Sur Quatre conférences de Claude Simon

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Sur Quatre Conférences de Claude Simon Claude Simon affirmait souvent n’être pas théoricien, poussant toujours ses interviewers à s’adresser à des personnes plus « compétentes » ou plus « qualifiées » que lui pour répondre ? des questions d’ordre littéraire, artistique ou philosophique. Dans ces quatre conférences publiées aujourd’hui pour la première fois dans leur intégralité, on s’aperçoit qu’effectivement, Claude Slmon n’est pas théoricien, et que c’est justement ce qul donne à ces textes toute leur acuité et toute leur valeur.

Car ces réflexions ne sont pas celle d’un critique mais celles ? Swp to page la fois d’un lecteur et toujours d’une justes ri Simon, sont le fait d’ au « travail de et sur s’agisse de celui d’au m Les conclusions, s parvient Claude rtée au texte, e à le dire, qu’il conférences sont donc inséparables de sa propre pratique de la littérature, et elles constituent pour le lecteur, autant que de précieuses réflexions sur la littérature et sur l’art, une porte d’entrée dans l’atelier et dans la pratique simonienne, une possibilité de comprendre la açon de travailler de l’écrivain.

La première conférence, intitulée « Le poisson cathédrale analyse avec virtuosité le passage de la Recherche du Temps perdu dans lequel Proust décrit le poisson servi sur la table du Grand-Hôtel de Balbec et, uniquement à partir de cette analyse et de sa mise en relation avec le reste de la Recherche, aboutit à la formulation de ce qu’est un texte littéraire pour Claude Simon : un ensemble au sein duquel, par la force de l’écriture, chaque élément est en rapport avec les autres, la cohérence du tout dépendant non as de données socio-psychologiques mais du pouvoir de liaison propre à l’écriture ; et au sein duquel, surtout, la description joue un rôle non plus ancillaire comme dans le roman traditionnel mais absolument crucial, mateur et matrice du reste de l’œuvre.

Les trois autres conférences, « L’absente de tous bouquets », « Ecrire » et « Littérature et mémoire sans s’appuyer dans leur totalité sur un texte littéraire, tirent également leur substance d’exemples pris soit dans des romans (Stendhal, Flaubert, Faulkner, Proust toujours), soit dans l’histoire de rart Simon évoque fréquemment Cézanne, Poussin, le Tintoret), et également dans l’œuvre simonienne elle-même, Claude Simon expliquant par exemple pourquoi telle phrase de L’Acacia se termine par le mot « bicyclette Tous ces exemples très concrets lui permettent de formuler des convictions qui ont toujours été les siennes, tout au long de son activité d’écrivain. our lui, la littérature est avant tout un travail d’écriture et de langage, sans aucun message extérieur ? transmettre qui leur serait préalable. C’est I PAG » OF d d’écriture et de langage, sans aucun message extérieur ? ransmettre qui leur serait préalable. Cest récriture qui donne sa forme au texte, c’est d’elle qu’il tire sa cohérence et c’est elle qui détermine à la fois l’existence et fordre d’apparition des éléments qui s’y trouveront. Pour Claude Simon, une œuvre qui ferait passer un « contenu » quel qu’il soit avant les impératifs de la langue, n’est pas une œuvre littéraire. C’est pour cette raison également que le concept d’ « écrivain engagé » constitue pour Simon une contradiction dans les termes.

C’est en travaillant sur l’écriture que l’écrivain, renversant l’ordre ?tabli, peut faire évoluer le monde, et non en véhiculant des doctrines philosophiques ou sociales qui feraient de lui un simple « écrivant » pour reprendre, comme il le fait, la terminologie barthésienne. Claude Simon démystifie également l’idée selon laquelle il existerait des souvenirs à l’état pur qu’il s’agirait pour l’écrivain de consigner le plus fidèlement possible. Simon montre comment notre rapport au réel est toujours médiatisé, configuré par les œuvres d’art qui ont façonné notre regard, et comment cela est ‘autant plus valable en ce qui concerne la mémoire puisqu’il s’agit en outre d’éléments que nous n’avons plus sous les yeux. renant comme exemple le récit par Stendhal du passage du Saint-Bernard, il montre que l’écrivain décrit beaucoup moins un souvenir « vécu » qu’une recréation de ce souvenir, notammen l’écrivain décrit beaucoup moins un souvenir « vécu » qu’une recréation de ce souvenir, notamment par l’influence d’une gravure représentant cet épisode qui s’est peu à peu substituée au souvenir « authentique » et surtout par le pouvoir de l’écriture ui seule, finalement, décidera de la « véridicité » de ce souvenir. Enfin, et il s’agit d’un élément essentiel tant en ce qui concerne l’œuvre simonienne en particulier que la littérature moderne en général, Claude Simon insiste énormément sur la valeur qu’il attache à l’écriture en gestation, au brouillon, à l’ébauche.

Evoquant les brouillons de Mme Bovary, beaucoup plus percutants selon lui que la forme achevée et « bien léchée » du roman qui « affadit » énormément le personnage d’Emma, citant avec admiration les dessins et les esquisses de peintres qui, au ieu de la gommer « laisse, et même affirme[nt], la trace du coup de pinceau, affirme(nt] la matière il se fait le porte-parole d’une littérature auto-réflexive, qui ne cesse de prendre pour objet le geste même qui l’a initiée. Ces Quatre conférences constituent donc un texte précieux à la fois pour les lecteurs de Claude Simon auxquels elle apportent un éclairage supplémentaire de l’œuvre romanesque de l’écrivain, et pour ceux qui s’interrogent sur la signification que peuvent avoir, de nos jours, des termes comme « art » et « littérature