Sujet ES 2004
Institut Régional du Travail Social – Service Sélections École de servite social – CRF 11 rue Guyon de Guercheville – B. P. 10116 5 rue du Gué-de Gesnes 14204 HÉROUVILLE SAINT CLAIR CEDEX 61000 ALENCON EXAMEN REGIONAL D’ENTREE EN FORMATION D’ASSISTANT DE SERVICE SOCIAL ET D’ÉDUCATEUR SPÉCIALISÉ SAMEDI 24 JANVIER 2004 DURÉE DE L’ÉPREUVE : 3 HEURES Documents 1) Extrait de L’Asphyxie ou le cri de Jean Onimus 2) Extrait de La Nouvelle Hélo’lÉe de Jean-Jacques Rousseau Sni* to View 3) Article du Courrier I – Maîtrise de la lang or 7 1 . ) pour chacun des (description d’une sit exte narratif (tranch expose un problème) ou d’un n texte descriptif exte informatif (qui texte argumentatif (défense d’une thèse) en justifiant votre réponse. 1. 2) Donnez un titre au texte de Jean-Jacques Rousseau qui rende compte de la vision bucolique des vendanges qu’il raconte. 1 Justifiez le titre L’Asphyxie ou le cri dont est extralt le document 1. 1-4) Dans le document 3, expliquez les expressions « l’individu atomisé » (ligne 17) et « désacralisation du sens des fêtes traditionnelles » (ligne 21 1. ) Document 3 : donnez un sous-titre au cinquième aragraphe. 1. 6) Dans le deuxième document, Rousseau fait référence aux fêtes saturnales, fêtes au cours place des maîtres. Quel est le but social d’une telle fête ? 1. 7) Dans le document 1, repérez les mots qui se rattachent, pour Jean Onimus, à la fête. En d’autres mots, quels sont les synonymes de la fête, dans le texte ? Il – Analyse argumentative : 7 points sur 30 2*1) Dans les documents 1 et 3, repérez la thèse respective des auteurs. 2. 2) Pour chaque auteur, la fête a une valeur de rupture.
Repérez, pour chacun des textes, ce avec quoi la fête rompt. 2. ) Relevez dans chaque texte un argument ou un passage qui illustre la thèse suivante : « La fête est une soupape de sécurité 2. 4) Dans le document 3, dites pourquoi, selon l’auteur, la fête est vouée au déclin. Ill – Discussion : 12 points sur 30 Parmi les regrets qui s’échappent nostalgiquement au moment où se pose un regard sur le passé, il y a celui qui concerne la fête dont on conteste la permanence dans la société moderne.
Si les occasions de « faire la fête » se conservent, si certaines fêtes apparaissent (Halloween… ), le sens de la fête, lui, semble ainsi s’être modifié, voire estompé. Parallèlement, certains disent que les gens ne savent plus faire la fête ; la fête traditionnelle a été remplacée par des avatars frelatés (anonymat, vie urbaine, solitude). Dans une discussion argumentée (introduction, développement avec paragraphes, conclusion), vous direz si la fête reste, selon vous, un moment essentiel de la vie quotidienne ou si elle est, désormais, dépourvue de sens.
Presentatio PAG » rif 7 moment essentiel de la vie quotidienne ou si elle est, Présentation, orthographe, syntaxe : 4 points AUCUNE FEUILLE DE BROUILLON NE SERA ACCEPTEE La communauté humaine peut-elle vivre sans fêtes ? La fête est ce moment essentiel de la vie sociale, moment de vie intense, où la communauté prend conscience de sa cohérence et en fait une source de joie. En temps normal, chacun vaque à sa besogne, et la société se réduit à un tissu d’activités diverses dont la cohésion générale est peu ressentie.
La fête provoque une rupture dans la monotonie du travail quotidien : l’espace d’un jour voire d’une heure, la communauté se donne le loisir et le luxe d’être présente à elle-même, de jouir d’elle-même et de célébrer e plaisir de se retrouver. En temps de fête, les gens se parlent, se rencontrent, sont transparents les uns aux autres, débarrassés des mécanismes (gestes, langages) qui les condamnaient jusqu’alors à des échanges utilitaires et abstraits.
Le même phénomène se produit en présence d’un événement grave, qui fait craquer les couches isolantes. La fête suscite, légalise, cette sorte de fusion et d’effusion . les danses populaires du 14 Juillet en pleine rue, là où normalement le trafic est roi, la possibilité au moment du Carnaval de lancer des confettis ? la figure des agents de olice, cette irruption dans des zones normalement interdites, tout cela crée une ambiance poétique libératrice.
Les hommes retrouvent, par-de PAGF3C,F7 interdites, tout cela crée une ambiance poétique libératrice. Les hommes retrouvent, par-delà les masques sociaux, d’anciens gestes, presque oubliés, une spontanéité longtemps brimée. Réveil d’une communication dont on avait perdu le secret, la fête apporte un renouveau de vigueur au corps social. Le souvenir de ces moments d’exubérance et de grâce rend plus supportable ensuite la sécheresse de la vie quotidienne. La clarté qu’ils projettent subsiste longtemps dans la mémoire… usqu’à la fête suivante. Car la fête ritualise et solennise le temps. Elle ne se contente pas d’établir entre les individus des rapports plus chaleureux, elle instaure aussi une poésie de la vie. Elle se produit en général aux changements de saison, ou bien au coeur de l’hiver ou de l’été. Elle permet ainsi de prendre conscience du cycle annuel, de le rejouer, d’en faire un objet de contemplation et de célébration. Qui ne voit qu’une telle célébration est, au fond, un geste d’amour, une réconciliation de Phomme avec sa VIe ?
