CHAP 2 22 B La cr ation mon taire 1ere cours 2010 2011 4
B – LA CRÉATION MONÉTAIRE La monnaie est omniprésente dans nos échanges quotidiens, dans notre vie et pourtant elle semble mal connue. Qu’est ce que la monnaie ? Quelles sont ses fonctions ? Quelle est l’utilité économique de la monnaie ? La monnaie a-t-elle une fonction sociale ? Comment les formes de la monnaie se sont-elles transformées ? Qui crée la monnaie ? Quel rôle jouent les banques ? – Les fonctions de la monnaie a) – Les trois fonctions traditionnelles de la monnaie 1. Dans l’histoire trad or 29 précédé la monnaie. archandises contre autre prix relatif (prix de Al e nombre de biens B troc peut s’inscrite dans un échange non marchand obéissant à la logique du don. le troc aurait ce qui suppose un vec un bien A). Ce 2. Or, selon les économistes, le troc présente de nombreux inconvénients pour les échanges marchands : Il suppose une double coïncidence : d’une part, trouver quelqu’un qui soit prêt à vendre le bien que l’on cherche et, d’autre part, qui soit prêt à accepter les biens dont on dispose.
II suppose que les biens échangés puissent être stockés pendant le temps nécessaire à la réalisation de la double coïncidence. D Il provoque une multiplication des prix relatifs (avec n biens, on obtient n(n-l prix relatifs. Avec 10 biens, on a déjà 45 prix relatifs à retenir ! ) ce qui complexifie auraient donc inventé la monnaie qui serait consubstantielle aux échanges marchands. La monnaie remplit en effet une triple fonction qui la rend beaucoup plus efficace que le troc.
Les fonctions économiques de la monnaie Etalon de valeu Moyen de paiement Réserve de valeur Baisse des coûts d’information et de transaction La monnaie est une unité de mesure des prix (étalon de valeur) : tous les prix sont exprimés avec la ême unité de compte, ce qui permet de passer de la multiplicité des prix relatifs à l’unicité du prix nominal La monnale permet donc une économie d’information par rapport au troc (avec dix biens, on n’a plus que dix prix à retenir au lieu de 45 La monnaie est un moyen de paiement ou d’échange : les biens s’échangent contre de la monnaie qui elle même s’échange contre des biens (idée de « passage » de Clower). La monnaie a donc un pouvoir d’achat général et immédiat. On dit quelle est « liquide La monnaie permet de s’acquitter de ses dettes, et en particulier de la dette que l’on a vis-à-vls de celul qui ous a fourni un bien ou une prestation. Elle permet aussi de diminuer les coûts de transaction occasionnés par l’économie de troc, les coûts de recherche pour réaliser la double coïncidence et les coûts d’attente liés au sto PAGF OF transaction) et parce qu’elle est liquide (motif de précaution), c’est à dire Immédiatement disponible sans coût de transformation ni risque à court terme.
Cependant, pour que la monnaie puisse être thésaurisée sans risque, il faut empêcher l’inflation, c’est-à-dire une hausse forte et généralisée des prix qui diminuerait son pouvoir d’achat. Avec une inflation forte, ce n’est plus la monnaie qui mesure le niveau des prix mais ce sont les prix qui mesurent la valeur de la monnaie (érosion monétaire) et les calculs économiques sont faussés. 4. En conséquence, la monnaie est un moyen de paiement accepté par tous, directement utilisable pour effectuer des règlements sur les marchés des biens des services et des capitaux au sein d’un espace monétaire donné. Cette définition permet de préciser les principales qualités de la monnaie : Cl Elle est totalement liquide c’est à dire qu’elle a un pouvoir libératoire, immédiat et général.
Cl Elle repose sur la confiance en son pouvoir d’achat (toute défiance se traduira par un comportement de « fuite » devant la monnaie qui sera changée immédiatement dans une autre monnale ou dans un actif réel) b) – La monnaie vecteur du lien social 5. La monnaie n’a pas qu’une fonction utilitariste, elle a aussi une dimension sociale pour plusieurs raisons D’une part, parce que derrière les échanges monétaires se cachent des liens sociaux qui ne sont pas seulement marchands. Alliances matrimoniales (la dot), alliances claniques (le tribu), alliance religieuse monnaie se substitue à la violence pour compenser es pertes dues à un mariage, une mort, un ac 3 OF à la violence pour compenser les pertes dues à un mariage, une mort, un accident…
La monnaie est constitutive du lien social car elle permet les relations individuelles mais aussi l’appartenance à un corps social plus large. Elle contribue au sentiment d’appartenance ? une même société. Elle crée donc une interdépendance entre les membres d’une société. Elle est aussi à la source de la société marchande, parce que, sans elle, personne n’accepterait de se séparer de ce qui lui appartient contre quelque chose dont il risque de ne ouvoir se défaire. Cet objet produit à la fois de la confiance (puisque chacun l’accepte, je l’accepte, d’où un sentiment d’appartenance sociale) et de la violence (violence mimétique : puisque chacun la désire, je la désire, d’où une lutte potentielle).
