: « Ils sont aux mains de l’espace » : on retrouve l’image de la maln qui enserre et emprisonne, comme dans le dessin de « Pouvoir b. De même dans les portraits imaginaires de Man Ray, le marquis e Sade est emmuré, symbolisant le fait que son œuvre ait été « presque entièrement écrite en prison », comme le précise Éluard.
Cet angoisse face à l’enfermement peut traduire la peur de la stérilité, l’absence de création qui guette l’artiste notamment dans « rêve » où Eluard interprète le dessin de Man Ray par l’impossibilité de communiquer (les ponts tordus, les signaux crevés) qui mène à l’absence de créatlon. A travers ce recueil, Man Ray et Eluard expriment donc les doutes et les angoisses qui les obsèdent. « Les mains libres » offrent une place centrale au rêve, principal oyen de créer utilisé par les surréalistes.
Offrant des scènes d’une part paradisiaques et fantastiques et d’autre part, inquiétantes, les poèmes et les dessins reflètent les pensées libérées des deux artistes qui peignent leurs fantasmes obsessionnels, leurs craintes et leurs angoisses dans des paysages oniriques. 2) Dans la préface des paradis artificiels, Baudelaire écrit « la femme est l’être qui projette la plus grande ombre ou la plus grande lumière dans nos rêves. La femme est PAGF 19 l’être qui projette la plus grande ombre ou la plus grande lumière dans nos rêves.
La femme est fatalement suggestive ; elle vit d’une autre vie que la sienne propre, elle vit spirituellement dans les Imaginations qu’elle hante et qu’elle féconde. (cité dans le dictionnaire abrégé du surréalisme, 1 938, écrit en collaboration avec André Breton). Cette image de la femme correspond-elle à celle qui est donnée dans le recueil par les dessins de Man Ray et les poèmes de Paul Eluard ? La révolution surréaliste, si Hon tient compte des travaux de Breton et Aragon par exemple, revendique la liberté d’aimer pour l’homme en présentant le corps de la femme sous toutes es formes.
La présence féminine est également au centre du recueil des « mains libres » où dessins et poèmes s’associent pour représenter la femme. D’après Baudelaire, « la femme est l’être qui projette la plus grande ombre ou la plus grande lumière dans nos rêves. La femme est fatalement suggestive ; elle vit d’une autre vie que la sienne propre, elle vit spirituellement dans les imaginations qu’elle hante et qu’elle féconde. » On peut donc se demander si cette vision de la figure féminine est conforme ? celle qui est donnée dans le recueil des « mains libres ».
Nous verrons tout d’abord en quoi la femme est présentée comme « la grande promesse » selon les mots de Breton, qu’elle est aussi la muse et la guide de l’artiste, mais qu’elle peut aussi être le medium qui permet de lier l’homme à l’un 7 2 muse et la guide de Partiste, mais qu’elle peut aussi être le medium qui permet de lier l’homme à l’univers. La femme est d’abord considérée comme l’objet et le sujet du déslr dans les travaux de Baudelaire et le recueil des « mans libres Elle est au centre de la création des artistes à travers l’érotisation de son corps. Ainsi presque tous les dessins de Man
Ray dans « les mains libres » comportent une figure féminine dénudée et sensuelle. Dès le frontispice, le dessin montre donc une femme nue allongée sur un pont qui se mire dans l’eau comme Narcisse, sa silhouette sensuelle est couchee sur le côté et ses longs cheveux ondulés trempent dans le fleuve. On retrouve alors la dimension suggestive de la femme décrite par Baudelaire dans sa cltation, cette dimension est également présente dans d’autres dessins tels que « le don b, « les sens « les yeux stériles et « les tours d’Eliane » qui montrent des corps de femmes offerts au désir.
Baudelaire rappelle avant tout la fonction de la femme comme objet du désir physique de l’homme, présente dans les dessins érotiques de Man Ray et les métaphores poétiques d’Éluard qui rendent hommage au marquis de Sade et sa conception cruelle de la sexualité, notamment dans l’ensemble « pouvoir », où le dessin montre un corps de femme nue, prisonnier d’une main qui enserre la moltié de son corps et le poème apparente cette scène à un viol : « il la saisit au vol, l’empoigne par le milieu du corps, la cei 9 apparente cette scène à un viol : « il la saisit au vol, Pempoigne ar le milieu du corps, la ceinturant de ses dogts robustes, il la réduit à Pimpuissance La femme est ici le sujet de rêverie prlncpale de l’artiste puisqu’elle occupe une place importante dans son esprit, d’après Baudelaire. Mais cette image spirituelle peut être perçue aussi bien de manière positive que négative. Si d’une part, son corps est sublimé comme dans « la femme et son poisson » où le corps de la femme, en épousant la forme du poisson, semble prendre l’apparence d’une sirène, la femme est d’autre part synonyme d’absence, quand son visage est effacé du adre (comme pour le dessin « burlesque ») ou dissimulé derrière un « masque de poix » comme dans « narcisse ».
On retrouve cette réflexion sur la présence ou rabsence de la femme dans l’ensemble « femme portative » où Eluard exprime sa peur de la perte de l’être aimé : « terrestre dérision la femme quand son cœur est ailleurs, si ce que j’aime m’est accordé, je suis sauvé, si ce que j’aime se retranche, s’anéantit, je suis perdu Si Man Ray dessine sans cesse des silhouettes ou des parties du corps, et Éluard en revient sans cesse à ce « elle » qui « hante » bon ombre de poèmes, c’est sans doute parce qu’une partie de cet autre leur échappe constamment. En effet, la femme donne ? l’œuvre son caractère fantastique par la dlmension mystérieuse qu’elle incarne pour les artistes. Elle a donc avant tout une foncti dimension mystérieuse qu’elle incarne pour les artistes.
Elle a donc avant tout une fonction d’inspiratrice pour le poète qui chante sa beauté et son caractère irrésistible. En tant que muse, elle apparait souvent sous les traits de Nusch, la femme de Paul Eluard, l’espoir que le poète attend pour revivre après a précédente séparation : « le remède miracle accord cadeau confiance » extrait des « nuages dans les mains s. Elle est l’essence même de la puissance des mots qui se dégagent des poèmes. Son influence sur les artistes est donc indéniable par son omniprésence et sa nécessité auprès des artistes : objet de la passion amoureuse, elle incarne la vie, abolit la solitude et le désespoir. Cet amour qu’elle inspire va bien au-delà du seul érotisme.
La « lumière » dont parle Baudelaire montre d’ailleurs la femme en tant que guide du regard de l’artiste dans un paysage auvage : « c’est elle « sur cette étoile de gazon », « parmi ces sauvages Y, « dans la neige là « au fond d’un ravin la figure féminine a une fonction rassurante et apaisante. Le pouvoir féminin est donc mis en avant dans le dessin « le mannequin » où la femme tire les ficelles ; son pouvoir réside dans le fait qu’elle n’a pas besoin d’être sur le devant de la scène pour exister, ainsi dans l’ombre comme dans la lumière, la femme est omniprésente pour guider le poète vers la liberté. Cependant, une autre dimension de la figure féminine est présente dans le recueil des