Jadis, à la fête des moissons ou des vendanges, les gestes du moissonneur, du vendangeur étaient solennellement transfigurés en rite, stylisés en oeuvre d’art. Et c’est bien la fonction de la fête elle stylise rexistence. Jean Onimus, L’Asphyxie ou le cri, Desclée de Brouwer, 1971 « Depuis un mois les chaleurs de l’automne apprêtaient d’heureuses vendanges ; les premières gelées en ont amené l’ouverture ; le pamprel grillé, laissant la grappe à découver laissant la grappe à découvert, étale aux yeux les dons du père Lyée et semble inviter les mortels ? s’en emparer.
Toutes les vignes chargées de ce fruit bienfaisant que le ciel offre aux infortunés pour leur faire oublier leur misère ; le chant des vendangeuses dont ces coteaux retentissent ; la marche continuelle de ceux qui portent la vendange au pressoir ; le rauque son des instruments rustiques qui les anime au travail ; l’aimable et touchant tableau d’une allégresse générale qui semble en ce moment étendu sur la face de la terre ; enfin le voile de brouillard que le soleil élève au matin comme une toile de théâtre pour découvrir à roeil n si charmant spectacle tout conspire à lui donner un air de fête ; et cette fête n’en devient que plus belle à la réflexion, quand on songe qu’elle est la seule où les hommes aient su joindre l’agréable ? l’utile Le soir, on revient gaiement tous ensemble. On nourrit et loge les ouvriers tout le temps de la vendange ; et même le dimanche, après le prêche du soir, on se rassemble avec eux et l’on danse jusqu’au souper. Les autres jours on ne se sépare point non plus en rentrant au logis, hors le baron qui ne soupe jamais et se couche de fort bonne heure, et Julie qui onte avec ses enfants chez lui jusqu’à ce qu’ils aillent coucher.
A cela près, depuis le moment qu’on prend le métier de vendangeur jusqu’à celui qu’on le quitter on le quitte, on ne mêle plus la vie citadine à la vie rustique. Ces saturnales2 sont bien plus agréables et plus sages que celle des Romains. Le renversement qu’ils affectaient était trop vain pour instruire le maître ni l’esclave ; mais la douce égalité qui règne ici rétablit l’ordre de la nature, forme une instruction pour les uns, une consolation pour les autres, et un lien d’amitié pour tous. » J. J. Rousseau, La Nouvelle Héloïse, 1761 1 Branche de vigne 2 Fêtes au cours desquelles les esclaves prenaient la place des maîtres La fête répond sans doute à un besoin universel. Mais lequel ? Toutes les sociétés l’ont pratiquée, toutes la pratiquent encore.
Pourtant, on le sent bien, quelque chose d’essentiel qui passait dans la fête d’autrefois est de moins en moins présent dans la fête d’aujourd’hui. Peutêtre son mystère, ce qui faisait d’elle un moment inoub arraché au temps de la vie quotidienne. La fête a toujours eu pour vertu de réconcilier provisoirement les contraires ; d’unir ce ue le fil des jours tendait à séparer – le rituel et le spontané, la tradition et la licence, le religieux et le profane, le riche et le pauvre, la solitude de chacun et la chaleur de tous. Cette rupture des rythmes habituels du groupe était à la fois chaotique et programmée, festive et cérémonielle. par là, elle retrouvait, cycliquement, le secret des origines du monde – la nécessité cérémonielle.
Par là, elle retrouvait, cycliquement, le secret des nécessité de l’ordre s’imposant par épuisement du désordre. On comprend que la fête ait rempli de telles fonctions dans les ociétés communautaires et rurales, dont la vie est scandée par le retour immuable des saisons et où les lois humaines semblent reproduire, implacablement, un dessein cosmique. Mais qu’en est-il dans les villes d’aujourd’hui, où l’individu atomisé se retrouve dans une foule de plus en plus anonyme, et où, dissociant les lois de la nature des lois de la société, il est quotldiennement sommé d’assumer la responsabilité de ses choix personnels comme du destin de sa cité ?
Il se produit, le plus souvent, une désacralisation du sens des fêtes traditionnelles, alors u’émergent ces fêtes collectives profanes que sont, par exemple, les concerts de musique populaire ou les compétitions sportives – grand-messes païennes, célébrations de mythes vivants – et que se multiplient des fêtes beaucoup plus intimes, réunions d’amis, événements librement décidés et personnalisés à l’extrême.. Mais alors, à quoi correspond le désir de fêter ? La fête assouvit- elle aujourd’hui, chez l’individu moderne, les mêmes besoins qu’hier dans les communautés traditionnelles ? La fête continue, mais, dorénavant, que fête-t-on ? Article extrait du Courrier de l’Unesco, déc. 89