D’autre part, parce que la monnaie est le symbole de l’appartenance à une communauté humaine sur un territoire donné. La monnaie représente une forme de « langage commun » utilisé au sein d’une même « communauté » de paiement. En établissant des règles communes à tous les individus, elle permet de relier les indivldus . roducteurs et clients. Elle contribue ? l’émergence d’une conscience d’appartenir ? un même monde. Elle forge une identité commune, permet de souder une population. La création de l’Euro a été ainsi le symbole d’une communauté de destin entre les peuples européens de la zone euro qui veulent éviter le retour des guerres fratricides.
En ce sens, la monnaie est première dans le lien social. C] Enfin, parce que la monnaie repose sur la confiance de tous en son acceptation par les autres. On accepte de se séparer d’une monnaie repose sur la confiance de tous en son acceptation par les autres. On ccepte de se séparer d’une richesse matérielle contre de la monnaie parce que l’on sait qu’elle permettra l’acquisition d’autres richesses matérielles. Monnaie et confiance sont indissociables. En effet, Si la monnaie remplit ses fonctions économiques, c’est qu’elle est un instrument admis par tous et en toute circonstance. La confiance rend la monnaie légitime au sein d’une société.
Les fonctions sociales de la monnaie pacifier les relations sociales Appartenance ? une communauté Renforce les liens sociaux Renforcement de la cohésion soclale c) La monnaie, instrument du pouvoir politique 6. La monnaie a également une fonction politique puisque PEtat a un monopole d’émission de la monnaie légale. Elle est un bien collectif indivisible qui ne peut être privatisé et qui réclame des institutions politiques. D La monnaie est le symbole du pouvoir politique et de la communauté nationale qui sy rattache. Ce pouvoir et cette appartenance à un territoire s’affichent sur les instruments monétaires (la tête du souverain sur les pièces ou les billets, le symbole de la nation et les frontières de l’Union pour l’Euro. La création monétaire a t un des moyens pour PAGF s OF valeur de la monnaie. Il doit donc en églementer l’usage et mener une politique monétaire pour, à la fois, limiter l’inflation et encourager la croissance. Les fonctions politiques de la monnaie Symbole du pouvoir politique Finance les dépenses de l’Etat Régule l’activité économique Renforce le pouvoir politique 7. L’euro est la monnaie unique de 15 États membres de l’Union europeenne et des institutions de l’Union européenne. Cette monnaie a été mise en circulation le 1 janvier 2002 sous sa forme fiduciaire, mais était en usage dès le 1 janvier 1 999 sous sa forme scripturale.
Elle a modifié la fonction politique de la monnaie sur rois points : Cl L’Euro ne représente pas une nation mais une entité supranationale, l’Union européenne ; Cl L’Euro est créé par une banque centrale européenne, la BCE, qui est indépendante des Etats nationaux de la zone euro ; C] La BCE a l’interdiction de financer les défic ts publics des Etats. 2 – Les formes de la monnaie a) – Lihistoire traditionnelle de la monnaie : la dématérialisation de la monnaie 1 . Selon une conception tr PAGF 6 OF es économistes on a en particulier l’or et l’argent, qui va s’imposer pour plusieurs raisons : D L’or et l’argent sont des métaux rares ce qui leur assure une orte stabilité de leur pouvoir d’achat , Cette stabilité inspire une grande confiance. Ils sont universellement acceptés ; Ils sont divisibles (en grammes, en pièces), ce qui leur permet de s’adapter aux différents prix. Cet étalon or ou argent (« bimétallisme ») va s’imposer jusqu’au début du XIXe siècle.
