discours sur le bonheur
Il faut commencer par se bien dire à soi-même et par se bien convaincre que nous n’avons rien à faire dans ce monde qu’? nous y procurer des sensations et des sentiments agréables. Les moralistes qui disent aux hommes : réprimez vos passions, et maîtrisez vos désirs, si vous voulez être heureux, ne connaissent pas le chemin du bonheur. On n’est heureux que par des goûts et des passions satisfaites ; je dis des goûts, parce qu’on n’est pas toujours assez heureux pour avoir des passions, et qu’au défaut des passions, il faut bien se contenter des goûts.
Ce serait onc des passions qu’il faudrait demander à Dieu, si on osait lui demander quelque chose Mais, me dira-t-an, les passions ne font-elles pas plus de malheureux que d’he peser en général le b mais il faut remarqu qu’ils ont or 2 Swipe to View nexr_ page ance necessaire pour faits aux hommes , nt connus parce ont besoin des autres, qu’ils aiment à raconter leurs malheurs, qu’ils y cherchent des remèdes et du soulagement.
Les gens heureux ne cherchent rien, et ne vont point avertir les autres de leur bonheur ; les malheureux sont intéressants, les gens heureux sont inconnus. On connaît donc bien plus l’amour par les malheurs qu’il ause, que par le bonheur souvent obscur qu’il répand sur la vie des hommes.
Mais supposons, pour un moment, que les passions fassent plus de malheureux que d’heureux, je dis qu’elles seraient encore à désirer, parce que c’est la condition sans laquelle on ne peut avoir de grands plaisirs ; or, ce n’est la peine de vivre que pour avoir des sensations et des sentiments agréables ; et plus les sentiments agréables sont vifs, plus on est heureux. Il est donc à désirer d’être susceptible de passions, et je le répète encore : n’en a pas qui veut. Madame du CHATELET – Discours sur le bonheur