La monnaie métallique va utiliser deux supports pour circuler : C] Au départ, la monnaie métallique est pesée, c’est à dire qu’elle se présente sous la forme de lingots aux poids disparates (risque de manipulation des balances) ; Cl Ensuite, elle est frappée, c’est à dire qu’elle prend la forme de ièces dont la valeur faciale est égale au poids d’or ou d’argent qu’elle contient (possibilité de manipuler le contenu des pièces). Afin de garantir son contenu, pour instaurer la confiance, et pour assurer son pouvoir économique, l’Etat s’empare du monopole de la frappe de la monnaie qui devient la monnaie légale. 4. 3ème étape : la monnaie fiduciaire. Le billet va remplacer peu ? peu la monnaie métallique. Le transport des pièces est difficile et dangereux.
Les commerçants ont pris l’habitude, dès le XIVe siècle, de faire circuler des titres représentatifs des dépôts d’or ou d’argent qu’ils ont onfié à leur banquier (lettres de change ou billet à ordre). Le règlement est effectué par la remise du titre qui est endossé (signature au dos du titre). A partir du XVIIIe siècle, les banquiers vont prendre l’habitude d’émettre leurs propres billets : n Au départ, le billet 7 OF siècle, les banquiers vont prendre l’habitude d’émettre leurs propres billets : C] Au départ, le billet n’est qu’un simple certificat de dépôt dont la valeur est égale à la valeur de l’or ou de l’argent déposé par le client. n Ensuite, le banquier va s’apercevoir que ses clients ne viennent pas tous réclamer en même temps l’or t l’argent déposé dans sa banque.
Il va donc prendre le risque d’émettre, à l’occasion de crédits accordés à ses clients, des billets supplémentaires. La valeur totale des billets émis va donc dépasser la valeur totale du stock d’or et d’argent détenu par la banque. La monnaie devient une monnaie-papier. Ainsi, dès le XVIIIe siècle, la circulation des billets repose sur la confiance («fidus» en latin) que les agents ont dans la convertibilité du billet en pièces d’or ou d’argent. Pour éviter une trop forte création de billets et rassurer les porteurs, l’Etat va confier, au milieu du XIXe iècle, le monopole de l’émission à une Banque centrale. A partir de 1914, le billet devient inconvertible en or pour les agents non financiers.
Le billet a cours forcé, cest ? dire que sa valeur doit être acceptée comme telle et a cours légal, c’est à dire que nul ne peut le refuser. La monnaie devient fiduciaire. Cette dissociation entre la valeur intrinsèque des pièces et des billets et leur valeur faciale correspond à la première étape de la dématérialisation de la monnaie. Evolution de la structure de la masse monétaire Ml en France (dans la zone Euro pour 2010) en % En % 1789 1870 8 OF Monnaie métallique 96 69 Monnaie fiduciaire Monnaie scripturale 14 56 94,4 (Source : Jacques Bouvier, un siècle de banque française, Hachette, 1973, Actualisé 2010) d’utilisation) (Banque de France, Janvier 2011) 6. coût de la circulation des instruments papiers étant élevé, les banques ont de plus en plus développé le règlement informatisé et automatisé (porte monnaie électronique, télépaiement, carte bancaire… ) ce qui a fait dire à certain qu’on était passé à une monnaie électronique (3ème forme de la dématérialisation de la monnaie). b) – Critiques de la thèse de la dématérialisation . Il faut relativiser cette thèse de la dématérialisation pour plusieurs raisons : La monnaie a, semble-t-il, précédé le troc au cours de l’histoire. Elle semble apparaître en même temps que les sociétés humaines se constituaient. En Mésopotamie, les premières écritures cunéiformes, sur des tablettes d’argile, ont été des écritures comptables. un système de gestion administrative des dettes et des créances s’est développé.
Il était basé sur la comparaison de la valeur des produits échangés avec des « valeurs-étalons » connus de tous (quantité donnée de céréales, d’or, ou d’argent). En Egypte et en Mésopotamie, la monnaie scripturaire a existé bien avant la monnaie fiduciaire. Mais avec l’intensification et la diversification des échanges, cela a nécessité une administration pléthorique, et par conséquent une comptabilité bien trop lourde. Il a donc fallu simplifier : trouver le moyen de solder une dette par un moyen simple et fiable : la monnaie « fiduciaire ». n Les fonctions sociales de la monnaie ont sans doute précédé son rôle dans les échanges économiques. La monnaie sert d’abord à ré Ier des dettes sociales : la dot de la mariée, la rançon pour le